M. Abderrahim Hozal, éditeur, directeur de la collection « La Mémoire retrouvée »,a bien fait de rééditer ce précieux ouvrage épuisé depuis belle lurette et ce , à cause de son contenu historique important concernant notre capitale administrative, Rabat ainsi baptisée au début du vingtième siècle (1918) par le Maréchal Lyautey... Ce livre nous intéresse à double titre : il raconte avec brio et un style académique les traditions multiples des habitants de la ville et de ses banlieues, comme la ville de Salé. Avec une objectivité non dépourvue d'humorisme , il décrit les jours et les nuits de Rabat, les après midi de Salé la voisine, ensuite les fêtes religieuses , les MOUSSEMS( les foires) et les mystères de multiples saints marabouts... En 180 pages éditées à Dar Al Amane de Rabat, on lit avec plaisir et délice cet ouvrage du début jusqu'à la fin et ce ,sans relâche. C'est parce qu'Il y a tant d'expressions amusantes écrites avec un vocabulaire riche ,qui s'enchaînent considérablement . C'étaient les habitudes coloniales des frères journalistes :Jean et Jérôme Tharaud invités au MAROC par le Résident Maréchal de France, Hubert Lyautey qui le leur a recommandéd'écrire sur Rabat , avant d'écrire dun autre livre qui décrit les traditions des Fassis sous le titre : »Les Bourgeois de l'Islam « dont je parlerais une autre fois ..C'est pour Lyautey une nécessité de savoir comment gouverner ces Rabatis et ces Slaouis et ce , avec l'aide constante du Sultan... Notre présent ouvrage que je commente est à mes yeux ,un vrai conte oriental à la fois tendre et guerrier. Les THARAUD n'omettent pas de citer du temps de la piraterie , les noms célèbres des captifs des corsaires rabatis et slaouis , tels que l'Espagnol Cervantès , l'auteur de « Don Quichotte de la Mancha « et de l'Anglais Daniel DELAFOE , auteur du personnage « Robinson Crusoe. Ces derniers furent libérés , comme on le sait , sous caution, en monnaies sonnantes et trébuchantes .Pour les Tharaud , les villes de Rabat (Ribat El Fath )et de Salé ( la Barbaresque) sont prodigieusement blanches des Mille et Une nuits , qui se ressemblent avec leurs minarets, leurs jardins , leurs murailles , leurs tours et leurs grands cimetières, pareils à de vastes tapis de pierres grises étendus au bord de la mer, quoique les habitants de la vieille époque ne s'aimaient pas à cause de leurs guerres civiles d'antan entre eux : les Moriscos de RABAT et les Hornacheros de Salé , descendants expulsés tous les deux de l'Andalousie . Les frères Tharaud n'omettent pas de citer à ce sujet le proverbe courant : » Même si la rivière Bouregreg qui sépare les deux villes , était de lait et si chaque grain de sable était de raisin sec, un Rabati et un Slaoui ne se réconcilieront jamais... » Aussi ,les marabouts et les saints n'ont –ils pas échappé aux plume des Tharaud :Sidi Haddi , Sidi MOUSSA , des errants qui ne vivaient que d'aumônes , des gens ruinés par un CaÏd , dépouillés par un Cadi , trompés par une femme et qui , dégoûtés des hommes , se réfugiaient dans le vagabondage...Ils n'attendaient plus du secours que du hasard et de bonheur que du kif (une plante qui drogue) qu'ils fumaient sans arrêt dans leurs pipettes sacrées et dirigent des prières Jérôme et Jean Tharaud n'oublient pas dans ce livre de citer les confréries de RABAT-Salé :les AÏssaouas , les Hmadchas , les Kadiris , les Gnaouas qui jouaient un rôle considérable au cours du XIX ème siècle en leurs chefs respectifs : Moulay Larbi Ben Aïssa de Meknès , Sidi Ali Ben Hamdouch de Zerhoune, Abdelkader Jilali de Baghdad, etc...Ils n'omettent pas de citer et de décrire les fêtes des Fantasias qui s'adonnent au jeu de la guerre et de la poudre, les décrivant avec un style homérique en criant :ODieu , O Prophète , en mettant en joue un ennemi imaginaire, déchargeant leurs armes tous ensemble... Ce livre cite les Houris, les sorciers , les gazelles de femmes avec leurs bouches aux lèvres charnues , ce qui enchante le lecteur.. Vers la fin du livre, on passe au sérieux : les cérémonies qui accompagnent l' apparition du Sultan Moulay Youssef en compagnie du Résident français , le Maréchal LYAUTEY ,protecteur du Maroc des guerre tribales qui ne tarissaient pas .Il décrit aussi les ruines du Chelleh de Rabat qu'on baptisait du nom de » la dame des raisins enchantés » qui enfermaient des trésors sous ses broussailles que cherchaient les berbères soussis à découvrir pour s'enrichir .Les ruines du Chellah connaissaient jadis les tentes des Rabatis plantées chaque vendredi pour jouer à la mandoline, en chantant l'Andalousie perdue...entre autres verts que je cite : « Ô regrets de l'Andalousie. Arrêtez de me faire souffrir encore « j'ajoute aussi : »Nous avons passé les beaux jours à Grenade, ville de plaisirs , entre les roses et les bourgeons , nous avons passé toute la soirée. Ô regrets d'avoir quitté les demeures de l'Andalousie. Arrêtez de me faire souffrir.... En conclusion , je vous recommande de lire ce livre parce qu'il reste beau et précieux dans la littérature francophone marocaine .