La 4ème vague du COVID-19, tant redoutée depuis quelques semaines, a fini par se produire. Au regard du cauchemar que vit actuellement le pays, elle fut tel un tsunami, particulièrement virulent, comme le montre bien l'explosion inquiétante du nombre de cas recensés quotidiennement et de décès enregistrés. Les statistiques annoncées quotidiennement par le ministère de la Santé donnent le tournis, révélant l'étendue de la tragédie qui se propage dans tout le territoire et qui n'épargne plus personne. En témoigne mardi, on a comptabilisé 116 décès, portant le nombre total à presque 15.000 et 5.921 nouveaux cas. Plus inquiétant est le taux de positivité qui a atteint des seuils particulièrement élevés atteignant le même jour 36,89%. Hormis l'aveu à peine voilé, d'impuissance des autorités qui jugent la situation critique, l'Organisation Mondiale de la Santé, à travers son directeur de bureau de Tunis, a tiré la sonnette d'alerte. Le directeur du bureau de l'organisation en Tunisie, Yves Souteyrand, affirme que « la Tunisie est le premier pays du monde arabe et en Afrique en termes de taux de mortalité et d'infections enregistrés depuis le début de la propagation de la pandémie« . Bien plus grave, dans certaines régions du pays, on a enregistré l'apparition des cas de variant indien « Delta », particulièrement contagieux, en plus du variant britannique. Avec un système de santé défaillant, des hôpitaux submergés, incapables d'accueillir les nombreux malades ou tout le moins leur porter secours ou leur offrir de l'oxygène, le pays vit un cauchemar et les Tunisiens supportent mal les images d'un corps médical en détresse, de malades allongés à même le sol devant les centres de santé dans plusieurs régions du pays ou des familles meurtries par la disparition de leurs proches. → Lire aussi : Emploi : Signature d'un accord-cadre de coopération entre le Maroc et la Tunisie Dans ce contexte difficile, c'est surtout le manque de personnel médical qui fait beaucoup mal. « Nous avons davantage besoin de personnel que de nouveaux équipements« , affirment les équipes médicales débordées un peu partout dans le pays. En détresse, ces équipes se trouvent souvent confrontées à des arbitrages difficiles. Un médecin avoue, non sans résignation, que « nous regardons le patient souffrir, suffoquer sans pouvoir rien faire« . Et d'ajouter : sur quelle base « Choisir quel patient mérite le plus l'oxygène? Choisir qui doit vivre, qui doit mourir ?« Devant ce dilemme, les autorités publiques se sont résignées à l'évidence et en décidant de mesures de confinement ciblées mais plus sévères sur tout le territoire. D'après les experts la réussite de ces mesures pour contenir cette pandémie dépendra de l'adhésion des citoyens, trop laxistes, durement éprouvés par les effets de la pandémie, et qui acceptent mal les sévères restrictions. Tout dépendra, également de la classe politique, incapable d'oublier ses différends et changer, dans ce contexte particulier, de fusils d'épaule et de se consacrer à l'essentiel. Même si La Tunisie a dû reconfiner, depuis le 25 juin, plus de 28 communes dans plusieurs régions jusqu'au 11 juillet en raison de la dégradation des indicateurs sanitaires, la situation ne s'est pas pour autant améliorée, elle a été même empirée. Les gouvernorats de Beja, Kairouan, Siliana, Zaghouan où l'incidence supérieure à 400 cas /100 000 habitants ont été soumis à un confinement général et à l'isolement. Dans ces zones, les rassemblements, fêtes et événements sportifs ont été interdits. Les habitants ont été appelés à rester chez eux et les commerces fermés, sauf pour les produits de première nécessité. Dans les faits, ces mesures ne sont que partiellement appliquées ou plutôt respectées. Quoique tardives, les nouvelles mesures annoncées le 29 juin par le gouvernement sont considérées comme incontournables. Entrées en vigueur le 1er juillet, ces mesures, qui s'étaleront sur 14 jours, sont renforcées sur tout le territoire tunisien avec en sus un couvre-feu de 20h à 5h sur tout le territoire, une interdiction et report de toutes les manifestations publiques, la suspension des prières dans les mosquées, le renforcement du contrôle de l'application des protocoles sanitaires dans les espaces et les commerces, l'encouragement du télétravail et l'octroi de vacances exceptionnelles pour les employés de l'administration, avec limitation de l'effectif au tiers. De mesures ciblées ont été en outre décidées au niveau local selon le taux d'incidence. Les gouverneurs ont été investis de pouvoirs leur permettant de prendre des mesures de confinement ciblé à l'échelle d'une délégation et décider même de l'isolement de certains quartiers. Le pays aurait-il dû recourir à un confinement général pour endiguer cette vaguer meurtrière comme le demande de nombreux spécialistes ? Sur ce chapitre, les avis sont divergents. La porte-parole du ministère de la Santé, Nissaf Ben Alaya, estime qu'un confinement général serait difficile à appliquer. Elle soutient que pour être efficace, un confinement général devrait être appliqué pour six semaines au moins et être accompagné d'une large campagne de vaccination afin d'arriver à un niveau élevé d'immunité collective. Dans tous les cas de figure, au moment où la majorité des membres de la commission scientifique avait recommandé un confinement général, le gouvernement s'est contenté d'avancer l'horaire du couvre-feu pour le ramener à 20h sur tout le territoire national arguant leur choix par des considérations « sociales » et « économiques ». Plusieurs facteurs sont à l'origine de cette hausse de décès et de contaminations dans le pays : le laxisme, souvent observé dans le respect des gestes barrières, mais également la lenteur de la campagne de vaccination, qui a démarré depuis mi-mars mais demeure tributaire de l'approvisionnement du pays en vaccins. Sur un total de 11,7 millions d'habitants, plus d'un million de Tunisiens ont reçu la première dose de vaccin anti-Covid-19 et moins de 500.000 ont reçu la seconde dose. le pays est encore loin de l'immunité collective tant souhaitée!