Le processus de cession de Maroc Telecom par son actionnaire majoritaire, Vivendi, qui en détient 53% semblerait bel et bien entamé. L'information publiée, hier, par le quotidien économique et financier britannique, Financial Times s'est propagée comme une traînée de poudre auprès des différents médias et sites d'information français. Certes, les supputations autour de cette opération n'ont pas arrêté d'affluer ces derniers mois, mais, cette fois la rumeur est devenue plus sérieuse. Elle a pris pour fondement les discussions engagées avec des banques sur l'éventualité d'une cession de la participation de Vivendi dans Maroc Telecom. Vivendi serait en discussion avec Lazard et Crédit agricole pour évaluer la possibilité de céder le contrôle du premier opérateur télécoms marocain évalué, la semaine dernière, à 4 milliards d'euros. Interrogé sur la sortie de Vivendi du tour de table d'Itissalat Al-Maghrib (IAM), lors de la dernière conférence de présentation des résultats semestriels, Abdeslam Ahizoune, le Président de directoire de l'opérateur historique, a répliqué : «La question est ouverte et officiellement posée». Contacté par nos soins, Maroc Telecom n'a pas souhaité commenter cette information. Si pour certains analystes français, la cession des joyaux que sont l'opérateur télécoms brésilien GVT et l'éditeur de jeux vidéo Activision est plus probable que la vente des parts dans Maroc Télécom, pour d'autres, le géant français des médias qui est contraint de céder des actifs, semblerait avoir fait le choix de se séparer des télécoms, pour se concentrer sur les médias. Selon la presse française, les noms des deux groupes Telecom Emirati (Etisalat) et qatari (Qtel) ont déja circulé comme repreneurs éventuels des parts de Maroc Telecom, alors que pour la reprise de la participation de Vivendi dans GVT, c'est Telecom Italia qui serait en lice. Même pour la machine à cash du groupe, SFR, des géants comme America Moviles pourraient être intéressés. Seulement, à la lecture des perspectives de Vivendi, comme cela a été rapporté par la note d'information simplifiée diffusée le 18 juin dernier et qui est relative à l'augmentation de capital réservée aux salariés du groupe au Maroc, il semble que Vivendi est désormais focalisée sur les pays à forte croissance, sur l'innovation, ainsi que sur les synergies intragroupes et la croissance organique. «En 2012, au durcissement de la concurrence en France et au Maroc s'ajoutera l'accroissement considérable de la fiscalité en France. 2014 devrait voir le retour de la croissance des résultats, grâce aux effets positifs significatifs de la stratégie d'innovation, des acquisitions réalisées en 2010 et 2011, génératrices de synergies, ainsi que du renforcement du groupe dans les pays émergents», lit-on dans la note d'information, qui a rapporté aussi que Vivendi entend maintenir sa stratégie de croissance rentable en renforçant les initiatives de croissance organique, en particulier chez GVT. Aux yeux de Vivendi, le Maroc est-il un pays émergent ? L'activité de sa filiale marocaine, Maroc Telecom, serait-elle toujours génératrice de croissance ? Une simple lecture de la performance de l'opérateur historique, au terme du premier semestre 2012, laisse apparaître un revirement progressif de tendance au Maroc. Il va sans dire que ce sont essentiellement les filiales africaines (Mauritanie, Gabon, Burkina Faso, Mali) qui viennent, désormais, compenser la baisse de l'activité au Maroc, en raison de l'exacerbation de la concurrence et de la chute continue des tarifs. C'est ainsi, que le résultat opérationnel ajusté (EBITA) ressort en baisse, sur un an, de 12,8%, à 463 millions d'euros. Une provision pour restructuration de 72 millions d'euros a été comptabilisée à la suite du lancement en juin 2012 d'un plan de départ volontaire. Hors provision de restructuration, le résultat opérationnel ajusté s'élève à 535 millions d'euros, en progression de 0,8 %, correspondant à une marge de 39,3 %, en hausse de 0,3 point. Pour 2012, le groupe télécoms marocain, sur la base des évolutions récentes du marché et à moins d'un nouvel événement exceptionnel majeur, maintient ses prévisions et prévoit, hors charges de restructuration, d'atteindre une marge d'EBITA d'environ 38 % et des flux nets de trésorerie opérationnels (CFFO) stables par rapport à 2011. Ces réalisations pourraient inciter le groupe français à mettre en vente ses parts dans IAM puisqu'il n'y a pas de forte croissance en vue. Toutefois, cette forte croissance pourrait émaner du marché africain sur lequel le groupe marocain est en train d'asseoir un bon positionnement. Aussi, si Vivendi cède ses parts dans Maroc Telecom, le gourpe devra renoncer à ses prétentions sur le marché africain. Le débat est donc ouvert mais les jeux sont loin d'être faits.