Rome a procédé récemment à la mise en service d'un centre consulaire à Tindouf, mis notamment à la disposition des «réfugiés sahraouis», selon l'ambassadeur d'Italie en Algérie. L'agence de presse algérienne s'est empressée d'en faire les choux gras, en dépeignant l'initiative comme un geste de «solidarité» envers «la cause sahraouie». Quatre mois après la visite de la présidente du Conseil des ministres italien Giorgia Meloni en Algérie, l'ambassade d'Italie à Alger a annoncé l'ouverture d'un centre consulaire à Tindouf, en partenariat avec VFS-Global. L'ambassadeur Giovanni Pugliese a inauguré la nouvelle structure, lors d'une cérémonie officielle marquée par la présence «des autorités algériennes et de la communauté sahraouie», a indiqué la représentation diplomatique. L'agence de presse officielle algérienne (APS) s'est empressée de citer l'ambassadeur d'Italie, en qualifiant l'initiative d'«unique» et de «première en Algérie», pour «améliorer l'offre des services consulaires italiens, même dans les régions les plus reculées du pays à Tindouf». Amb Pugliese inaugura il nuovo centro servizi consolari ?? di Tindouf alle presenza delle autorità ?? e della comunità saharawi realizzato in cooperazione con la Società @VFSGlobal pic.twitter.com/2McS2TK02v — Italy in Algeria (@ItalyinAlgeria) May 16, 2023 «Le centre n'est pas seulement destiné à la population algérienne locale et aux acteurs mauritaniens du monde des affaires sur place. Il est ouvert aussi aux réfugiés sahraouis», a indiqué l'ambassadeur. Ce dernier est cité par l'APS en déclarant aussi que l'initiative traduisait une forme de «solidarité de la part de l'Italie avec la cause sahraouie et les conditions des réfugiés dans les camps». Peu après sa percée aux élections législatives d'Italie, le 25 septembre 2022, puis sa nomination à la tête du gouvernement le 22 octobre de la même année, Georgia Meloni s'est rendue en Algérie, en janvier dernier. Elle a été reçue par le chef d'Etat Abdelmadjid Tebboune, qui s'est alors félicité de «la position positive et équilibrée de l'Italie appelant à une solution juste à cette question, conformément aux résolutions des Nations unies, afin de permettre au peuple sahraoui de jouir de ses droits légitimes». «Il a été convenu de soutenir l'envoyé de l'ONU De Mistura et la mission internationale pour le référendum au Sahara occidental», a ajouté le président algérien. Après le changement de position de l'Espagne sur la question du Sahara et le rétablissement des relations diplomatiques entre Rabat et Madrid, l'Algérie est repartie en quête de nouveaux soutiens régionaux, en faisant les yeux doux cette fois-ci à l'Italie. Alger a d'ailleurs intensifié les visites de ses responsables à Rome, tout en concluant plusieurs accords, surtout dans le domaine du gaz naturel, objet d'une forte demande mondiale dans le contexte de la guerre entre la Russie et l'Ukraine. Un changement de position au gré des déclarations des responsables L'Italie devient ainsi le premier pays à ouvrir un centre consulaire dans la ville de Tindouf, dans la même région où se trouvent les camps du Front Polisario en terre algérienne. Des médias espagnols ont cité Ammar Belani, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères en Algérie, soutenant que l'Italie «est un pays ami qui a toujours été présent dans les circonstances les plus difficiles». «C'est avant tout un pays qui adhère constamment aux principes des questions régionales d'intérêt commun, contrairement à ce que nous venons de voir de la part d'autres partenaires», a-t-il ajouté, en allusion au rapprochement entre l'Espagne et le Maroc. Le Maroc a longtemps appréhendé l'accession de Giorgia Meloni au pouvoir exécutif, en tant que leader du parti d'extrême droite Fratelli d'Italia, d'obédience fasciste et historiquement connu pour ses positions pro-Polisario. Des années avant son élection, Meloni a d'ailleurs visité les camps de Tindouf. Dans un livre publié en mai 2021, elle n'a pas tari d'éloges envers le mouvement séparatiste, en appelant même à un référendum d'autodétermination. Pour sa part, le gouvernement italien a précédemment cherché à rassurer le Maroc sur sa position officielle concernant le Sahara, quelques jours après l'élection de Giorgia Meloni. La même année et dans un entretien téléphonique avec son homologue marocain Nasser Bourita, le ministre italien des Affaires étrangères et de la coopération, Antonio Tajani, a loué le «rôle de pivot que joue le Maroc dans la stabilisation de la région méditerranéenne, notamment dans le domaine de la lutte antiterroriste». Il est à noter que le président italien Sergio Mattarella a plutôt déclaré, lors sa visite officielle en Algérie, en novembre 2021, que le règlement du différend régional devait se faire «en considération des droits du peuple sahraoui». Par ailleurs, le chef d'Etat a salué «le rôle de l'Algérie et son attachement au cadre onusien pour le Sahara occidental». Cette déclaration a provoqué l'ire du Maroc, qui a exigé des éclaircissements de la part de Rome. Deux jours plus tard, dans une déclaration conjointe à l'issue des entretiens entre Nasser Bourita et de l'ancien ministre italien des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, Rome a salué «les efforts sérieux et crédibles déployés par le Maroc dans le cadre onusien» et a dit encourager «toutes les parties à poursuivre leur implication, dans un esprit de consensus afin de résoudre la question du Sahara». A peine nommé à la tête de la diplomatie italienne, Di Maio avait réservé sa première visite extérieure officielle au Maroc.