Le débat du ministère de la Santé sur l'avortement a finalement eu lieu, mercredi 11 mars à Rabat. . Médecins, magistrats, députés, experts des droits de l'homme, ils étaient venus, ils étaient tous là… Le Professeur Chafik Chraibi, le président de l'association marocaine de lutte contre l'avortement clandestin (AMLAC) était aussi présent à la conférence. Mais il a tenu tout de même à préciser que le débat de son association aura lieu le 16 mars à la Bibliothèque nationale de Rabat. Lors de cette rencontre, le ministre de la Santé Houssaïne El Ouardi a reconnu que « les textes marocains régissant l'avortement sont très restrictifs, inéquitables et dépassés, ne tenant pas compte de la réalité quotidienne des Marocains ». Le ministre a également évoqué le code pénal marocain qui prévoit des peines de prison allant de six mois à deux ans pour « l'avorteur et l'avortée, sauf quand il s'agit de préserver la santé ou la vie de la mère ». Et c'est là où le bât blesse, puisque pour le Pr Chraïbi, la deuxième partie de la phrase n'est pas appliquée. El Ouardi, qui avait toujours refusé de s'engager sur cette question, a franchi un pas en annonçant que le gouvernement envisageait de « faciliter l'accès des filles candidates à l'avortement clandestin à une interruption de grossesse médicalisée ». Pour sa part, Aïcha Chenna, présidente de l'association Solidarité féminine, a insisté sur l'urgence de parler désormais plus activement et plus efficacement des « droits sexuels, bien avant et bien plus que les droits de l'Homme », invitant les oulémas présents dans la salle à s'exprimer sur les questions de sexe évoquées dans le Coran. Le théologien Mustapha Benhamza d'Oujda a éludé, en disant la chose et son contraire. On le sentait impliqué dans le débat, mais prisonnier de sa pensée et de sa logique ; Il a cité le verset qui interdit de tuer, mais il a laissé la porte ouverte en demandant à mieux définir la malformation. Le représentant du ministère de la Justice a, quant à lui, parlé d'une approche législative, mais qu'il s'agit de bien cerner. Ce à quoi le secrétaire général du CNDH Mohamed Sebbar a répondu qu'interdire ne réduit en rien le phénomène, qui est évalué dans une fourchette de 600 à 1000 avortements par jour. Le débat est donc lancé, les uns et les autres fourbissent leurs armes, mais il est évident que les opposants à l'avortement, même sous conditions, sont sur la défensive. Il appartient aux partisans de l'avortement conditionnel de ne pas les trop pousser dans leurs retranchements afin que le Maroc puisse adopter la politique des petits pas pour de grandes avancées. Le temps fera son œuvre, et rendez-vous le 16 mars pour la rencontre organisée par l'AMLAC.