Le HCR a repris en décembre l'instruction des dossiers des nouveaux demandeurs d'asile au Maroc, mais il n'est pas suivi par les autorités marocaines. Aucun migrant n'a été reconnu réfugié officiellement par le Maroc depuis des mois. Les procédures sont gelées. 4000 personnes, dont 1000 Syriens, sont en attente. Le Maroc n'a plus reconnu de nouveaux réfugiés sur son sol depuis novembre 2013. 3000 demandes d'asiles sont en attente auprès du HCR tandis que 1000 Syriens sont en principe reconnus réfugiés par le HCR sans disposer d'aucune reconnaissance officielle. «Nous voulons éviter que se créent deux statuts de réfugiés en parallèle : d'une part les réfugiés reconnus par le Maroc [509 personnes reconnues par une commission marocaine ad hoc le 13 novembre 2013] disposant d'une carte de réfugié marocaine et d'autre part les réfugiés reconnus seulement par le HCR», explique Machtelt De Vriese, directrice du département protection au HCR Maroc. Le HCR a repris l'enregistrement des nouvelles demandes d'asile en décembre 2013 faute d'avoir pu passer la main entièrement au Maroc. Il instruit les dossiers et recommande au Maroc les personnes qui correspondent selon lui aux critères du statut de réfugié. Cependant, après avoir validé le statut de 509 personnes en novembre dernier, la commission marocaine ad hoc qui devrait prendre le relai ne se réunit plus «dans l'attente de nouvelles instructions du gouvernement», précise Machtelt De Vriese. «Le Maroc est une grande salle d'attente» La loi sur l'asile, dans le cadre des trois nouvelles lois en gestation suite au discours royal pour une nouvelle politique migratoire au Maroc, n'est toujours pas connue. «Le Maroc est une grande salle d'attente», regrette Reda Oulamine, avocat et président de l'association Droit et Justice. Dans l'espoir d'être entendue par le gouvernement, l'association a exprimé publiquement, jeudi 12 juin, 8 recommandations pour corriger le fonctionnement de l'asile au Maroc. «Les procédures à réaliser pour faire des demandes d'asile se déroulent toutes à Rabat. Pour les migrants qui se trouvent dans le nord, du côté de Nador, c'est très problématique. Nous avons sensibilisé certains d'entre eux à leur droit de demander l'asile et je me souviens que beaucoup ont exprimé clairement des craintes en cas de retour dans leur pays, mais un déplacement à Rabat pour déposer une demande d'asile leur pose de vraies difficultés», raconte Maud Depresle, Coordinatrice du programme d'aide juridique pour les réfugiés au Maroc de l'association Droit et justice Création d'un parcours d'obstacles ? «C'est une question que nous nous sommes posés. Par le passé, nous avions même demandé à disposer d'une antenne à la frontière maroco-algérienne, au nord, mais nous n'avions pas eu l'autorisation. Nous avons résolu le problème en nous associant à l'OMDH afin que l'association informe et dirige les migrants vers Rabat», a répondu le HCR. L'association Droit et justice recommande plutôt l'instauration d'un système d'enregistrement délocalisé dans les préfectures et wilayas. Mais cette proposition ne remporte pas l'adhésion de tous. «Il ne faudrait pas pour renforcer l'accès à l'asile des migrants ajouter des obstacles à leur parcours. En France, quand on a commencé à demander aux demandeurs d'asile de s'enregistrer en préfectures, comme proposé, cela a été le début de la création d'un parcours d'obstacles, de formes de présélections des candidats pour les éloigner au contraire de l'asile», s'inquiète Stéphane Julinet, chargé du plaidoyer au Gadem. 7 demandeurs d'asile suivis dans leurs démarches L'association Droit et Justice demande également de remplacer les récits de vie demandé aux demandeurs d'asile par le HCR par un questionnaire plus précis pour les guider. «Aujourd'hui, nous suivons 7 demandeurs d'asile dans leur démarche, sans cela il leur serait difficile de poursuivre seuls leur demande d'asile», explique Soukaina Amanzoul, avocate et membre de l'association Droit et justice. «Nous les avons aidés à rédiger un récit de vie, un argumentaire détaillé et à préparer l'entretien avec le HCR pour motiver leur demande», poursuit-elle. L'association a également formé 100 avocats, juristes et universitaire et 72 membres d'association au droit d'asile. L'association recommande également un dispositif d'accès au territoire marocain dans les ports et les aéroports pour les demandeurs d'asile qui se déclarent comme tel en arrivant à la frontière, même s'ils n'ont pas de visa d'entrée. «Instaurer la possibilité de demander l'asile à la frontière, c'est ouvrir la porte aux pratiques bien connues en Europe d'abord illégale puis légaliser a posteriori des centres de rétention aux ports et aéroports», regrette de son côté Stéphane Julinet. En attendant la publication du véritable avant-projet de loi, lequel est «dans le circuit législatif», indique un membre du ministère des MRE et des Affaires de la migration, le HCR souhaite que les autorités marocaines parent au plus pressé. «Nous savons que la période de transition sera longue et nous souhaitons que le Maroc reconnaisse globalement tous les nouveaux arrivant Syriens comme des réfugiés, puis reprennent la validation des recommandations que nous leurs faisons pour reconnaître de nouveaux réfugiés», explique Machtelt De Vriese du HCR.