Ahmed Maimouni est l'un des entraineurs marocains qui ont émigré à l'étranger à la recherche d'un avenir meilleur. Il fait partie d'une pléiade de techniciens qui ont acquis une riche expérience dans de grands clubs en Europe et dans le Golfe : Belarbi en Allemagne, Mohamed Maroc en France, Hassan Ajenoui au Portugal, Mohamed Najib en Espagne, Ammouta, Naciri, Slimani dans le Golfe. Originaire de Larache mais formé et éduqué à Tanger, il a une longue carrière footballistique de 38 ans en France et en Suisse. Au Maroc, il a dirigé la Renaissance de Settat de la belle époque. Déçu par l'esprit d'amateurisme qui sévit dans le pays, il a renoncé à renouveler cette expérience préférant le retour en Europe où il y a « beaucoup de sérieux en football ». Il est actuellement entraîneur du FC Laconnex à Genève une formation de deuxième division qui se trouve à un point du leader. Profitant de son bref séjour à la ville du Détroit à cause de la trêve hivernale du championnat helvétique, il a livré à «L'Opinion» ses impressions sur le football suisse, marocain, sur la sélection nationale : Q -Votre carte de visite ? R –Je suis entraîneur marocain en Suisse. Je suis à la direction technique du club de football de deuxième division le FC Laconnex. Nous disputons un championnat professionnel à trois groupes. Nous sommes à un point du leader et notre objectif est la montée en première division. La saison écoulée, nous avons terminé cinquième. Q–Comment évaluez-vous la deuxième division en Suisse par rapport au Maroc ? R–C'est à peu près la première division marocaine. Q–Où en est le football Suisse en général ? R–Il est situé dixième dans le classement mondial. Dans le pays, ce n'est pas le football de l'élite qui est important mais c'est le football de base qui est prioritaire. Il est impensable qu'il soit pauvre sur le plan financier. Q–Comment un pays à niveau de vie élevé ne donne pas de l'argent au football ? R–C'est la réalité. En Suisse, aucune entreprise n'investit en football. Les banques sponsorisent seulement l'équipe nationale, le ski et Roger Federer le champion du tennis. Elles pensent qu'ils sont l'image du pays. Les responsables du football dépensent plus d'argent dans la formation de base. Cela explique bien que les grandes vedettes du football mondial ne viennent pas au championnat helvétique. Par contre, on retrouve les meilleurs joueurs suisses dans tous les clubs européens. Q–Les joueurs professionnels ne sont-ils pas riches ? R-Absolument pas ! Les riches sont ceux qui partent à l'étranger. Ceux qui restent dans le pays ont un autre métier ou une autre profession auxquels ils doivent retourner après la retraite footballistique. Q –Vous suivez bien le football marocain. Qu'en pensez-vous ? R–Dans notre football, il existe une perte de temps, une perte d'énergie. Il est bien dommage que tout est à refaire sur tous les plans. Je remarque que tout se fait à l'envers dans les clubs. Puis le problème de la formation de base est à l'ordre du jour. On ne peut parler de progrès que dans le domaine de l'infrastructure sportive. Les stades construits rivalisent avec ceux de l'Europe. Q – Et le championnat Elite-Pro, comment l'évaluez-vous ? R – Il s'agit d'un championnat irrégulier où le spectacle est totalement absent. Il manque d'identité et de crédibilité. Un championnat avec beaucoup d'improvisation et d'instabilité. Pourtant les moyens financiers, le sponsoring et le parrainage existent. Q – Où est le vrai mal dans ce championnat ? R–Le manque de créativité, de la vision des objectifs et surtout le manque d'analyse de la situation. Q–Est-ce la faute des dirigeants ? R–Ils n'ont rien à voir avec le problème. Je pense que les responsables sont les décideurs du pays : gouvernement, ministère de la Jeunesse et Sports, conseils élus. Il n'y a pas de personnalité de la culture footballistique marocaine. C'est la politique du sport qui doit changer. La formation en sport est marginalisée totalement. Q-Que pensez-vous de la sélection ? R–La sélection nationale est l'image du football marocain actuel. « Tel père, tel fils » est l'exemple qui relate la réalité. L'histoire des joueurs binationaux (avec deux nationalités) et nationaux est inconcevable. Il ne doit exister qu'une seule équipe : le Maroc. En plus, les joueurs nationaux de Fakhir ne passent jamais à la première équipe de Zaki et manquent de compétitive. Il est anormal qu'un footballeur marocain local ne dispute que 25 rencontres en une saison.