Alors que le ministre israélien de Défense effectuait une visite au Maroc, l'ambassadeur allemand en Espagne a effectué une visite à Melilla. Un étrange timing dans le contexte de crise diplomatique à la fois avec Madrid et Berlin. L'ambassadeur d'Allemagne en Espagne s'est rendu, hier, à Melilla. Wolfgang Dold a conduit une délégation de diplomates de son pays, composé notamment d'un consul et d'un responsable des services de renseignements. La visite avait une tonalité sécuritaire. En témoigne la rencontre de la mission allemande avec la hiérarchie de la Garde civile et de la Police Nationale opérant dans la ville ainsi qu'avec la Déléguée du gouvernement, Sabrina Moh. Officiellement, Dold a abordé avec ses interlocuteurs espagnols les questions se rapportant à «la fermeture de la frontière entre l'Espagne et le Maroc à la suite de la pandémie de Covid-19 et la collaboration entre les forces de sécurité espagnoles et marocaines dans le domaine de la sécurité», rapportent en chœur plusieurs médias ibériques. On apprend qu'à l'occasion de ce déplacement, l'ambassadeur allemand a plaidé pour un renforcement de la coopération de son pays avec le commandement de la Garde civile à Melilla, incluant un échange d'informations sur les réseaux de migration, trafic de drogue, blanchiment d'argent et du terrorisme. Ceuta sera la prochaine étape de ce partenariat. La crise maroco-allemande se prolonge Cette présence de l'ambassadeur allemand à Melilla a coïncidé étrangement avec la visite qu'effectue au Maroc du ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, à la tête d'une délégation composée de militaires et de responsables des services de renseignements. Un timing qui n'est pas sans rappeler la réunion du Conseil de sécurité, le 21 décembre 2020, à la demande de l'Allemagne, consacrée à l'examen de la reconnaissance par l'administration Trump de la marocanité du Sahara occidental. Ce déplacement de l'ambassadeur Dold à Melilla atteste que la crise entre Rabat et Berlin est appelée à se prolonger. L'Allemagne reproche au royaume «d'avoir mis fin aux relations normales entre les Etats. Il n'y a pratiquement plus de communication et l'ambassadeur d'Allemagne proposé attend depuis cinq mois l'agrément des autorités marocaines. C'est une approche inhabituelle entre des pays amis», a déploré, début novembre, Niels Annen, le vice-ministre aux Affaires étrangères, en fonction depuis le 14 mars 2018, dans une interview accordée à un média germanique. Cette visite polémique témoigne également de la lune de miel entre le voisin ibérique et l'Allemagne. Berlin est d'ailleurs le principal allié de Madrid au sein de l'Union européenne. Pour rappel, au lendemain de l'exode vers Ceuta de milliers de Marocains, les 17 et 18 mai, le secrétaire d'Etat allemand aux Affaires européennes, Michael Roth, a appelé les Vingt-sept à ne pas céder au «chantage du Maroc». «L'Union européenne aide des pays comme le Maroc à donner une perspective à leurs jeunes, à créer des emplois. Mais j'ai l'impression que les jeunes sans perspectives deviennent une monnaie d'échange politique pour les dirigeants. C'est cynique. L'UE ne doit pas permettre qu'elle soit soumise à un chantage», avait-il également déclaré lors d'une interview accordée à El Pais. Cette visite, dûment autorisée par le ministère espagnol des Affaires étrangères, révèle aussi que le réchauffement attendu des relations entre Rabat et Madrid a pris un coup de froid. Certains milieux en Espagne pointent, d'ailleurs, la lenteur dans le processus de normalisation. Ils se plaignent surtout du retard constaté dans le retour de l'ambassadrice, Karim Benyaich.