Tabaré Vazquez, qui fut le premier président de gauche d'Uruguay, a été élu dimanche 30 novembre à un nouveau mandat à la tête du pays. Ce cancérologue de 74 ans succède ainsi au truculent José Mujica. Sa haute stature couronnée d'une chevelure blanche, son style vestimentaire strict– il est rare qu'il apparaisse sans cravate– et son impassibilité tranchent avec la décontraction et l'originalité du président sortant, surnommé affectueusement «Pepe» par ses partisans. Socialiste et franc-maçon, Tabaré Vazquez, élu président pour la première fois en 2004, avait quitté le pouvoir en 2010 (la loi uruguayenne interdisant deux mandats consécutifs) avec un taux de popularité de plus de 60%. «Je viens d'un foyer très humble et j'ai pu étudier à l'école publique, au lycée public (...) je suis le produit de tout cela», déclarait récemment ce fils de famille ouvrière. Exemple de l'ascension sociale pré-dictature, il a été serveur et menuisier avant d'occuper un emploi administratif pendant ses études de médecine. Diplômé en 1969, il s'est spécialisé en oncologie après la mort, entre 1962 et 1968, de sa sœur, sa mère et son père d'un cancer. Il avait ensuite poursuivi ses études en France. Médecin, professeur et entrepreneur, il n'a jamais cessé d'exercer, même durant son mandat. Il a cette fois prévenu qu'il laisserait de côté son travail pour se consacrer à sa mission présidentielle. Il prendra ses fonctions le 1er mars. Lois anti-tabac Dirigeant pendant plus de dix ans d'un modeste club de football (Progreso), il adhère clandestinement au Parti socialiste en 1983, aux derniers jours de la dictature (1973-1985). Direct et charismatique, il est élu en 1989 premier maire de gauche de Montevideo, où vit près de 50% de la population d'Uruguay, puis président en 2005. Instigateur de réformes dans la fiscalité et la santé, il est à l'origine du Plan Ceibal, visant à fournir un ordinateur à tous les élèves, mais aussi d'un plan d'urgence sociale alors que le pays vivait sa pire crise économique (2001-2002). Il revient d'ailleurs au pouvoir alors que la région souffre d'un net ralentissement, ce qui devrait le contraindre à appliquer une certaine rigueur, notamment pour réduire l'inflation et le déficit budgétaire. Sous son mandat, son profil de cancérologue l'avait poussé à faire adopter de sévères lois anti-tabac qui vaudront au pays un procès du cigarettier Philip Morris. Il s'est d'ailleurs montré critique envers la légalisation du cannabis, votée en décembre 2013 à l'initiative de José Mujica, déconseillant la consommation de cette drogue douce et s'opposant à sa vente en pharmacie. En tant que président, il avait aussi créé la polémique avec son veto à une loi autorisant l'avortement, qui sera plus tard approuvée sous Mujica. Marié depuis 49 ans, père de quatre enfants et onze fois grand-père, il avait promis pendant la campagne qu'en cas de réélection, il continuerait à vivre dans sa résidence privée à Montevideo et de s'adonner à son plus grand plaisir avec ses amis: la pêche.