La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est d'avis que la récitation d'une prière en début d'assemblée publique du conseil municipal de Ville de Saguenay contrevient à l'obligation de neutralité des pouvoirs publics et a pour effet de porter atteinte, de façon discriminatoire, à la liberté de conscience et de religion de deux citoyens qui avaient déposé des plaintes à ce sujet. « Les membres d'un conseil municipal sont des représentants de l'Etat, » rappelle M. Gaétan Cousineau, président de la Commission. « Ils ont droit à leurs croyances personnelles mais, dans l'exercice de leurs fonctions publiques, ils ne doivent pas favoriser ou donner l'impression de favoriser une religion plutôt qu'une autre. Les affaires municipales sont des affaires purement civiles. » Jurisprudence claire Le jugement de septembre 2006 du Tribunal des droits de la personne dans le dossier de Ville de Laval établit nettement, rappelle la Commission, que la récitation d'une prière en assemblée publique d'un conseil municipal contrevient à l'obligation de neutralité de l'Etat en matière religieuse et entraîne un préjudice discriminatoire en contraignant des personnes à participer à une pratique religieuse à laquelle elles n'adhèrent pas. La Commission choisit, cependant, d'user de la discrétion que la Charte des droits et libertés de la personne du Québec lui accorde (art. 84) de ne pas porter ce dossier devant un tribunal. Elle estime qu'il n'est pas dans l'intérêt public qu'elle consacre des ressources additionnelles à un débat où, pour le moment, la jurisprudence est sans équivoque. Cette décision de ne pas saisir un tribunal permet toutefois aux plaignants de s'adresser directement, s'ils le désirent, au Tribunal des droits de la personne. Recommandation aux municipalités Plus largement, la Commission croit qu'il n'est pas dans l'intérêt public que cette question de droits de la personne ne trouve une solution qu'au terme d'un processus de multiplication aléatoire de plaintes. Elle estime que ce dossier devrait être traité par les associations de municipalités puisque la récitation d'une prière en assemblée publique relève de la réglementation ou de la décision des municipalités elles-mêmes. C'est pourquoi, dans une lettre adressée à la Fédération Québécoise des Municipalités et à l'Union des municipalités du Québec, elle recommande aux municipalités où se récite encore une prière en début d'assemblées publiques de s'interroger sérieusement sur l'opportunité et la légalité de cette pratique compte tenu de leur obligation de neutralité en matière religieuse et de la jurisprudence en cette matière. Le jugement du Tribunal dans l'affaire Ville de Laval, rappelle-t-elle, comportait une ordonnance de cesser la récitation de la prière et il n'a pas été porté en appel. Montréal, le 15 mai 2008.