Islamistes et formations de gauche ont exprimé leur rejet de la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara par Israël. Ils ont déploré auprès de Yabiladi la démarche d'une «entité criminelle» qui ne servira pas la cause nationale. Depuis que la normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël est officielle, le 10 décembre 2020, la coopération bilatérale évolue à un rythme accéléré, particulièrement dans le domaine militaire. Depuis le 17 juillet 2023, Tel-Aviv a franchi le pas en reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara, ce qui ferait présager un relèvement du bureau de liaison de chacun des deux pays au rang d'ambassade. Au Maroc, les partis de la majorité gouvernementale n'ont pas tardé à saluer cette reconnaissance. Ils l'ont considérée comme une pierre angulaire pour soutenir l'intégrité territoriale du Maroc et sa souveraineté sur son Sahara. Mais les formations islamistes et certaines de gauche ont exprimé leur rejet de tout rapprochement avec Israël, appelant à l'arrêt du processus de normalisation. Les partisans de cet avis soulignent que la reconnaissance israélienne ne changera pas la réalité du conflit et que ses dommages l'emportent sur ses avantages. Les islamistes rejettent «la reconnaisse d'une entité criminelle» Dans une déclaration à Yabiladi, Hassan Bennajah, membre du Secrétariat général du département politique de l'association Justice et bienfaisance (Al Adl Wal Ihsane), a condamné cette décision ainsi que «la normalisation sous toutes ses formes». «Ce qui s'est passé est une atteinte à la souveraineté marocaine et une atteinte à la volonté populaire», a-t-il affirmé. Selon lui, «la souveraineté du Maroc sur son Sahara n'attend pas une validation ni la reconnaissance ni validation d'une entité criminelle, fantoche et illégitime. Un pays comme le Maroc, avec sa riche histoire, ne peut pas rechercher la légitimité auprès de cette entité criminelle et bâtarde». L'associatif estime que «le peuple marocain est historiquement connu pour son rejet de la normalisation et son soutien à la Palestine dans son ensemble. Ce qui se passe maintenant, ce sont des décisions unilatérales, isolées et imposées à la volonté populaire... Cette décision nuit au cœur du Maroc et à ses intérêts. L'entité sioniste en est la seule bénéficiaire». Membre du secrétariat général du Parti de la justice et du développement (PJD) contacté par nos soins, Abdellah Bouano a refusé de commenter le sujet. Membre du Conseil national du PJD, Abdelaziz Aftati a rappelé qu'en 1973, «le Maroc avait participé à repousser l'agression des sionistes, malgré les tentatives de scission de notre intégrité, par une junte à la direction de l'Algérie voisine en connivence avec ce qui reste des franquistes en Espagne». Ramadan dans l'Histoire #27 : Les soldats du Maroc abandonnés par al-Assad face à Israël «Comment accepter aujourd'hui de faire exactement le contraire et conclure des ententes avec une entité criminelle, coloniale et agressive qui cible la Palestine et la nation tout entière ?» a-t-il ajouté. Dans ce sens, il a déploré un recul à travers la recherche du «soutien des criminels les plus notoires de l'histoire de l'humanité, pour notre victoire sur la question du Sahara». Il regrette aussi les positions favorable à la reconnaissance israélienne «de la part de certaines personnes de la région du Sahara et de certains partis». «Vous ne pouvez pas demander à un agresseur raciste de vous soutenir dans une cause légitime», a insisté Aftati. Pour lui, la position naturelle est «de participer aux combats avec les Palestiniens, mais pas uniquement se montrer solidaires avec eux... Il est normal que nous y participions avec eux comme nous l'avons fait en 1973... Nous ne pouvons pas devenir les alliés d'un crime», a-t-il tranché. «Quiconque veut reconnaître la marocanité du Sahara fait une démarche positive, sauf les sionistes», a conclu Aftati. Des formations de gauche rejettent le soutien israélien Pour sa part, le secrétaire général du parti de la Fédération de gauche, Abdeslam Laâziz, a déclaré auprès de notre rédaction que «la normalisation est rejetée» au sein de sa formation, «comme c'est le cas pour de larges segments du peuple marocain». «La normalisation ne peut servir ni notre cause nationale, ni la Palestine», a-t-il affirmé. Et de rappeler que le gouvernement israélien est «un exécutif d'extrême droite, alors que la Maroc a toujours été du côté de la cause palestinienne». Pour lui, le problème est dans le conflit du Sahara avec «le voisin de l'Est, les frères en Algérie». «Nous sommes voisins de ceux qui contrôlent la décision politique en Algérie, qui refusent de trouver une solution à ce problème qui a longtemps duré». Laâziz estime que «nous devons défendre notre cause comme nous l'avons toujours fait, et nous devons unir et renforcer le front à l'intérieur du pays, pour que la société soit en mesure de jouer son rôle...». «Je ne pense pas que la reconnaissance [israélienne] apportera quoi que ce soit pour la cause nationale», a-t-il souligné. Omar El Hayani, dirigeant au sein du Parti de la fédération de gauche, a abondé dans le même sens. «Nous n'avons pas besoin de la reconnaissance par Israël de notre souveraineté sur le Sahara, que c'est un Etat raciste qui pratique le terrorisme contre le peuple palestinien, avec un bilan noir dans le domaine des droits humains à son actif», a-t-il déclaré à Yabiladi. «Cela ne nous honore pas», a-t-il conclu.