LA GRAINE ET LE MULET, film d'Abdellatif Kechiche, Première montréalaise, Le cinéaste français d'origine tunisienne, Abdellatif Kechiche, est venu présenter à Montréal le 30 juillet dernier son plus récent film : La graine et le mulet, au Cinéma Imperial, devant une salle archi-pleine.
Tourné dans le port de la ville de Sète, en France, ce film qui a raflé tous les prix depuis sa sortie, s'attarde sur le destin particulier d'un vieil immigré maghrébin, Slimane , qui cherche à redonner un sens à une existence un peu terne, surtout après la perte de son emploi.
Divorcé mais entouré d'une famille nombreuse et exubérante, il réunira tout son clan autour d'un projet un peu fou de l'ouverture d'un restaurant arabe à l'intérieur d'un vieux bateau abandonné. Il sera aidé dans sa démarche pour faire face aux complexités de la bureaucratie française, par sa belle-fille Rym, rôle interprété avec force par la jeune actrice Hafsia Herzi, qui réussit à casser le cliché de la femme soumise et nous réservera une fin lumineuse sur l'espoir, la détermination et la célébration de la vie. D'ailleurs ici, les femmes musulmanes ont le haut du pavé. Elles prennent la parole, ont le dernier mot, et sont le phare et le guide de tous et chacun.
La caméra du réalisateur aime s'attarder longuement sur les détails de la vie quotidienne, un petit geste, un regard qui en dit long, la préparation d'une cuisine savoureuse par l'ancienne épouse et mère des enfants, la dégustation du couscous dans l'ambiance conviviale et familiale d'un repas partagé le dimanche, l'interminable crise de larmes de l'épouse délaissée, et même l'éducation à la propreté de la petite dernière.
« J'avais envie de montrer le côté ordinaire des personnages que je décris. J'ai réuni des gens qui ne se connaissaient pas, pour en faire une famille. La plupart ne sont pas des acteurs professionnels, mais grâce à leur travail, reflètent davantage une impression de vérité », nous livre le réalisateur. « Parce que dans toutes les familles du monde, il y a un repas le dimanche, qu'on y serve du couscous ou autre chose ».
Malgré certaines longueurs, surtout au début, ce climat de vérisme est largement atteint par A.. Kechiche qui brosse un tableau implacable de la condition humaine. Tous les sujets y passent, que ce soit le racisme et l'hypocrisie de la société d'accueil, dite française, la recherche de la réalisation de soi, la fidélité aux valeurs familiales, l'amour et la trahison. Et quand le rideau se lève sur la dernière image, on aurait envie d'y ajouter notre note personnelle pour conclure chacun dans notre imaginaire une fin heureuse ou malheureuse à cette quête incessante de bonheur parmi ces destins entrecroisés.
Solange Lessard, Maghreb-Observateur Le film est à l'affiche dans les salles à Montréal, Québec, Sherbrooke, Sainte-Adèle et Gatineau. Visionnez la bande annonce du film