Après que le conseil de gouvernement a adopté, jeudi 13 avril, le projet de loi 15.23 portant création d'une commission temporaire de gestion du Conseil national de la presse, trois partis de l'opposition sont sortis de leurs gonds. Le secrétaire général du Parti du progrès et du socialisme (PPS), Mohamed Nabil Benabdellah, a critiqué hier l'approbation par le gouvernement du projet de loi 15.23 portant création d'une commission temporaire de gestion du secteur de la presse et de l'édition. Soutenu par le ministère de Jeunesse, de la culture et de la communication, le texte est voulu comme un cadre normatif de ladite commission, après que la prorogation du Conseil national de la presse (CNP) pour six mois «n'a pas permis la tenue d'élections professionnelles». Ancien ministre de la Communication lorsque le CNP était en phase de projet, Benabdellah a qualifié la démarche de l'exécutif de «véritable catastrophe». «Après avoir entrepris la prorogation exceptionnelle du mandat du CNP pour une durée de six mois, par décret-loi, voilà que le gouvernement s'empresse sur la nécessité d'organiser des élections et déclare l'état d'exception de long-terme, dans un sens difficilement compréhensible en dehors d'une volonté de certains milieux médiatiques», a fustigé le secrétaire général du PPS, qui alerte sur «une mesure dangereuse impliquant un favoritisme flagrant». «La sagesse dans la mise en place du CNP s'incarne dans le souci de l'éthique de la profession et établir les règles de son autorégulation et de son indépendance, ce secteur étant vital pour l'espace démocratique. Aujourd'hui, le gouvernement fait une déviation sans précédent du CNP de ses nobles objectifs et de ses missions initiales», a par ailleurs souligné Benabdellah. «Le gouvernement doit revenir sur cette démarche de mauvais augure, qui nuit à la voie du progrès que notre pays a empruntée dans le domaine des médias en particulier, et dans la construction démocratique en général», a plaidé le secrétaire général du PPS. Et d'ajouter qu'au lieu de ce projet de loi, l'exécutif «doit respecter les fondements juridiques constitutifs du CNP et accélérer la mise en place des conditions de régulation de la profession pour des élections libres, dans le respect des règles démocratiques et d'intégrité, de transparence et de concurrence loyale, préservant le droit des journalistes de choisir leurs représentants». Le ministre de la Culture déclenche une bronca au sein de la presse marocaine Un «arbre qui cache la forêt», selon le PSU L'annonce de l'approbation du projet de loi, jeudi en conseil de gouvernement, a provoqué l'ire d'autres formations politiques, dont le Parti socialiste unifié (PSU). Ce dernier constate, dans un communiqué, «une tendance à détourner l'attention des questions médiatiques prioritaires vers des celles d'ordre technique et administratif, servant d'arbre qui cache la forêt», au lieu d'«investir dans le débat national sur les obstacles structurels que connaissent les médias au Maroc, afin de sortir avec des mesures stratégiques à la hauteur des défis auxquels le pays est confronté dans ce domaine». Selon le PSU, «la nécessité, aujourd'hui, est de proposer la révision des lois sur les médias, dont le Code de la presse et de l'édition, les lois relatives à la communication audiovisuelle, celle de la HACA, avec des mécanismes à durée déterminée et des tâches clairement déclarées, notamment dans la gestion du CNP, de façon à garantir la pluralité». Le parti insiste, par ailleurs, sur l'impartialité requise de ceux qui supervisent le processus des élections professionnelles, pour un scrutin «démocratique, équitable et transparent». Pour sa part, le Parti de la justice et du développement (PJD) a qualifié la démarche du gouvernement d'«échec dans la mise en place entière des mécanismes d'autorégulation du secteur de la presse à travers le CNP» et «une incapacité à faire que le CNP puisse tenir des élections professionnelles». «La création d'une commission temporaire déclare ouvertement une période d'exception dans le secteur et nuit à l'image du Maroc ainsi qu'à ses progrès en termes de liberté de la presse», fustige le parti islamiste, dans un communiqué signé pas son secrétaire général, Abdelilah Benkirane. Par ailleurs, la formation souligne que les prérogatives accordées à la nouvelle instance «outrepassent celles prévues constitutionnellement pour l'autorégulation du corps de métier» et que la loi 15.23 «met en place un cadre sur mesure». Dans ce sens, le parti a également appelé le gouvernement à revenir sur sa décision et à se tenir «à la loi actuelle» portant création du CNP «et prévoyant que la commission en charge de la tenue des élections soit supervisée par un juge». Plusieurs organisations professionnelles ont fustigé aussi la démarche du gouvernement. Celle-ci a été vivement critiquée par la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ), la Fédération nationale des médias, de la presse et de la communication affiliée à l'Union marocaine du travail (UMT), ou encore le Club de la presse au Maroc.