L'Arabie saoudite a pressé, dimanche 12 avril, l'Iran de cesser d'"armer" les rebelles chiites qui résistent à sa campagne de bombardements aériens conduite depuis 18 jours au Yémen, où les évacuations d'étrangers se multiplient. La situation ne cesse de se détériorer dans ce pays pauvre de la péninsule arabique, où les combats et raids aériens de la Coalition arabe, menée par Ryad, ont fait plus des centaines de morts et des milliers de blessés en trois semaines, selon l'ONU. Tout en soulignant que son pays n'était pas "en guerre avec l'Iran", le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud Al Fayçal, a souhaité que Téhéran cesse d'"aider aux activités criminelles des Houthis contre le régime légitime du Yémen", réclamant l'arrêt de ses "livraisons d'armes". Les rebelles chiites, partis en septembre 2014 de leur bastion de Saada, dans le nord du Yémen, contrôlent désormais la capitale Sanaa, des régions du centre et de l'ouest, ainsi que des parties de la ville d'Aden, d'où s'est enfui le président Abd Rabbo Mansour Hadi. L'Iran chiite a toujours nié envoyer des armes aux rebelles Houthis, mais les responsables saoudiens ne cessent de répéter cette accusation. "Nous avons des preuves suffisantes selon lesquelles l'Iran soutient, arme et forme les miliciens", a ainsi déclaré, samedi 11 avril, le porte-parole de la coalition arabe, le général de brigade Ahmed Assiri. Le prince Saoud a défendu l'intervention militaire de la coalition de neufs pays arabes lancée le 26 mars: Ryad est intervenu "à la demande du président légitime du Yémen", M. Hadi, a-t-il insisté, en accusant l'Iran d'avoir "exacerbé le problème, ce qui a conduit à une augmentation de la violence". Son homologue français, Laurent Fabius, venu à Ryad exprimer son soutien, a fait part de la disponibilité de Paris à trouver une solution au Yémen. Il "faudra qu'à un moment ou à un autre, on arrive à une négociation", a-t-il dit. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a plaidé lui aussi pour une reprise des négociations de paix et un arrêt de toutes les opérations militaires dans le pays. 120 frappes aériennes par jour Dans le même temps, pour la dix-huitième journée consécutive, les avions de la coalition ont continué, dimanche 12 avril, de bombarder des cibles rebelles à travers le Yémen. Les frappes "vont se poursuivre", a martelé, samedi, le général de brigade Assiri. Selon lui, la campagne, qui totalise 1.200 raids, est allée crescendo, passant de 35 à 50 frappes par jour, puis à 80 et, finalement, à 120. Ces raids ont neutralisé les capacités aériennes et balistiques des rebelles et de leurs alliés, des militaires restés fidèles à l'ex-président Ali Abdallah Saleh, a assuré le haut gradé saoudien. Les habitants de Sanaa ont fait état, dimanche, de plusieurs bombardements de camps militaires tenus par les Houthis et des soldats pro-Saleh aux alentours de la capitale. A Aden, le palais présidentiel d'Al-Maachiq a subi trois séries de raids qui ont fait six morts parmi les Houthis qui le contrôlent, selon une source militaire. Un camp militaire d'Ibb, dans le centre du pays, a été également pris pour cible, pour la première fois, selon des habitants. Les combats affectent 15 des 22 provinces du pays. Les bombardements de la coalition et les combats dans le Sud ont fait 27 morts dans la nuit de samedi à dimanche, dont des civils, selon un bilan fondé sur diverses sources. Dans la nuit également, une attaque de drone, "probablement américain", a visé à l'ouest de Moukalla (sud-est), une voiture de membres présumés d'Al-Qaïda, faisant six morts, selon un responsable provincial. Al-Qaïda a profité du chaos pour prendre, le 2 avril, le contrôle de Moukalla. Alors que le conflit fait chaque jour de nouvelles victimes, notamment civiles, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé, dimanche, avoir procédé à sa première évacuation par les airs de 143 ressortissants étrangers bloqués au Yémen. "L'opération a été un succès et ouvre la voie à de nouvelles évacuations de plus de 16.000 ressortissants de pays tiers bloqués", a indiqué l'OIM, précisant que ce premier vol était parti de Sanaa à destination de Khartoum, capitale du Soudan. L'OIM, à qui 38 pays ont demandé de l'aide pour évacuer leurs ressortissants, a dit espérer "d'ici la semaine prochaine plusieurs rotations quotidiennes entre Khartoum et Sanaa". Deux avions russes ont de leur côté évacué plus de 350 personnes vers Moscou, tandis qu'un navire militaire russe en a évacué plus de 300 autres vers Djibouti, la moitié étant des étrangers.