Le ministère des MRE cherche actuellement des consultants pour définir sa stratégie de réinsertion des MRE qui reviennent au pays à cause des conditions de vie difficiles en Europe, avec la crise. Le Maroc aidera ainsi bientôt l'Union européenne à renvoyer chez eux des immigrés un peu trop pauvres. Le Maroc se transforme, toujours un peu plus, en fer de lance de la politique migratoire européenne. Depuis le 28 février, le ministère des MRE recherche des consultants pour définir sa «stratégie de réinsertion des migrants de retour». Ceux qui correspondent aux critères définis par le ministère, sur son site, ont jusqu'au 15 mars, pour envoyer leurs propositions. Le Maroc veut réintégrer les MRE mais pas n'importe lesquels : ceux qui vivent des temps difficiles. Cette décision a toutes les raisons de plaire à l'Union européenne, trop heureuse de se débarrasser de quelques pauvres, en pleine crise économique. Cette politique est nouvelle, au Maroc, qui «a toujours plus fondé sa stratégie politique sur les transferts financiers et les transferts de compétences, avec les échanges universitaires», explique Thomas Lacroix, chargé de recherche au CNRS, pour le laboratoire Migrinter, spécialiste des migrations internationales. «Beaucoup d'autres pays, comme le Mexique, qui ont une forte proportion de diplômés qui sont partis, ont entrepris une politique d'aide au retour des migrants qualifiés», précise-t-il. Au contraire, le Maroc s'intéresse, pour sa nouvelle stratégie, aux Marocains qui sont en situation économique difficile à l'étranger. Le Maroc prend le relai «Ce n'est pas la première fois que le ministère s'intéresse à ce sujet», tempère, Fatima Tigratine, chargée de la cellule pour l'appui et l'accompagnement des investissements MRE, à la Direction des immigrés du ministère des MRE. «Jusqu'ici, il n'y avait pas de stratégie globale, mais il existait des programmes avec l'OIM [Organisation Internationale pour les Migrations, ndlr], le PNUD [Programme des Nations Unies pour le Développement], AFD [Agence Française de Développement], l'OFII [Office Français de l'Immigration et de l'Intégration]», explique-t-elle. En somme, jusqu'à présent, l'externalisation de la politique migratoire européenne, concernant l'aide au retour volontaire des migrants en difficultés économiques dans leur pays d'accueil, était réalisée par des organisations étrangères ou internationales, à présent, le ministère des MRE veut se charger de la coordonner. Financé par la Coopération belge Dans l'actuelle recherche de consultants par le ministère des MRE, la présence de ces organisations extérieures est encore bien réelle. L'OIM Rabat analysera, notamment avec le ministère, les candidatures des consultants qui répondront à l'appel public. Clothilde Caillault, chargée de mission à Dom'Asile, explique, dans un article, que «sur le terrain, dans un pays comme le Maroc, l'OIM se comporte comme un prestataire de services, dédié en priorité à ses contributeurs financiers, plutôt que comme une organisation poursuivant sa propre stratégie.» Dans le cas de la mission de consulting publié le 28 février, justement, ce n'est pas le ministère des MRE, mais la Coopération belge qui apporte le financement : 300 000DH. Selon Thomas Lacroix, «la gouvernance des migrations concertée de façon internationale est pratiquement impossible parce que les pays du Sud veulent une émigration qualifiée de courte durée et une émigration peu qualifiée de longue durée, alors que les pays du Nord préfèrent tout le contraire : une immigration qualifiée de long terme et une immigration peu qualifié de court terme.» S'établit alors un rapport de force et, à ce jeu là, l'Union européenne gagne. Projet utile Si cette nouvelle stratégie d'aide à la réinsertion des MRE est clairement initiée en réponse aux désirs des pays du nord de la Méditerranée, elle correspond, également, sur place, au Maroc, à une réalité concrète. « Après la crise de 2009, il n'y a pas eu un mouvement de retour massif, mais un bon nombre d'entre eux veut revenir et essayer de se réintégrer», explique Fatima Tigratine. Depuis 3 ans, le phénomène est net, selon Bérangère El Anbassi, conseillère élue de l'Assemblée des Français à l'étranger, «beaucoup avaient une situation difficile en France : des familles au chômage qui ne vivaient que du RSA ou des allocations familiales», explique-t-elle. Autant de personnes qui apprécieront de bénéficier d'une aide à la réinsertion qu'elle qu'en soit l'origine.