L'émission Envoyé Spécial de France 2 a diffusé, jeudi soir, un reportage sur l'avortement clandestin au Maroc. On peut y voir un médecin et son équipe se battre pour la légalisation de cet acte, des mères qui fuient en abandonnant leurs enfants indésirables ou encore une justice qui ne communique pas sur le désir de faire avancer les choses. Au 21ème siècle, au Maroc, l'avortement est toujours un acte interdit par la loi. Une loi écrasée par le poids de la religion. Face à cela, des médecins se battent tous les jours pour que ce ne soit plus une tare ou un tabou. Les Marocaines, ancrées dans la sphère du déshonneur familial, ne veulent pas d'enfants hors mariage. Une centaine de femmes se font avorter tous les jours clandestinement. Les conditions médicales ne sont pas toujours bonnes et le coût est très élevé. N'ayant pas eu d'éducation sexuelle, la plupart ne connaissent pas la pilule, qui est pourtant en vente libre depuis 40 ans au Maroc. Celles qui la connaissent n'ont pas le courage d'aller l'acheter, de peur du «qu'en dira- t-on» encore une fois. Rien dans le coran qui l'interdit Le docteur Chraïbi, président de l'Association marocaine de lutte contre l'avortement clandestin (AMLAC), travaille à Rabat. Il ne comprend pas que la légalisation de l'avortement puisse poser problème, alors que dans plusieurs pays arabo-musulmans, cela s'est fait sans soucis. Moulay Ahmed El Khamlichi, directeur à l'Institut Dar El Hadith de Rabat (Formation en sciences de la religion), appuie ses dires par le Coran. D'après lui, «Il n'y a rien dans le Coran qui interdise l'avortement. Mais rien ne l'autorise non plus. Ce sont des questions qui sont laissées à la conscience de chacun». L'homme de religion et le scientifique sont alors d'accord, pour être en désaccord avec la loi. Le juge d'instruction Mohamed Malhafi a condamné à Meknès, un gynécologue à 10 ans de prison ainsi que son équipe pour complicité. La plus lourde peine prononcée jusqu'ici au Maroc, dans ce domaine. Pour parler de justice, il s'en remet aux textes religieux. «Qui s'en prend à une âme, s'en prend à l'humanité toute entière», rappelle-t-il. Le tabou Aujourd'hui encore, au Maroc, parler de sexualité hors-mariage est tabou. Par manque d'information, beaucoup ne connaissent pas les moyens de contraception et sont abandonnées lorsqu'elles tombent enceintes. Ne pouvant garder l'enfant, de peur de déshonorer la famille et être répudiée, elles abandonnent leurs enfants. En 2013, il y a eu, officiellement, 5 000 naissances sous X au Maroc. Un constat alarmant. Le reportage d'Envoyé Spécial