Le Conseil de sécurité de l'ONU devait se réunir, samedi 4 avril, afin de discuter d'une proposition russe d'instaurer des « pauses humanitaires » au Yémen, où la Coalition arabe, menée par l'Arabie saoudite, bombarde depuis plus d'une semaine les positions des rebelles houthis qui se sont emparés de vastes régions du pays. Une situation dont cherche à profiter Al Qaïda, bien implantée depuis longtemps dans ce pays. La Russie a demandé cette réunion du Conseil de sécurité au moment où l'ONU et les organisations humanitaires s'inquiètent du nombre croissant de victimes civiles dans les combats au sol et les raids de la Coalition. Les rebelles houthis ont envoyé plusieurs centaines de combattants dans le sud-est du pays, à Hadramaout, une ville voisine d'Aden, qu'ils ont été forcés d'évacuer. Sous la pression des raids menés par l'Arabie saoudite, les rebelles houthis avaient, en effet, dû battre en retraite à Aden, dans le sud du Yémen. Après la prise du palais, dernier symbole de l'État qui n'était pas aux mains des Houthis, les comités populaires, une force paramilitaire qui soutient le président Abd Rabbo Mansour Hadi, ont été engagés dans de violents combats avec les rebelles, selon des sources venant des services de sécurité. Parallèlement, Al-Qaïda a pris le contrôle d'une importante base militaire dans le sud-est du pays. Alors que l'opération militaire arabe, menée par l'Arabie saoudite afin d'empêcher les rebelles chiites houthis de prendre le pouvoir au Yémen, semble porter quelques fruits, Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) étend sa mainmise dans le sud-est du pays. Des milices tribales ont pénétré, samedi 4 avril, dans la ville côtière de Moukalla, au Yémen, afin de la reprendre à des combattants d'Al Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), qui s'en s'en était emparé deux jours avant, rapportent des habitants. Les miliciens, appartenant à une alliance d'organisations tribales de la province d'Hadramaout, sont entrés dans Moukalla à bord de pickups et ont promis de rétablir la sécurité dans la ville. Les islamistes ont chassé les forces gouvernementales de la localité, pillé des bâtiments, pénétré dans plusieurs banques et libéré 150 détenus de la prison locale, dont un important dirigeant d'Aqpa, Khaled Batarfi. Les milices ont déjà pris le contrôle de deux bases militaires désertées par l'armée régulière, plus à l'est le long de la côte, à Chihr et à Riyan. Le retrait des militaires de Moukalla, après une brève résistance, a illustré l'effondrement de l'autorité centrale dans le pays. Ce vide politique et sécuritaire pourrait offrir à Aqpa l'occasion de s'enraciner plus solidement dans les régions enclavées de l'est du pays. Des forces spéciales saoudiennes sont impliquées dans l'opération militaire en cours au Yémen contre les rebelles chiites soutenus par l'Iran, a affirmé samedi un conseiller saoudien. L'armée et les forces spéciales de la marine saoudienne effectuent des opérations spécifiques, a noté le conseiller sans dire si ces troupes ont déjà opéré au sol. Les forces spéciales ont livré des armes et du matériel de communication aux partisans du président Abd Rabbo Mansour Hadi à Aden, la principale ville du sud, a déclaré le conseiller. Selon lui, les forces spéciales de la marine ont une mission de coordination et d'orientation pour permettre aux partisans de M. Hadi de répliquer aux rebelles. Appel à une pause humanitaire de 24 heures Elles vont poursuivre leurs engagements aux côtés de ces combattants, a-t-il encore dit, indiquant que l'armée et les forces de la marine avaient été impliquées dans les opérations contre les rebelles qui avaient envahi l'île de Muyn, dans le détroit de Bab al-Mandeb, par lequel transite une partie du commerce mondial. Vendredi, la coalition avait annoncé des raids aériens qui ont détruit sur cette île des équipements militaires et des missiles, qui auraient pu constituer une menace pour le trafic maritime. Les forces spéciales ont isolé l'île et l'opération se poursuit pour détruire ce qui reste de la présence des Houthis, a déclaré le conseiller. Par ailleurs, le comité international de la Croix Rouge (CICR) a lancé, samedi, un appel à une pause humanitaire de 24 heures au Yémen afin d'apporter un soutien médical à la population, s'alarmant de la situation dans le pays. "Malgré des efforts intenses et des contacts répétés durant la semaine avec toutes les parties au conflit, le personnel et les fournitures médicales dont ont désespérément besoin les populations n'ont pas pu être acheminés", a expliqué l'organisation internationale sise à Genève dans un communiqué. Le CICR a demandé à ce que toutes les voies aériennes, maritimes et terrestres soient ouvertes sans délai pour au moins 24 heures afin de pouvoir aider les populations qui ont été coupées des secours après plus d'une semaine de raids aériens et de combats au sol. "Nous avons urgemment besoin d'un arrêt immédiat des combats pour permettre aux familles dans les zones les plus touchées, telles que Aden, de sortir pour obtenir de la nourriture et de l'eau et accéder à des soins médicaux", a déclaré Robert Mardini, responsable des opérations du CICR au Proche et Moyen Orient, cité dans le communiqué. Quelques 48 tonnes de médicaments et de kits chirurgicaux attendent le feu vert pour partir pour le Yémen par avion ou par bateau, a indiqué le CICR, pointant que ceux-ci permettraient de traiter entre 2.000 et 3.000 personnes. Le CICR se tient également prêt à expédier des tentes, des générateurs et des équipements pour réparer les réseaux d'approvisionnement en eau endommagés, tandis qu'une équipe chirurgicale de quatre personnes est en stand-by à Djibouti en attendant d'être déployée à Aden. Les réserves de médicaments et d'équipements dans les hôpitaux et cliniques qui prennent en charge les blessés sont en train de diminuer dans le pays tandis que les populations souffrent de pénuries de carburant et d'eau alors même que les stocks de nourriture se raréfient. Trois volontaires du Croissant Rouge ont perdu la vie cette semaine après avoir été la cible d'attaque alors qu'ils venaient en aide à des blessés. Violences et bombardements ont fait 519 morts et près de 1 700 blessés en deux semaines, avait indiqué jeudi la responsable des opérations humanitaires de l'ONU Valerie Amos, qui s'était dite « extrêmement inquiète » pour la sécurité des civils piégés par les combats. L'Unicef avait rapporté pour sa part mardi qu'au moins 62 enfants avaient été tués et 30 autres blessés dans les combats au Yémen en une semaine.