Alors que le Comité olympique international (CIO) n'interdit pas le port de couvre-chef lors des compétitions, la France a décidé que ses athlètes ne porteront pas le voile, pour motif de laïcité. Pas moins de huit organisations de sport et de défense de droits humains sont vent debout contre cette mesure, qui ne s'applique d'ailleurs pas aux sportives des autres pays participants. Se dressant contre une mesure contraire jugée aux dispositions du Comité olympique international (CIO), des organisations de défense des droits humains ont récemment interpellé le président de l'instance, concernant l'interdiction du port du voile pour les athlètes françaises. Parmi eux, Human Rights Watch (HRW) a appelé Thomas Bach à intervenir pour que le pays hôte des prochains JO (du 26 juillet au 11 août 2024) lève cette disposition considérée comme discriminatoire. Dans ce sens, le responsable a été exhorté à prendre «publiquement» position pour que les autorités concernées annulent «toutes les interdictions faites aux athlètes de porter un couvre-chef sportif dans le sport français, dans le cadre des Jeux de Paris 2024 mais également dans tout autre contexte et à tout niveau de pratique sportive». Dans cette lettre signée avec sept autres organisations, HRW souligne que «l'interdiction du port d'un couvre-chef dans la pratique sportive a eu des répercussions pour de nombreuses athlètes de confession musulmane, qui ont été discriminées, invisibilisées, exclues et humiliées». «Certaines ont quitté le pays ou ont envisagé de le faire afin de trouver des opportunités de pratiquer leur sport ailleurs», ajoute la missive, tout en soulignant la dimension d'exclusion sociale que revêt cette démarche. Portant le sceau de Basket Pour Toutes, Athlete Ally, La Sport & Rights Alliance, Amnesty International, le Comité pour la protection des journalistes, Human Rights Watch, Transparency International Allemagne et World Players Association, la missive rappelle qu'en septembre 2023, le CIO «a déclaré publiquement que les restrictions imposées aux athlètes françaises de confession musulmane lors des Jeux olympiques et paralympiques de Paris annoncées par la ministre des Sports française en septembre 2023 ne s'appliqueront pas aux athlètes représentant d'autres nations dans le village olympique». France : Le rapporteur public favorable à l'autorisation du voile dans le football Mais pour les signataires, «cette position est insuffisante car elle ne remet pas en cause l'interdiction discriminatoire» et «ne remédie pas à cette pratique» préjudiciable. Certaines fédérations sportives sont moins rigides sur le port de couvre-chef De plus, cette interdiction s'applique à géométrie variable, puisque des clubs sportifs privés restent libres de s'aligner dessus ou non. Ainsi, les instances de rugby, de tennis ou de handball en France autorisent le port du couvre-chef sportif, sous certaines conditions. Pour leur part, les fédérations de football et de basket appliquent des dispositions strictes. Dans ce sens, la lettre insiste sur le caractère «préoccupant» du refus essuyé par «Basket Pour Toutes, d'autres femmes musulmanes et leurs soutiens», qui «se voient refuser toute possibilité d'être entendues par la Fédération française de basketball (FFBB) et d'autres instances sportives en ce qui concerne les répercussions de ces interdictions». Ainsi, les signataires préconisent un dialogue entre «les autorités sportives nationales et internationales» avec «les personnes concernées». Il s'agit en effet de garantir que les politiques décidées «n'aient pas pour effet d'exclure des groupes de femmes et de filles de la pratique sportive, qu'elles soient exemptes de toute forme de racisme et de discrimination fondée sur le genre et qu'elles respectent la liberté de religion ou de conviction et le droit de participer à la vie culturelle», souligne l'écrit. France : Les collants et cuissards des footballeurs anti-laïc selon la FFF Dans le même sens aussi, la lettre rappelle que la Charte olympique est fondée sur «le rejet de toute forme de discrimination, quelle qu'en soit la raison, notamment en raison de la race, la couleur, le sexe, l'orientation sexuelle, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation». Ce n'est pas pour la première fois que la question crée un tollé en France. Dans une correspondance datée de février dernier mais qui a fait surface en mai, la Fédération de football a insisté non seulement sur l'interdiction du couvre-chef, mais aussi des collants et cuissards, sous couvert de neutralité. Ce tour de vis a été décidé sous le motif que ces habits seraient détournés de leur utilisation conditionnée par un avis médical, pour devenir des «signes ostensibles, visibles d'appartenance» religieuse, notamment musulmane. Au niveau mondial, la Fédération internationale de football association (FIFA) définit quelques exigences vestimentaires. Les dispositions prévues dans la loi 4 des Lois du jeu laissent cependant la liberté de porter un couvre-chef ou des vêtements sous le maillot et le short, notamment si la cohérence des couleurs est respectée.