Suite au lancement vendredi d'une rumeur selon laquelle Vivendi serait sur le point de céder sa filiale de jeux, Activision Blizzard, les actions du groupe média ont bondi d'un seul coup. Une réaction positive pour les dirigeants du groupe et qui laisse donc présager d'une accélération du mouvement de cessions envisagées depuis plusieurs mois en interne. Sur la liste des candidates potentielles à la «rupture», Maroc Télécom apparait favorite, la filiale marocaine de Vivendi ayant enregistré des résultats en forte baisse l'an passé. Analyse. Maroc Télécom a du mouron à se faire. Et pour cause : Vivendi, qui laisse «fuiter» depuis plusieurs mois la rumeur selon laquelle le groupe serait sur le point de se délester de ses actifs internationaux –parmi lesquelles l'entreprise marocaine- vient de voir le cours de ses actions bondir considérablement à la suite d'une rumeur sur la cession de sa filiale de jeux, Activision Blizzard, lancée hier. Vendredi, durant la Sun Valley Media and Technology conference organisée par la banque privée Allen & Co, le président du conseil de surveillance de Vivendi, Jean-René Fourtou, a effectivement laissé entendre que le groupe serait actuellement entrain d'étudier la vente d'Activision Blizzard : «C'est une possibilité, nous sommes toujours à la recherche des opportunités sur nos différents métiers» a-t-il déclaré. Aussitôt la rumeur lancée, le cours de l'action de Vivendi a grimpé de 3,12 %. L'art de cultiver le suspens L'hypersensibilité du marché financier à cette annonce est liée en grande partie au climat d'attente cultivée depuis de nombreux mois par l'entreprise française. Une attente exacerbée par la nervosité des investisseurs qui ont conscience que les perspectives à moyen-terme du groupe ne sont pas des plus optimistes. En effet, les agences de notation Moody's, Fitch et Standard & Poor's, qui ont placé la note de Vivendi sous surveillance négative ces 15 derniers jours, s'inquiètent d'un double mouvement des états financiers de la compagnie. D'un côté, une hausse de la dette de 12 à 14 milliards d'euros d'ici fin 2012 est attendue, du fait du rachat par le groupe de l'entreprise britannique EMI. De l'autre, une baisse de l'excédent brut d'exploitation du groupe, en raison des déboires de SFR confronté à l'érosion des marges dans les télécoms, est également attendue. Ces perspectives de décroissance ajoutent donc à la pression qui pèse sur les épaules des dirigeants de Vivendi. D'où leur motivation à recentrer l'entreprise sur ses actifs essentiels et à céder rapidement ses actifs périphériques tels que le leader mondial des jeux vidéo Activision Blizzard, le groupe de télécom brésilien GVT, ou encore Maroc Telecom. L'objectif de la démarche est de dégager des liquidités pour à la fois alléger le poids de la dette du groupe, mais aussi investir dans les actifs considérés comme cœur de métier, à savoir SFR, Canal+ et Universal, de l'autre. En revendant Activision Blizzard, dont elle détient 61 % des parts, Vivendi pourrait ainsi encaisser 6,7 milliards d'euros (soit plus de 70 milliards de dirhams). Idem pour GVT que la compagnie a acheté 3 milliards d'euros (33 milliards de dirhams environ) en 2009 et qui en vaudrait près du double aujourd'hui, soit 5,7 milliards (un peu plus que 60 milliards de dirhams). Enfin, si la compagnie choisissait de se départir de Maroc Télécom, dont elle détient 53% du capital, c'est quelques 3 milliards d'euros qui entreraient directement dans ses caisses (30,8 milliards de dirhams). Plusieurs indices d'une cession future de Maroc Télécom Reste à savoir, après cette annonce à demi-mots de la cession d'Activision Blizzard, laquelle de ses deux autres filiales, GNV ou Maroc Télécom, Vivendi cherchera à céder dans un second temps. En admettant qu'Activision Blizzard soit vendue en premier (6,7 milliards), il faudrait encore quelques 5,3 milliards d'euros à la compagnie pour effacer sa dette de 12 milliards. Or la seule vente de Maroc Télécom ne suffirait pas à couvrir ce «reliquat», ce qui plaide ainsi en faveur d'une cession complémentaire de GNV. Ce faisant, contrairement à Maroc Télécom, l'entreprise brésilienne affiche un bilan positif sur l'année 2011 puisque elle a réalisé un bénéfice net de 420 millions d'euros (soit 4,2 milliards de dirhams) sur l'exercice. Or l'an dernier, Maroc Télécom a accusé pour sa part un recul conséquent de son bénéfice net de plus de 800 millions d'euros (un peu plus que 8,1 milliards de dirhams). Une contre-performance qui pourrait peser dans la décision des dirigeants de Vivendi. Pour éviter que l'épée de Damoclès ne vienne briser le lien qui l'unit à sa maison-mère, la compagnie marocaine a d'ailleurs récemment lancé un plan de départs volontaires visant à réduire ses effectifs de 11%. 300 millions de dirhams d'économie sont attendus de cette mesure. Soit un montant dérisoire en comparaison avec les sommes en jeu dans cette histoire. Ce qui soulève la question suivante : le programme de «diète» imposé à Maroc Télécom ne serait-il pas une façon indirecte pour Vivendi de rendre la mariée plus séduisante afin, ensuite, de mieux s'en séparer ? Réponse dans les semaines à venir…