Le chef du gouvernement a fait hier sa « grande » sortie nationale depuis la fin du processus électoral. Passablement malmené par divers événements, Abdelilah Benkirane a été fidèle à lui-même : il ne s'est pas dérobé et a répondu à toutes les questions, avec sa gouaille et son charisme habituels… Il est donc revenu sur plusieurs faits survenus depuis les élections, comme l'élection d'Abdelali Hamieddine à la tête du groupe PJD à la Chambre des conseillers, le débat sur sa succession au SG du PJD, la polémique déclenchée par le CNDH sur la question de l'héritage, son conflit avec le ministre de l'Agriculture Aziz Akhannouch… Ordonnateur ou pas du Fonds de développement rural Le chef du gouvernement a expliqué que son affrontement avec Aziz Akhannouch était l'événement le plus grave qu'ait connu son gouvernement depuis 2012 (occultant la crise avec l'Istiqlal…). Il a affirmé que cette situation lui avait causé un grand embarras personnel, car le ministre est celui qui lui est le plus proche, « un homme respectable, éminemment respectable », ajoute-t-il. « Mais lors de la réunion du SG du PJD, nous avons convenu avec les autres membres qu'il fallait faire des concessions »… car il a précisé que c'était lui qui, constitutionnellement, devait être l'ordonnateur de ce Fonds, même s'il déléguait cette fonction à son ministre de l'agriculture.. Il a expliqué aussi que le ministre avait pris ombrage de déclarations imputées à des « proches » et publiées par Akhbar Alyoum. Pour ce qui concerne la demande d'amendement de l'article 30 qui confère à Akhannouch la gestion du Fonds (dont les 55 milliards de DH seront étalés sur 5 ans) par les députés de son parti, il a répondu que le SG du PJD avait tranché et que l'affaire était close. « Pour moi, la question est réglée »… ce qui signifie en creux que pour les autres, les députés, ce pourrait ne pas être le cas. Poursuites judiciaires contre Akhbar Alyoum ? Oui, a affirmé le chef du gouvernement, il a accordé son autorisation aux ministres de l'agriculture et des fiances d'intenter une action en justice contre le quotidien Akhbar Alyoum, par qui le « scandale » est arrivé… Le cas Abdelali Hamieddine Le membre du SG du PJD devait être élu à la tête du groupe parlementaire du PJD à la Chambre des conseillers, et il l'a été, mais Benkirane a expliqué qu'il lui avait recommandé de se désister et Hamieddine a accepté et s'est retiré de la course pour cette fonction, à laquelle le chef du gouvernement préférait Nabil Cheikhi. L'autre député du PJD, Abdelaziz Aftati, avait quant à lui expliqué cela par des pressions exercées en vue de diriger les événements de la part de parties occultes, de mains invisibles… Des pressions ? « La politique, c'est d'abord et avant tout des pressions »… Des pressions sur Hamieddine ? « Il n'est pas facile de faire pression sur cet homme car alors il va tout dévoiler aux médias »… Pourquoi cette crise alors ? « Demandez aux membres du parti qui en ont parlé à la presse… quant à Aftati, il lui arrive de faire des déclarations préjudiciables, mais je vous invite à l'interroger directement »… Le CNDH et sa recommandation sur l'héritage Pour le chef du gouvernement, et du PJD, c'est le président du CNDH qui est à l'origine de cette recommandation sur l'héritage. Mais il a soufflé le chaud et le froid… Le froid : « Que cherche Yazami, le chaos ? Les peuples, quand vous les provoquez, ils répondent…, et si Yazami veut émettre un avis, alors qu'il lance un journal ! », puis le chef du gouvernement poursuit : « Cet homme doit retirer ce qu'il a dit et s'excuser de l'avoir dit, car l'héritage est mentionné dans le Coran, dans des versets clairs et explicites. Le Maroc n'est pas terra nullus où l'on ferait ce qu'on veut et cette recommandation verse de l'huile sur le feu. Dites-nous que vous ne voulez pas le Coran, et alors on verra ce qui se passera ». Le chaud : « Si on veut discuter et interpréter un texte coranique, il y a des méthodes connues et reconnues des oulémas et des théologiens ». Un successeur à Benkirane, peut-être ? Le journaliste évoque les noms d'Aziz Rabbah, de Mustapha Ramid, de Driss Azami el Idrissi, et Abdelilah Benkirane continue : « … oui, il y a ces noms, mais aussi le Dr Elotmani et d'autres. L'homme c'est le style (en français). Chacun de ces personnages peut apporter un plus ou combler un vide, comme il y aurait des choses qu'il ne ferait pas… Moi, je suis un être simple et non pas ce phénomène de communication comme on me présente ; c'est la démocratie qui m'a placé là où je suis ». Questions diverses Amendis à Tanger. Benkirane a dit qu'il n'avait pas 3 milliards de DH à débourser pour dédommager l'entreprise délégataire de la ville du Détroit, en cas de résiliation unilatérale du contrat la liant à la ville. « Pourquoi le PAM n'avait-il pas fait cela quand il était aux commandes de Tanger ?… non, croyez-moi, le responsable est celui qui trouve des solutions ». Les étudiants de médecine. « Avant, les étudiants faisaient leur service militaire ». Mais aujourd'hui, les choses ont changé, et « les étudiants ne m'ont pas informé qu'ils refusaient autant le service civil obligatoire ».