En 2008, une Américaine de confession musulmane s'était vu refuser un poste de vendeuse chez Abercrombie & Fitch. 7 ans après les faits, la Cour suprême des Etats-Unis semble pencher en sa faveur. Détails. Mercredi, la Cour suprême des Etats-Unis s'est penchée sur une affaire de discrimination religieuse peu commune. A l'issue de l'audience, la majorité des juges s'étaient rangés du côté de la plaignante. Les faits remontent à 2008. Samantha Elauf, alors âgée de 17 ans, s'était ainsi vu refuser un poste de vendeuse chez Abercrombie & Fitch (A&F), une marque de vêtements très prisée par les adolescents du pays. En cause, le foulard islamique qu'elle portait lors de l'entretien de recrutement. Sauf que pour l'enseigne, là n'est pas la question. Les magasins d'A&F sont, en effet, réputés pour leurs mannequins «sexy» aux torses sculpturaux et aux jeans taille basse. Idem pour ses vendeuses, appelées «modèles», qui affichent souvent des tailles minces et des décolletés généreux. Celles-ci sont tenues de présenter un avant-goût du «style Abercrombie» aux clients et d'afficher «le style du lycéen classique de la côte Est» des Etats-Unis. Les «chapeaux» et la couleur noir sont bannis, mais «le foulard» n'est pas explicitement interdit, souligne le journal Le Monde. Discrimination religieuse ? La question à laquelle la Cour suprême devait trouver une réponse est la suivante : Abercrombie & Fitch s'est-elle rendue coupable de discrimination religieuse en refusant ce poste de vendeuse à Samantha Elauf ? Lors de l'audience, plusieurs juges ayant examiné la plainte de l'Agence gouvernementale pour l'égalité devant l'emploi (EEOC) qui défend la jeune musulmane, ont cependant relevé le «caractère confus» de l'affaire. Aux Etats-Unis, la loi interdit formellement la discrimination religieuse à l'embauche, sauf dans le cas où l'employeur démontre qu'il ne peut pas «aménager raisonnablement» ses horaires par rapport à une pratique religieuse. D'un coté, l'enseigne de prêt-à-porter rappelle que la candidate n'a ni mentionné sa confession, ni demandé explicitement d'aménagement de sa politique vestimentaire en fonction de sa religion. D'un autre, la jeune femme affirme qu'A&F ne pouvait pas ignorer qu'elle était musulmane et aurait donc dû lui demander si elle était prête à s'adapter à sa politique. «Peut-être que ce jour-là, elle avait juste des cheveux qu'elle ne voulait pas montrer, alors elle est venue avec un foulard, mais elle n'avait aucune raison religieuse pour le faire. Voulez-vous refuser sa candidature pour cette raison ?», a notamment demandé le juge Samuel Alito, cité par Le Monde, pour démonter l'argumentation de l'entreprise. «La raison pour laquelle vous l'avez refusée était parce que vous supposiez qu'elle allait le faire chaque jour et, chaque jour la seule raison pour laquelle elle le ferait serait religieuse», a-t-il ajouté en s'adressant cette fois à l'avocat d'Abercrombie. La loi fédérale de 1964 Samantha Elauf, soutenue par le gouvernement Obama, l'EEOC et plusieurs organisations religieuses, avait déjà attaqué l'entreprise et avait obtenu en première instance 20 000 dollars de dommages et intérêts. Elle a toutefois été déboutée en appel, la cour ayant estimé que la loi fédérale de 1964 sur les droits civiques, qui «interdit la discrimination en matière d'emploi fondée sur la race, la religion, la couleur, le sexe ou l'origine nationale» ne s'appliquait pas dans son cas, car la jeune femme n'avait pas fait de demande explicite en fonction de sa confession, qu'elle n'a pas évoquée non plus lors de l'entretien. Qu'en sera-t-il de la décision de la plus haute juridiction du pays ? La réponse est attendue fin juin.