L'opération Barkhane, lancée en 2014 par la France pour lutter contre les groupes armés terroristes au Sahel, a pris fin le 9 novembre 2022, après huit ans d'engagement militaire. Cette décision fait suite au rejet croissant de la présence française dans la région, notamment par le Mali, le Burkina Faso et peut-être le Niger où le coup d'Etat en cours est un message de plus. L'opération Barkhane était la plus importante opération extérieure de la France, avec un budget de près de 600 millions d'euros par an et environ 4 500 soldats déployés au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au Tchad. Elle visait à appuyer les forces armées sahéliennes dans la lutte contre les groupes djihadistes affiliés à al-Qaïda ou à l'Etat islamique, qui menacent la sécurité régionale et internationale. Elle s'inscrivait également dans une stratégie plus globale de soutien au développement et à la gouvernance des pays partenaires. Toutefois, malgré les efforts déployés et les succès remportés sur le terrain, selon le Quai d'Orsay, l'opération Barkhane n'a pas réussi à éradiquer la menace terroriste ni à résoudre les problèmes structurels qui alimentent l'instabilité au Sahel. Les crises politiques, les tensions sociales, la pauvreté, la corruption, le trafic illicite et le changement climatique sont autant de facteurs qui favorisent le recrutement et l'action des groupes armés. Par ailleurs, l'opération Barkhane a suscité une hostilité croissante des populations locales, qui la perçoivent comme une ingérence néocoloniale ou une occupation militaire. Lire aussi : Le Maroc face à un dilemme de production de la pastèque C'est dans ce contexte que le Mali, confronté à deux coups d'Etat en moins d'un an, a décidé de mettre fin à l'opération Barkhane sur son territoire en février 2022. La France a alors réagi en imposant des sanctions au régime malien et en annonçant une réarticulation de sa force hors du Mali. Le Burkina Faso a également refusé d'accueillir les forces françaises sur son sol, tandis que le président Mohamed Bazoum a accepté de les « héberger », contre l'avis de la population majoritairement hostile à la présence des forces françaises. Le dilemme du Niger Le Niger est un cas particulier dans la région, car il est le seul pays à avoir connu une transition démocratique réussie en 2021, avec l'élection du président Mohamed Bazoum. Ce dernier est un proche du président sortant Mahamadou Issoufou, qui a été un allié fidèle de la France dans la lutte contre le terrorisme. Le Niger accueille plusieurs bases militaires françaises, dont celle d'Agadez, qui abrite des drones armés. Aujourd'hui, les autorités du pays sous la houlette du général Abdourahamane Tchiani président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) sont confrontées à un dilemme : suivre l'exemple malien en renvoyant les forces françaises ou prendre le risque de négocier avec la France tout en étant confrontés à l'opposition de son propre peuple. En effet, la population nigérienne rejette massivement la présence française sur son sol, qu'elle accuse de ne pas protéger efficacement les civils face aux attaques jihadistes. Plusieurs manifestations ont eu lieu pour demander le départ des forces étrangères. Pourtant quelques jours après l'arrivée des forces française, le président Bazoum a déclaré qu'il était favorable à une réduction progressive des troupes françaises au Sahel, mais qu'il souhaitait que la France maintienne son dispositif aérien, qui est essentiel pour appuyer les forces nigériennes. Il a également plaidé pour une plus grande implication des pays africains et des Nations unies dans la sécurisation de la région. La fin de l'opération Barkhane marque un tournant dans la relation entre la France et les pays sahéliens, qui doivent désormais assurer eux-mêmes leur sécurité et leur stabilité. La France reste toutefois engagée dans la région à travers d'autres initiatives, comme la force européenne Takuba ou le partenariat pour la sécurité et la stabilité au Sahel (P3S). Elle appelle également à une plus grande implication de la communauté internationale, notamment des Nations unies et de l'Union africaine, pour soutenir les efforts des pays sahéliens.