L'Union européenne "doit soutenir" le plan marocain d'autonomie au Sahara, la "seule option réaliste" de sortie de crise, a souligné l'institut européen "Thomas More". "L'UE doit soutenir la proposition marocaine d'autonomie, qui semble aujourd'hui la seule option réaliste de sortie de crise. Cette issue n'est envisageable que sur la base du plan marocain élargi afin de répondre à toutes les dimensions du conflit", indique le rapport de cet institut intitulé: "Pour une sécurité durable au Maghreb : une chance pour la région, un engagement pour l'Union européenne", présenté mercredi soir à Bruxelles. En effet, la proposition marocaine, présentée au secrétaire général de l'ONU en 2007, prévoit la mise en place d'organes législatif, exécutif et judiciaire au niveau local, dont la compétence portera sur de nombreux domaines, affirme le document, ajoutant que "la voie des négociations directes entre les protagonistes, y compris en y associant l'Algérie, doit être privilégiée et soutenue par l'UE". Les dernières négociations informelles entre le Maroc et le "polisario", qui se sont déroulées en février dernier près de New York en présence de l'Algérie et de la Mauritanie, sont "encourageantes", estime l'institut Thomas More qui voit dans la décision des parties de se revoir prochainement "une avancée qu'il convient d'appuyer". Pour l'institut européen, ce conflit, vieux de trente ans, occupe le "premier rang" des blocages de la coopération dans la région du Maghreb, ajoutant que les enjeux de sécurité appellent également le renforcement constant de la coopération régionale, que l'UE se doit d'appuyer et de soutenir. "Chacun connaît les freins que constituent certaines tensions interétatiques au développement de cette coopération pourtant indispensable", lit-on dans le document. L'institut souligne, en outre, que l'attachement de l'Algérie aux principes d'autodétermination "s'accompagne d'un intérêt géoéconomique majeur que constituerait une voie d'accès sur l'Atlantique et la nécessité de demeurer cohérent avec un discours qui n'a pas évolué depuis 30 ans". Pour le Maroc, précise la même source, "le maintien des provinces du Sud renvoie au principe fondamental d'intégrité territoriale, le Royaume ne peut donc consentir à une amputation conséquente de son territoire". Quant au Front Polisario, il campe sur ses positions de peur de "voir disparaître sa raison d'être", mais au prix du maintien des réfugiés depuis 30 ans "dans l'exil dans les camps pour rien", souligne le rapport. Et de poursuivre : "le déclin du Polisario, qui a perdu ses soutiens politiques et idéologiques de la guerre froide, fait également craindre un effondrement de l'organisation fragile des camps : la corruption au sein de la RASD, dirigée exclusivement par le polisario, le clientélisme appliqué dans l'attribution de l'aide humanitaire internationale, la monopolisation du pouvoir et l'immobilisme politique qui en découle sont de plus en plus mal acceptés par la nouvelle génération". Parallèlement, le Maroc développe de fait le Sahara depuis 1979, conférant aux populations locales un niveau de vie "évidemment bien meilleur que dans les camps", affirme l'institut européen. "Soucieux d'obtenir un consensus sur cet ambitieux projet, Rabat souhaite organiser un référendum de ratification du plan d'autonomie par les populations des provinces du Sud, et, compte tenu de la nécessité de réformer la Constitution du Royaume pour y intégrer le concept d'autonomie, réaliser également une consultation de l'ensemble du peuple marocain", poursuit le rapport. "Personne ne peut dire aujourd'hui si l'indépendance du Sahara constituerait une option viable, si ce territoire ne risquerait pas de se transformer en zone grise propice à tous les trafics, à la prolifération du terrorisme et in fine à la déstabilisation de la région", met en garde l'institut. Le rapport rappelle les déclarations du porte-parole du département d'Etat américain en 2008 selon lesquelles "un Etat Sahraoui indépendant ne pouvait être considéré comme une option réaliste", ainsi que celles de l'ancien représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara, Peter van Walsum, qui considère, quant à lui, qu'"il ne s'agit pas d'un objectif accessible". Le rapport relève qu'il est "en tout cas certain que la sécurité de la zone ne peut admettre un +failed state+, surtout si ce dernier sert de nouvel alibi pour renforcer les crispations et le maintien sous tutelle des sociétés maghrébines". Evoquant les frontières maroco-algériennes, le document estime que "la question plus globale de la fermeture des frontières entre l'Algérie et le Maroc, principal facteur de blocage du développement de la région depuis plusieurs décennies, doit également être posée et pourrait faire l'objet d'une attention toute particulière de l'UE dans le cadre d'une politique de promotion d'une intégration régionale enfin ambitieuse. De l'avis des auteurs de ce rapport, le défaut de coopération intramaghrébine et d'intégration régionale conduit à la situation de "non-Maghreb" et constitue l'une des principales faiblesses de la zone. "Si les domaines de coopération (énergie, transports, développement durable) sont connus et riches de potentialités, force est de constater que le chemin vers l'intégration sera encore long", écrit le rapport, ajoutant que cette intégration "constitue pourtant, sinon un préalable, du moins une condition essentielle de la sécurité durable des cinq pays concernés mais aussi de l'UE, car elle constitue la seule garantie de la maîtrise des espaces clés de l'Afrique du Nord". Le rapport de l'institut Thomas More, basé sur de nombreux entretiens avec des responsables, des acteurs de terrain et des spécialistes de la région, et sur un voyage d'étude au Maghreb, a été réalisé par une équipe de chercheurs pluridisciplinaires.