En cette fin d'année 2014, le pays des hommes intègres ne finit pas de parler de lui. Après avoir démis de force Blaise Compaoré, voilà que le gouvernement de transition, issu de cette révolution du 31 octobre, ré-ouvre le dossier du journaliste Nobert Zongo, assassiné froidement le 13 décembre 1998 alors qu'il enquêtait sur le meurtre sous la torture de David Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, frère cadet de Blaise Compaoré. Son corps calciné fut retrouvé avec les dépouilles de trois de ses camarades le même jour à Sapouy, à une centaine de kilomètres de Ouagadougou. Et ce, au grand soulagement de la famille du défunt. C'est le Conseil des ministres, tenu le mardi 23 décembre 2014, en séance ordinaire, sous la présidence de Michel Kafando, Président de la Transition, Président du Faso, Président du Conseil des ministres, qui a délibéré sur les dossiers inscrits à son ordre du jour. Bien entendu, au cours de cette séance, le ministre de la Justice, des droits humains et de la promotion civique, Garde des sceaux a fait au Conseil une communication relative à la procédure de réouverture du dossier Norbert Zongo où il ressort que le Procureur général du Faso a été saisi pour la réouverture dudit dossier. Il faut dire qu'avec le dossier Thomas Sankara, c'était l'une des principales revendications des Burkinabè. Alors qu'en 2006, la justice avait déclaré un non-lieu et depuis, sa famille ne cessait de demander justice. Mais après le départ précipité de Blaise Compaoré, les choses sont allées plus vite puisque le 13 décembre dernier, lors du 16e anniversaire de sa mort, des milliers de Burkinabè avaient exigé la réouverture du dossier. Au cours de la même journée, des membres de la transition dont le Premier ministre Isaac Zida avaient également pris part à cette manifestation populaire. Poussé par la foule, l'officier supérieur de l'armée burkinabè avait affirmé avoir entendu le message « très clair » : « Le peuple veut la justice, alors justice sera rendue au camarade Norbert Zongo et sera rendue à tous ceux qui sont tombés sur les balles assassines du président Blaise Compaoré ». Ce qui se traduit aujourd'hui en acte. Né à Koudougou, il obtient son baccalauréat en 1975. Il est enseignant depuis 1971. Il enseigne à Pô et à Ouagadougou. Comme journaliste, il commence sa carrière en 1986 au sein de l'organe officiel Sidwaya puis au Carrefour africain. Il fonde en 1993 L'Indépendant ; il dénonce alors la corruption qui gangrène l'État et s'oppose au régime de Blaise Compaoré. Il aime à dire : « Le pire n'est pas la méchanceté des gens mauvais mais le silence des gens bien. » Cette attitude lui vaudra la foudre des sbires du pouvoir d'alors avant qu'ils ne l'exécutent sauvagement. Cédant au mécontentement populaire alors, le président Blaise Compaoré laisse une enquête judiciaire s'ouvrir. En sept ans d'instruction, un seul suspect, un adjudant de la sécurité présidentielle, a été inculpé, mais le témoin l'accusant s'est rétracté au cours d'une confrontation judiciaire. En août 2000, ce fut au tour de cinq membres de la garde présidentielle d'être inculpés du meurtre de Ouedraogo. Marcel Kafando, Edmond Koama et Ousseini Yaro, également suspectés dans l'affaire Zongo, furent reconnus coupables et condamnés à des peines de prison. Edmond Koama est décédé le 4 janvier 2001. Le procès Zongo s'est conclu par un non-lieu le 19 juillet 2006 qui a provoqué un tollé international. Aujourd'hui, la réouverture du dossier de l'assassinat de Nobert Zongo, par les autorités de transition, ne sera que juste rendue à cette figure de proue qui aimait tant le Burkina mais aussi, à travers lui, à tous les démocrates du Continent. Lesquels se battent au quotidien pour que gouverner ne soit pas plus une politique de purge, d'emprisonnement des opposants ou de l'assassinat de toute autre personne ayant une opinion contraire de celle du gouvernement en place. Car l'assassinat politique est le pire ennemi de la démocratie et de la bonne gouvernance. Et ça, l'Afrique n'en a pas besoin.