Malgré le temps qui passe, la discrimination à l'embauche pour les citoyens d'origine maghrébine en France reste d'actualité. Une étude de l'Insee fraichement publiée présente un état des lieux, peu encourageant. L'ampleur de la discrimination serait tel que même la compétence du candidat d'origine maghrébine ne saurait pas toujours jouer en sa faveur en face d'un Français de souche moins qualifié. Mieux vaut ne pas s'appeler Ziraoui, Ben Saada ou encore Khadra quand on cherche un emploi en France. C'est en tout cas ce qui ressort de l'étude de l'Insee sur la discrimination à l'embauche des jeunes en Ile de France, publiée ce jeudi 10 avril. L'étude a été réalisée sous forme de testing, afin de mesurer l'ampleur de la discrimination envers les candidats d'origine magrébine. Ainsi, de fin juillet 2010 à fin août 2010, 441 candidatures ont ainsi été envoyées à 147 entreprises qui proposaient sur le site Pôle Emploi, un CDI, un CDD ou un contrat d'intérim de «technicien de maintenance». Ce métier a été retenu car 3,29% des employés de ce secteur sont d'origine maghrébine. Ces candidatures concernaient trois profils ayant pour seules différences l'origine et le niveau d'étude. Il s'agit de trois jeunes hommes célibataires, sans enfant et âgés de 28 ans. Ils habitent la Seine-Saint-Denis et détiennent le permis B. Cependant, le premier candidat fictif, Zahid Messai, est titulaire d'un BTS électrotechnique et d'un Bac Pro électrotechnique. Les deux autres, Nessim Belahdeb et Sylvain Bernard n'ont que le Bac Pro électronique. Mais selon le rapport, les résultats sont sans appel. Ils «mettent en évidence des pratiques discriminatoires envers les candidats maghrébins», indique l'étude. «L'origine ethnique des candidats est signalée sur la candidature par le prénom et le nom à forte consonance hexagonale ancienne, maghrébine ou noire africaine», explique le rapport. La compétence peut être un atout, mais ne garantit rien L'étude relève que la discrimination sur l'origine peut être parfois moindre si le candidat d'origine maghrébine est plus qualifié ou diplômé. Il a alors «plus de chances d'accéder à un entretien d'embauche que l'autre candidat d'origine maghrébine, mais moins que le candidat d'origine française», note le document de l'Insee. Dans le cas de figure retenu, Sylvain Bernard a obtenu 35 réponses positives qui sont soient des invitations à des entretiens ou une demande d'informations complémentaire. Nessim Belahdeb, ayant le même niveau de diplôme, n'a reçu que 21 réponses positives. Tandis que Zahid Messai, le plus diplômé de tous, en a reçu 28. «On constate donc que la qualification BTS apporte bien un plus au candidat maghrébin par rapport à l'autre candidat maghrébin de niveau Bac. Mais, le candidat français n'a besoin que de son appartenance pour combler son manque de qualification par rapport au candidat maghrébin de niveau BTS», indique l'étude. D'après son auteur, la chercheure Emilia Ene Jones, la discrimination est encore plus flagrante lorsque plusieurs candidats sont appelés pour un même entretien. «C'est en grande majorité le candidat d'origine française qui est appelé en premier». Voici donc la énième étude qui témoigne encore de la discrimination à l'embauche dont sont victimes les demandeurs d'emploi d'origine maghrébine dans l'Hexagone. Et sur le terrain, les exemples pratiques ne manquent pas. Quelques fois, la justice fait son travail comme ce fût le cas en 2012. Le constructeur aéronautique Airbus avait été condamné à verser 18 000 euros d'indemnités pour discrimination à l'embauche, en raison de l'origine algérienne d'un demandeur d'emploi. Mais combien de cas restent impunis ?