Dans six les principaux pays connus comme des destinations historiques de la migration marocaine en Europe, peu de jeunes issus de cette communauté se sentent concernés par la participation aux élections au Maroc. Une majorité se déclare par ailleurs binationale et beaucoup disent avoir une image positive du Maroc, malgé des réserves sur la cadence des réformes, selon une étude du CCME. Beaucoup de jeunes marocains issus de l'immigration en Europe ont intégré le sentiment d'appartenance aux pays d'origine et de résidence à la fois, malgré des défis persistants concernant l'accès à l'emploi, l'évolution du statut social ou encore l'accès à des études poussées. C'est ce qui ressort d'une étude sur «La situation des jeunes marocains résidant en Europe», élaborée par le Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME) et Ipsos. L'objectif est de contribuer à «une meilleure compréhension de la réalité, des opinions, des défis et des attentes de la jeunesse marocaine en Europe». Il s'agit aussi de dynamiser le débat sur les politiques publiques destinées aux jeunes de la communauté marocaine à l'étranger, indique un communiqué parvenu à Yabiladi. Les chiffres de l'étude se basent sur un échantillon de 1 433 jeunes marocains âgés de 18 à 35 ans, résidant en France, en Belgique, en Espagne, en Italie, en Allemagne et aux Pays-Bas. Dans ses observations majeures, le CCME a constaté principalement «une forte volonté d'intégration dans les pays de résidence». En tout, 66% des interrogés ont déclaré avoir la nationalité du pays tiers. Les jeunes membres de la communauté marocaine à être binationaux sont ainsi 99% aux Pays-Bas, 88% en Belgique, 86% en France, 82% en Allemagne, 40% en Espagne et 29% en Italie. Un sentiment d'appartenance double malgré le défi d'accès à l'éducation Le sentiment de porter une double identité est partagé par 84% des jeunes MRE aux Pays-Bas, 80% en France, 79% en Belgique, 70% en Espagne, 67% en Allemagne et 62% en Italie, bien que le taux de binationalité y reste faible, comparé aux cinq autres pays. Globalement, 85% des sondés maîtrisent la langue du pays de résidence, indicateur important sur l'intégration : 99% pratiquent couramment le néerlandais à l'oral, à l'écrit et à la lecture aux Pays-Bas. 97% maîtrisent l'allemand, 97% le français et/ou le néerlandais en Belgique, 94% le français en France, 81% l'espagnol et 57% l'italien. Selon l'étude, nombre parmi les sondés ressent que les résidents locaux ont globalement une bonne image sur la communauté marocaine, malgré quelques cas traduisant un sentiment de racisme. En Italie, 92% disent se sentir perçus comme des étrangers dans leur pays de résidence, ce qui est le cas pour 91% en Allemagne, 82% en Espagne, 82% aux Pays-Bas, 80% en Belgique et 69% en France. L'indice de confiance en l'avenir et en la vie professionnelle reste très élevé, atteignant 80% en moyenne, certes. Mais l'accès à l'éducation dans le cadre d'études poussées reste plus ou moins limité. En Allemagne, deux tiers de la tranche d'âge sondée ne dépasse pas les études secondaires, ce qui est le cas pour beaucoup de jeunes marocains d'Italie et de Belgique. En Espagne, 80% ont le niveau secondaire ou moins et 80% aux Pays-Bas ont le niveau de baccalauréat ou moins. En France, ils sont 50% à pouvoir suivre des études supérieures. En Italie, 62% affirment par ailleurs se confronter aux problématiques liées à l'emploi. Ils sont 50% à être du même avis en Espagne, 37% aux Pays-Bas, 31% en Allemagne et 23% en France. Par ailleurs, les jeunes marocains estiment avoir un lien fort avec le Maroc. 95% affirment se rendre au pays, dont 61% disent le faire chaque année. Ils sont nombreux aussi à suivre l'actualité de leur pays d'origine et à interagir avec ses problématiques, principalement via les réseaux sociaux. 89% des jeunes marocains de France déclarent avoir une image positive du royaume, ce qui est le cas pour 85% en Allemagne, 74% en Belgique, 70% en Italie, 68% en Espagne et 61% aux Pays-Bas. Un lien renforcé avec les pays d'origine et d'accueil Cela dit, les jeunes marocains résidents dans les six pays objet de l'étude expriment un intérêt plus important pour les élections là où ils résident qu'au Maroc. 67% en France se disent concernés par la participation aux scrutins dans l'Hexagone, contre 6% au Maroc. Ces chiffres sont respectivement de 36% et de 16% en Italie, 41% et 7% en Allemagne, 51% et 9% en Espagne, 55% et 4% en Belgique, 45% et 1% aux Pays-Bas. Dans un autre registre, un tiers des répondants a exprimé son désir de revenir pour investir au Maroc, bien que les jeunes marocains d'Allemagne et d'Italie restent les plus réticents à cette idée. L'indice d'appartenance à l'identité marocaine reste fort en revanche, sur d'autres aspects moins politiques. Beaucoup parmi les jeunes disent notamment être pratiquants des rites religieux selon le modèle marocain basé sur la Commanderie des croyants. Toujours est-il que leurs opinions restent divergentes sur les réformes au Maroc. En effet, deux tiers des répondants ont exprimé leur insatisfaction quant à la rapidité de ces changements. En Allemagne, 12% seulement ont dit leur satisfaction, 18% en Espagne, 37% en Italie, 38% aux Pays-Bas, 44% en France et 57% en Belgique. Aussi, la plupart des répondants ont exprimé une faible satisfaction à l'égard des services rendus par les institutions du royaume (41% d'insatisfaction concernant le transport international, 48% concernant les services consulaires, 52% la justice, 42% les médias, 47% la douane). Pour 64% dans l'ensemble des six pays, l'éducation est le secteur dans lequel le Maroc devrait investir, suivi de celui des services, puis l'industrie, et enfin le tourisme.