Traditionnellement qualifié de parti des riches, les conservateurs britanniques ont choisi d'axer leur campagne pour les élections législatives du 6 mai prochain sur le thème du changement dans une tentative de reconquérir le pouvoir qu'ils avaient quitté il y a 13 ans. Par Abdelghani Aouifia Porté à la direction du parti en 2005, David Cameron (44 ans) semble avoir réussi à redorer le blason de ce parti, en hissant sa cote de popularité dans les sondages, bénéficiant de la perte de vitesse de ses rivaux travaillistes. Cameron a multiplié les sorties médiatiques depuis qu'il a pris les commandes des tories, se présentant comme un orateur aussi habile qu'éloquent dans le but de faire oublier aux électeurs l'image rigide dont le parti a hérité depuis le mandat l'ancien Premier ministre Margaret Thatcher (1979-1990). Nombreux sont les commentateurs qui présentent Cameron comme "le Tony Blair" des Tories, une comparaison qui fait le parallèle entre les efforts des deux dirigeants de renouveler les structures de leurs formations et les rendre en phase avec un électorat de plus en plus exigeant. Or, le rêve du jeune politicien tory de conquérir le 10 Downing Street risque de trébucher sur certains points dont son manque d'expérience et son appartenance à une classe sociale taxée de "snobe". Contrairement à son rival Gordon Brown, Premier ministre sortant et chef des travaillistes, qui a fait prévaloir dès l'annonce de la date du scrutin, ses origines modestes dans une tentative de gagner la sympathie des électeurs notamment ceux la classe moyenne, Cameron trouvera du mal à faire oublier aux électeurs ses origines jugées "trop aristocrates". Fils d'un riche financier et de la fille d'un baron, Cameron a été éduqué dans le collège privé d'Eton (ouest de Londres), le plus prestigieux du pays, avant de rejoindre la célèbre université d'Oxford où il obtient des diplômes en philosophie, sciences politiques et économie. Si le programme électoral du parti conservateur ne diffère pas de celui de son rival travailliste au niveau de la politique étrangère du Royaume-Uni, le parti de l'ancienne dame de fer tente de capitaliser sur "les défaillances" du labour notamment au niveau de la gestion du déficit budgétaire. Ce déficit devra atteindre cette année des niveaux record, qui amèneront le parti qui sortira vainqueur du scrutin du 06 mai à opérer des réductions avec un coût non négligeable sur les secteurs clefs de l'emploi et des services publics. Contrairement aux travaillistes qui se gardent de toute réduction prématurée des dépenses publiques, les conservateurs promettent une action rapide pour relancer l'activité économique sans pour autant compromettre la stabilité de l'économie. Pour ce faire, les tories s'engagent à présenter dans les 50 jours qui suivent les législatives un budget étayant les mesures visant à réduire le déficit budgétaire. Ce programme, affirment les conservateurs, entourera les secteurs clefs de la santé et de l'emploi des protections requises. Les Tories, tout en rappelant que le gouvernement travailliste assume la responsabilité dans la situation économique actuelle du pays, avertissent que des réductions seront inéluctablement opérées, dont un gel des salaires du secteur public pendant une année et des réductions des salaires des ministres et des membres du parlement. Au niveau financier, les conservateurs devront introduire une taxe sur les banques sans attendre un accord international sur cette question, comme revendiqué par le parti travailliste. Ils promettent également de renforcer la place de la City (quartier financier de Londres) en tant que hub de la finance internationale. Conscients que la bataille électorale sera des plus serrées avec les travaillistes, les conservateurs, crédités dans les sondages d'une avancée de 2 à 8 points par rapport à leurs challengers, ont énormément investi dans les circonscriptions dites marginales. Ces circonscriptions, situées principalement au centre de l'Angleterre, se distinguent par leur caractère indécis, les électeurs pouvant basculer en faveur de l'une des deux grandes formations du pays. Des sondages publiés récemment ont montré que la formation tory dispose d'une importante avance dans ces circonscriptions par rapport au labour, parti qui disposait d'un grand capital de soutien dans ces régions sous l'ancien Premier ministre Tony Blair (1997-2007). Par ailleurs, les analystes britanniques estiment que la performance des dirigeants des deux partis lors de la première séance des débats télévisés, qui sera diffusée jeudi, sera cruciale. D'après un sondage de l'institut Ipsos MORI, Six votants sur dix dans 54 des circonscriptions marginales ont indiqué que ces débats leur permettront de décider pour quelle formation ils voteront le 6 mai. Les médias britanniques avancent que la majorité de l'électorat britannique, estimée à environ 45 millions de personnes, devront suivre la séance tant attendue de jeudi.