La presse marocaine a perdu en la personne de Abdellatif El Gharbi, décédé vendredi après-midi, l'un de ses pionniers qui donnait l'exemple de journaliste engagé qui maîtrisait ses outils et appréciait à sa juste valeur la liberté responsable. Le défunt a été une icône de la presse nationale, notamment sportive, qui lui doit une contribution inestimable à l'édification de ses bases et l'orientation des différentes générations qui ont tiré profit de ses connaissances, en plus de sa participation à la création de l'Association marocaine de la presse sportive (AMPS), qu'il a chapeautée de 1971 à 1989. La générosité, la polyvalence, la sincérité, la volonté et la bonne foi étaient autant de qualités du défunt qui ont marqué son entourage. Pour Houcine Hayani, un des doyens de la presse sportive et élève de feu Abdellatif El Gharbi, le défunt était "une icône de la +presse+, qui s'est illustré par sa double culture et ses larges connaissances, outre le fait qu'il était un traducteur et interprète talentueux, à qui l'on doit plusieurs termes sportifs utilisés jusqu'à présent". Dans un témoignage à la MAP, M. Hayani a qualifié de "grande perte pour la presse marocaine" le décès de Abdellatif El Gharbi, qui a formé des générations de journalistes et était témoin de plusieurs événements politiques, culturels et sportifs majeurs. Il a également mis l'accent sur l'humilité du défunt, qui évitait de se vanter de toute performance journalistique ou scoop. "Il donnait le meilleur de lui-même en toute modestie et dans l'anonymat", a lancé M. Hayani. Ahmed Sabri, vétéran de la presse sportive marocaine, a indiqué pour sa part "qu'avec le décès d'Abdellatif El Gharbi, une autre étoile de la presse nationale s'est éteinte", ajoutant que le "défunt s'était généreusement adonné à son métier". "Sa voix, que ce soit sur Radio-Maroc ou la Radio nationale ne laissait pas indifférents les auditeurs dans le Royaume ou en Afrique du Nord et dans le monde arabe, notamment quand il commentait les grandes manifestations sportives, tel le Tour cycliste du Maroc", se rappelle M. Sabri. "De multiples générations se sont imprégnées du savoir de ce grand monsieur de la presse marocaine", a-t-il souligné, rappelant que "sa voix retentissait dans les stades algériens, quand le Wydad de Casablanca assumait son rôle dans la lutte pour l'indépendance de l'ensemble du monde arabo-musulman".
M. Sabri a affirmé que "le défunt, en exhortant en 1971 une pléiade de journalistes sportifs à créer l'AMPS, était convaincu, lui et ses jeunes confrères, qu'il était temps de hisser la presse sportive non seulement au rang du professionnalisme, mais à celui d'une presse qui a pour credo un total respect de la déontologie professionnelle et une garantie du droit d'accès à l'information et à son traitement en toute impartialité et objectivité". De son côté, l'ex-président de l'AMPS, Najib Salmi a souligné que "le défunt était un journaliste complet, un grand intellectuel et une véritable référence pour la presse marocaine". Et M. Salmi de confirmer que "feu Abdellatif El Gharbi, en sa qualité de président de l'AMPS et membre de la Fédération royale marocaine de football et de par les diverses fonctions qu'il occupait au sein de certains cabinets ministériels, tâchait de mettre ses relations professionnelles au service de la presse sportive nationale, d'autant plus que le défunt jouissait du respect et de l'estime de tout le monde". Feu El Gharbi sera inhumé samedi après la Prière d'Ad-Dohr au cimetière des Chouhada à Casablanca. Durant 40 ans, il a couvert de grands événements politiques, sportifs et culturels, dont les négociations maroco-françaises en 1955 et les Jeux olympiques d'Helsinki en Finlande, en 1952. Après l'indépendance du Maroc, il a intégré la Radio marocaine. Constatant qu'une radio populaire ne peut être bien installée sans un service sportif, il s'est attelé à mettre en place ce service avec une vague de jeunes journalistes, tels son frère Ahmed, décédé il y a quelques années et feu Abdellatif El Bacha, feu Noureddine Guédira et feu Mohamed Zouine, ou encore Houcine Hayani, Mohamed Bennani et Mohamed Tarik. Le 3 mars 1962, Abdellatif El Gharbi a été nommé administrateur de la télévision marocaine jusqu'au mois de juillet 1964, avant de rejoindre l'Agence Maghreb Arabe Presse (MAP), en tant que rédacteur en chef, de 1975 à fin 1976, pour regagner ensuite la RTM. En 1977, il est nommé au cabinet du ministre de l'Information, El Arbi Khattabi jusqu'en 1978, avant de devenir chef du cabinet de feu Maâti Bouabid, Premier ministre et ministre de la Justice, puis chef de cabinet du ministre de la Jeunesse et des Sports, Abdellatif Semlali (de 1981 à fin 1984). El Gharbi, devenu interprète-traducteur assermenté, a assuré la présidence de l'AMPS de 1971 à 1989.