Adieu le stade du Marshane ! Adieu le grand souvenir de l'enfance des Tangérois ! Adieu, l'école où nous avons appris le football où nos pères ont vu jouer Larbi Ben Barek, Lahcen Chicha, Mustafa Bettach et Hassan Akesbi. Adieu le stade où nous avons pu apprécier le talent de Carlos Gomez, Santi, Uceda, Settati, Laâroussi, Rubio... Cet article n'est autre qu'un vibrant hommage et une consolation aux milliers d'amateurs du ballon qui vont se séparer définitivement de l'un des meilleurs « stadium » du Maroc avec un gazon naturel, un éclairage des plus modernes et une piste d'athlétisme aux dimensions internationales. Une mauvaise nouvelle pour les Marocains, pour les Tangérois et surtout pour l'IRT, la RST et les modestes clubs de la Ligue du Nord. Le stade du Marshane a été démoli pour répondre aux exigences des projets de Tanger Métropole ou Tanger Al Kobra. « Réaménagement de la place du Marshane avec la création d'un espace vert » est le titre de la plaque de la communauté urbaine placée cette semaine. On l'appelle la plaque de la « mort », la plaque de la « tristesse » ou la plaque de la « honte ». Il s'agit d'un patrimoine de la ville construit en 1937 à l'image du théâtre Cervantès, des cinémas Alcazar, Capitol et Lux disparus incompréhensiblement. Personne ne comprend ce qui se passe à la mairie où il semble que les élus ne sont au courant de rien et ignorent tout de la prochaine Tanger Métropole. Lors du premier contact avec la presse tangéroise, le maire Bachir Abdellaoui avait bien expliqué, lors d'un point de presse, qu'en dépit du réaménagement de la place de Marshane, le stade serait « intouchable ». Ce qui rend « l'affaire » plus délicate, c'est que la première autorité de la communauté urbaine est un ancien originaire du quartier Marshane et ex joueur de football du championnat de la Ligue du Nord. Bachir Abdellaoui connait bien le problème de l'infrastructure sportive de la ville et les difficultés que rencontrent les modestes clubs de la troisième division. Autrefois, Tanger avait trois stades de football pour une population de 100.000 habitants (Marshane, Souani et Pradal). A nos jours, elle en a seulement deux (complexe du Grand Stade et Souani une propriété espagnole) pour une population d'un million d'habitants. L'on se souvient que la démolition du Marshane datait de l'an 2000 au moment de la construction de la route du bord de la mer Merkala. L'association des journalistes sportifs de Tanger avait fait des démarches fructueuses auprès des élus pour arrêter le projet. Il a fallu attendre plus d'une quinzaine d'années pour voir cette idée devenir une réalité. Il est impensable, inadmissible et intolérable de voir le grand quartier du Marshane privé de son stade, de son café Halafta et de son petit « campo », une véritable école des grands footballeurs tangérois. Premier complexe gazonné avec Saniat Rmel de Tétouan, le stade du Marshane rivalisait avec les anciens stades sablonneux de terre rouge du Royaume : Les FUS, Ahmed Chhoud de Rabat, et les Père Jégo, stade Philippe de Casablanca. Maintenant, il est en ruines, une triste image et les vieux tangérois n'oublieront jamais qu'à partir de ce complexe, l'écho « indépendance » se fit entendre pour la première fois en 1948. Deux talentueuses équipes y évoluaient : La Union Deportiva España et le Moghreb Al Aksa, la première incarnait l'occupation espagnole et la seconde la libération du Maroc. Sans aucun doute, le 5-0 en faveur du Moghreb le jour de la Noche Vieja en coupe d'Espagne en dit beaucoup. Adieu ! Adieu le stade de notre enfance.