Dans une circulaire du chef du gouvernement adressée aux ministres, secrétaires d'Etat et hauts commissaires, il leur est demandé d'élaborer des propositions budgétaires pour la période 2020/2022 dans une perspective de rationalisation des dépenses. L'approche est à saluer en soi et c'est ce qui aurait dû être fait depuis le début du mandat de l'actuel gouvernement, si ce n'est que cette circulaire précise que l'objectif du gouvernement est de réaliser un taux de croissance moyen de 4% en ce laps de temps, ce qui est bien plus que modeste. Tous les économistes marocains s'accordent à dire que le pays a besoin d'un taux de croissance de quelque 6 à 7% par an pour parvenir à résorber progressivement le chômage. Car il s'agit non seulement d'arriver à caser les nouveaux venus sur le marché de l'emploi, mais également d'absorber le stock des chômeurs. D'autre part, ce n'est pas avec un petit 4% de progression annuel du PIB que le Maroc peut prétendre s'affirmer comme pays émergent, les pays ayant acquis ce statut affichaient des taux de croissance à deux chiffres pour ce faire. Il faut rappeler les maigres performances de l'actuel gouvernement pour se rendre compte de l'ampleur de l'inefficience des politiques mises en œuvre par celui-ci et son incapacité à réaliser les nécessaires réformes pour dynamiser les activités économiques. Au lieu d'un mouvement ascendant, c'est à un ralentissement de la croissance que les Marocains ont assisté l'année écoulée. De 4,1% en 2017, la progression du PIB a reculé à 3,5% au cours du premier semestre 2019 et s'est chiffrée à 3,1% au cours du second. En bon élève discipliné, le chef du gouvernement insiste dans sa circulaire sur le respect de l'orthodoxie budgétaire et la maîtrise des dépenses publiques, de manière à ne pas déplaire aux institutions de Bretton Woods. Mais il évite les questions de fond, autrement plus importantes pour améliorer les indicateurs de performance. L'économie marocaine est, jusqu'à présent, dépendante de la générosité du ciel en termes de pluviométrie, une tare qu'elle traîne depuis des lustres et que le gouvernement n'est pas parvenu à éliminer. Sachant que les précipitations pluviométriques sont assez réduites, cette année, les prévisions de croissance tablent sur un taux de 2,9%, selon la Banque Mondiale et le HCP. Le plan d'accélération industrielle n'est parvenu ni à rehausser significativement le volume des exportations, ni à couvrir les besoins du marché national en substituts aux produits importés, le déficit structurel de la balance commercial en étant la preuve cinglante. Les investissements publics génèrent de moins en moins de croissance et de création d'emploi, un problème qui se doit d'être examiné attentivement afin d'en expliciter les causes et d'inverser la tendance. L'économie marocaine ne produit que peu d'emplois qualifiés et de produits à haute valeur ajoutée. Le taux de chômage demeure rigide dans sa position, toujours aux alentours du dixième de la population active, 23% des jeunes citadins et 16,5% des diplômés étant sans emploi. Nul besoin d'être un Prix Nobel en économie pour comprendre que le chef du gouvernement se nourrit d'illusions s'il escompte hausser le taux de croissance du PIB à un niveau décent sans avoir préalablement trouvé solutions aux difficultés qui entravent le dynamisme de l'économie marocaine et mené les réformes pouvant redresser la situation. Au vu des dissensions qui déchirent les rangs de la majorité et en l'absence de vision à long terme chez l'actuelle équipe gouvernementale, ce n'est pas demain la veille que l'économie marocaine va crever le plafond du taux de croissance à deux chiffres. Ahmed NAJI