Présenté mercredi à l'Académie du royaume du Maroc, un ouvrage préconise la création de la Maison de l'histoire du Maroc, afin d'appuyer une recherche dynamique dans le domaine de l'histoire multiséculaire du pays. La dimension de l'histoire des migrations bénéficiera d'un intérêt particulier. «Pour une Maison de l'histoire du Maroc» est l'ouvrage présenté par l'Académie du royaume du Maroc, qui appelle à la mise en place d'une institution éponyme, afin d'enrichir et de promouvoir l'écriture d'une histoire multiséculaire accessible aux jeunes générations comme aux chercheurs. Il s'agit d'une contribution scientifique d'une trentaine d'historiens du Maroc, du Sénégal, des Etats Unis et de France, déjà réunis en 2012 à l'initiative du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH). En effet, cette Maison devra «répondre aux attentes de la société marocaine», qui exprime un intérêt grandissant aux écrits et aux recherches relatives à différents aspects de l'histoire du pays. A travers une dynamisation de la recherche scientifique qui sera tournée vers la diversité, elle aura aussi comme objectif d'accompagner les initiatives politiques et institutionnelles, telles que la création des Archives du Maroc ou encore l'Instance équité et réconciliation (IER). Secrétaire perpétuel de l'Académie du royaume du Maroc intervenant lors de la présentation de cet ouvrage, 9 ans après que les premiers jalons de ce projet ont été posés, Abdeljalil Lahjomri décrit une grande «demande sociale d'une connaissance apaisée du passé», qui rejoint d'ailleurs les recommandations de l'IER. De plus, les avancées observées dans le domaine de la recherche sur l'histoire du Maroc, depuis plusieurs décennies, permet désormais la création d'une structure pour servir d'espace où ce processus sera mené. L'histoire des migrations marocaines inscrite dans un processus dynamique Coordinateur scientifique du colloque, Mohammed Kenbib considère pour sa part que l'histoire est «l'un des repères auxquels les peuples et les individus se réfèrent pour renforcer leurs attaches avec leurs racines, se conforter dans les perceptions qu'ils se font d'eux-mêmes et des autres, et essayer de conférer davantage d'intelligibilité à ce qui se passe autour d'eux, voire scruter l'avenir avec plus de sérénité». Si ce travail s'intéresse en effet à l'écriture du passé, il est loin d'être figé dans un passéisme nostalgique, a souligné pour sa part Driss El Yazami, président du Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME), durant la présentation de l'ouvrage. En effet, la recherche dans le domaine de l'histoire implique surtout une dynamisation d'une discipline longtemps perçue comme fermée et difficilement accessible. Pour changer cette idée reçue, un travail devra également être mené dans les domaines où les contributions restent très rares, voire quasi-inexistantes. C'est le cas, selon Driss El Yazami, pour l'histoire des femmes au Maroc, ou encore l'histoire des migrations du Maroc et également l'histoire des migrations des femmes. Dans ce sens, il a déclaré à Yabiladi en marge de cette présentation que «dans l'histoire des migrations marocaines, il y existe des vagues historiques et d'autres de différentes nature, qui doivent être intégrées au projet de la Maison de l'histoire». «Cette dimension doit être prise en compte comme une donnée principale, car c'est l'histoire des mobilités marocaines vers l'étranger, mais aussi des mobilités de l'étranger vers le Maroc : il existe des migrations subsahariennes qui font désormais partie de notre histoire. Il y a également des migrations européennes qui font partie de notre histoire du XXe siècle.» Driss El Yazami, président du CCME Une convergence des résultats des initiatives traitant de l'histoire des migrations Ainsi, il s'agit de «considérer dès le départ du projet que c'est une histoire des mobilités». Dans le même sens, Driss El Yazami rappelle qu'il existe actuellement une multitude d'institutions consacrées à l'histoire des migrations à travers le monde, comme le Musée de l'immigration de la Porte dorée en France, pour lequel il se souvient avoir contribué à l'écriture du premier rapport présenté au Premier ministre de l'époque, Lionel Jospin. «Il existe plein d'initiatives sur l'histoire de l'immigration et l'immigration marocaine dans plusieurs pays, grâce à toute une jeunesse d'historiens originaires du Maroc et basés à l'étranger», souligne encore El Yazami à Yabiladi, appuyant l'idée d'une convergence entre ces différentes dynamiques pour enrichir ce volet dans le cadre de la Maison de l'histoire du Maroc. Le travail a d'ailleurs déjà commencé «avec certains chercheurs et historiens». L'ancien président du CNDH a également proposé l'idée de partenariats et de collaboration avec des institutions basées en Europe ou en Amérique, afin de mieux retracer l'histoire de ces migrations et rendre accessible cette mine de savoir au Maroc. Les contributions de l'ouvrage où le projet de la Maison de l'histoire est présenté décrivent une institution conçue comme «un espace de recherche, d'études et d'interprétation», mais aussi «un outil pédagogique, d'organisation de conférences et de colloques, d'édition et de mise en réseau, travaillant en partenariat avec les milieux académiques, les institutions proches (et notamment les archives et les milieux éducatifs), ainsi que la société civile».