Pour réussir le forum d'Oran, boudé par les grands pays africains, l'Algérie a convié des pays reconnaissant la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Pour se faire, Alger a dû faire l'impasse -momentanément- sur son appui au Polisario lors des discours du président Tebboune et du ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf. L'Algérie a organisé, les 1er et 2 décembre, une nouvelle édition du forum d'Oran, traditionnellement destiné à encourager les pays africains membres du Conseil de sécurité à défendre les positions du Polisario. Cette année, la diplomatie algérienne a voulu élargir la participation en s'ouvrant aux pays africains ayant reconnu officiellement la marocanité du Sahara. Ainsi, la Somalie, qui rejoindra les Quinze dès le 1er janvier 2025, le Libéria et Djibouti ont été conviés au «processus d'Oran», désormais nouvelle appellation du forum. Pour rappel, Djibouti compte, depuis le 26 février 2020, une représentation diplomatique à Dakhla. Le Libéria a ouvert, le 12 mars 2020, sa chancellerie dans la même ville, tandis que la Somalie a décidé, le 24 septembre 2022, d'emboîter le pas à son voisin de la Corne d'Afrique. En marge du «processus d'Oran», le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a eu des entretiens avec les représentants des trois pays africains. L'Algérie a procédé par calcul politique La présence d'Etats réputés proches du Maroc a amené l'Algérie à laisser de côté -du moins provisoirement- son traditionnel discours en faveur du Polisario pour adopter une approche qui se veut «fédératrice». Le message adressé aux participants, lors de la séance d'ouverture, par le président Abdelmadjid Tebboune, dont la lecture a été donnée par Ahmed Attaf, en est le parfait exemple. Le chef d'Etat a plaidé pour une «Afrique unie et déterminée plus que jamais à jouer un rôle essentiel dans les affaires mondiales. L'Afrique ne peut plus accepter d'être reléguée au second plan dans les priorités internationales». Un passage qui coïncide avec le débat au niveau de l'Assemblée générale de l'ONU sur l'impératif d'un élargissement du tour de table du club des membres permanents du Conseil de sécurité à l'Afrique, l'Asie et l'Amérique du Sud. L'Algérie tente d'arracher un des deux sièges qui pourraient revenir à l'Afrique, laissant l'autre à son allié sud-africain. Le Maroc est également concerné par cette course, même s'il n'a pas encore officiellement fait part de son projet de rejoindre les Cinq de l'instance exécutive des Nations unies. Sans surprise, Ahmed Attaf a suivi la même ligne tracée par son supérieur hiérarchique. Dans son discours, prononcé lors de la séance de clôture du forum d'Oran, il a fait l'impasse sur la question du Sahara occidental, préférant se focaliser sur la Palestine et pointer du doigt «le deux poids deux mesures» de la France, sans la citer nommément, au sujet du mandat d'arrêt international lancé par la Cour pénale internationale à l'encontre du Premier ministre israélien. Si le voisin de l'Est a mis de côté son appui au Polisario pour «réussir» le forum d'Oran, boudé par de nombreux ministres africains des Affaires étrangères, comme ceux du Kenya, de l'Egypte, du Nigéria et du Rwanda, il aura néanmoins l'occasion de brandir à nouveau la carte de «l'autodétermination du peuple sahraoui», lors de la visite, les 5 et 6 décembre en Algérie, du président sud-africain, Cyril Ramaphosa.