L'Algérie est le seul pays africain à ne pas s'empresser à signer les « Facilités de Crédit » auprès du FMI et à souscrire aux largesses tarifées de la Banque Mondiale. Avec une dette extérieure faible (2 % du PIB) et une dette intérieure estimée à 45% du PIB, le géant nord-africain refuse de livrer ses comptes à l'appréciation du système financier international (pas de notation financière, S&P, Moody's et Fitch régulièrement éconduits). « Nous préférons emprunter auprès de nos citoyens » a dit le président Abdelmadjid Tebboune, confronté aux prévisions d'une forte récession en 2020. « L'endettement porte atteinte à la souveraineté nationale », a-t-il poursuivi devant les médias algériens. Selon les prévisions du FMI pour l'Afrique du Nord datées du 15 avril dernier, l'Algérie enregistrerait le pire déficit budgétaire (-20% du PIB) et le déficit le plus élevé de la balance courante (-18,3% du PIB). Le pays de feu Boumediène, construit sur l'anti-système global, est l'un des moins endettés en Afrique, utilisant sa manne pétrolière (90 % de ses recettes d'exportation) pour s'affranchir vis-à-vis du FMI et de la Banque Mondiale et pour conduire sa politique de développement économique. Héritier de la ligne dure du Front de Libération Nationale (FLN), le président algérien actuel a opté pour un choix rationnel (la dette est une vraie contrepartie à la souveraineté nationale) et idéologiste car les réserves de change, ramenées de 162 milliards de dollars en 2014 à 57 milliards de dollars, exigent une alternative claire et des réformes en vue d'une diversification économique indispensable. Or, le président, sans parler de la création d'un marché des bons de Trésor ou d'un compartiment obligataire dynamique à la Bourse d'Alger, permettant à ses concitoyens de souscrire au "coupon Algérie", évoque plutôt le recours aux fonds de l'informel estimés à 71 milliards d'euros. Question: comment intégrer cette manne dans le circuit formel sans déséquilibrer l'économie et, surtout, sans levée de boucliers de la part des gardiens du temple de l'orthodoxie financière mondiale ? Cela d'autant que, la contribution de l'informel, si elle résoudra un problème de liquidités temporaires pour le Budget de l'Etat, n'apportera pas de solution au Dinar Algérien menacée sans contrepartie de devises extérieures. En clair, sans remontée du cours de baril et sans concours extérieurs auprès de pays amis (la Chine exigerait d'abord d'être remboursé sur les prêts antérieurs), l'Algérie exposera sa monnaie au syndrome Zimbabwé. Le président refuse l'emprunt pour des raisons d'abord idéologiques car «lorsque nous empruntons auprès de banques étrangères, on ne peut parler ni de la Palestine ni du Sahara occidental », deux causes chères à Alger, a-t-il argué. Reste à savoir si Alger résistera encore longtemps à la tentation de la planche à billet ?