Aux USA, c'est selon les Etats et à ce jour encore, le sujet est régulièrement l'objet de grandes et violentes polémiques qui arrivent par moments à l'agression physique. Une fois n'est pas coutume, mais les islamistes du PJD marquent un point et en méritent un autre en ne s'opposant pas au progrès. Enfin en partie. Au début fut l'Association marocaine de lutte contre l'avortement clandestin (AMLAC) que préside le professeur Chafik Chraïbi. Médecin, il est au cœur du drame et voit au quotidien, témoin oculaire ou par ouï-dire à travers les confrères, des femmes risquer au mieux leur liberté, au pire leurs vies dans des interruptions volontaires de grossesse. Elles sont ainsi autour de soixante mille à subir des avortements dans des conditions non médicalisées et la non interruption génère annuellement l'abandon de quelque cinq mille enfants. Le Code pénal marocain, s'inspirant de la charia, n'est pas dans ces considérations et prévoit six mois à deux ans de prison pour le médecin intervenant comme pour l'avortée, sauf complication. Dans ce cas, elle peut déboucher sur l'homicide. Le débat que lance l'AMLAC est un débat de société. Une société qui sait mais ne veut pas savoir. Le problème n'est pas des plus simples. Il oppose le droit à la vie une fois qu'elle est dans la matrice et le droit de la femme à disposer de son corps. En France, par exemple, c'est ce dernier qui prévaut depuis le vote de la loi Veil, Simone de son prénom, ancien ministre de la Santé. Aux USA, c'est selon les Etats et à ce jour encore, le sujet est régulièrement l'objet de grandes et violentes polémiques qui arrivent par moments à l'agression physique. Pour reprendre une expression de Fatiha Layadi, députée PAM, on n'est pas au Maroc à la veille d'une loi Veil, mais à la quête de juste ce qu'il faut pour encadrer l'exercice de l'avortement. L'AMLAC ne va pas plus loin : elle cible les grossesses issues d'un viol ou d'un inceste, qui présentent une malformation fœtale ou la présence de pathologies psychiatriques chez la mère. N'empêche qu'en organisant un congrès sur la question, l'association tente de franchir un rempart hérissé de tessons. Un théologien de la rigidité de Redouane Benchekroune, du Conseil des ouléma de Casablanca, ne souffre pas la discussion. Et ses pareils sont légion. On ne touche pas à la vie dès lors que Dieu l'a mise dans le ventre de sa génitrice quel que soit l'acte dont elle découle. Seul le Tout-Puissant est maître des destins. Regardez la Sainte Vierge, sans être touchée par personne, elle a donné naissance à un des trois grands prophètes du monothéisme. Fort heureusement, le PJD n'est pas dans cette logique. Ses thèses se rapprochent de celles de l'AMLAC. Il fait son ijtihad, émet une fatwa, organise une journée d'étude et élabore une proposition de loi qu'il soumet au Parlement. Il est pratiquement le seul sur ce registre. Comme quoi il ne faut jamais désespérer des hommes. Cela dit, revenons à la coutume. L'attitude du PJD corrobore l'adage : même une horloge à l'arrêt donne l'heure exacte deux fois par jour.