De l'entreposage du mouton à sa consommation, l'Aïd El Adha pose une série de problématiques urbaines liée à la gestion des déchets que sa pratique occasionne. Zoom. Si pour l'immense majorité des marocains, l'Aïd El Adha rime avec ripailles et retrouvailles, il en est, certains, pour qui cette fête rime avant tout avec travail : travail passé à ramasser la paille et les victuailles. Cette minorité d'infortunés, ce sont les travailleurs des sociétés de gestion de déchets des villes marocaines qui la constituent. Ceux-ci ont dû – et vont devoir – encore une fois cette année, redoubler d'efforts pendant les jours qui entourent la fête. «Pendant l'Aïd, 4 à 5 millions de têtes sont en moyenne abattues au Maroc, et parmi celles-ci, 3 à 3,5 millions en milieu urbain. Imaginez-donc un peu ce que cela représente comme pression environnementale et comme problématique en termes de gestion de déchets urbains» souligne Hassan Chouata, président de l'Association marocaine des experts en gestion des déchets de l'environnement (AMEDE). Il faut dire qu'avec l'urbanisation exponentielle qu'a connue la population marocaine au cours des 20 dernières années, la fête du mouton a fini par transformer nos villes en immenses boucheries à ciel ouvert, posant ainsi la problématique de l'assainissement des déchets liés à l'abattage des bêtes. L'abattage n'est toutefois pas l'unique problème. M. Chouata distingue trois moments «critiques» durant lesquels foison de déchets urbains sont occasionnés au cours de l'Aïd. La période précédant l'Aïd «C'est une phase critique durant laquelle les troupeaux sont exposés, puis les bêtes, emmenés à la maison. Les déjections des animaux, ainsi que la paille dans les stands où les cheptels sont exposés, occasionnent beaucoup de saletés dans nos villes» indique-t-il. Et de rajouter :«A cela, il faut également ajouter la vente informelle de moutons, notamment dans les garages, qui engendrent également beaucoup de saleté et qui incommodent les habitants en raison des mauvaises odeurs dégagées.» Le jour de l'Aïd «Le jour de l'aïd, il faut distinguer deux types de déchets produits : les déchets liquides et les déchets solides. Les déchets liquides concernent tout ce qui concerne le lavage du sang, des intestins, boyaux, etc., de la bête. La plupart du temps, ces déchets sont évacués dans les réseaux d'assainissement des villes, ce qui occasionne des obstructions de la tuyauterie et parfois-même, dans certains quartiers, des débordements des eaux usés. Ensuite, il y a les déchets solides comme la carcasse, la peau des bêtes, les boyaux, etc. Eux, sont entassés dans les bacs (ndlr. grosses poubelles) qui finissent, faute de récupération par les sociétés d'assainissement, par déborder.» A ces déchets, il faut également ajouter les feux dans des fosses improvisées, à même la rue, dans lesquels les pratiquants font cuire les têtes et pieds de mouton. «Ces feux sont non seulement des sources de pollution atmosphérique mais en plus, le plus clair du temps, ceux qui les allument repartent et laissent la fosse telle quelle» déplore M. Chouata. Et d'ironiser : «Que peut-on faire ? Les poursuivre en justice ? Leur coller une amende ?». La période suivant l'Aïd Après l'Aïd, les déchets continuent de venir s'entasser dans les rues des villes marocaines. «Durant deux à trois jours, les familles marocaines continuent à empiler les déchets dans des bacs déjà pleins» indique le président de l'AMEDE. Mais que font justement les services de gestion des déchets urbains ? Ils «rationnalisent leur déplacement car ils ne sont pas payer pour des tours supplémentaires» explique M. Chouatia. De fait, la plupart des contrats délégués qui lient les communes urbaines aux sociétés chargées d'assurer le nettoyage des villes marocaines sont forfaitaires, c'est-à-dire, fixés à l'avance. Ils n'intègrent pas de modalités ad hoc pour des occasions spéciales, comme celle de l'Aïd. C'est pourquoi, les sociétés chargées de la gestion des déchets (qui sont payées à la tonne de déchets collectés) continuent à effectuer leur rotation habituelle pendant la fête et qu'il faut par conséquent, plusieurs jours en général pour que les rues des villes marocaines retrouvent un état de salubrité décent.