Les tensions sont de plus en plus vives en Cisjordanie, où des colons israéliens sont accusés d'avoir incendié une mosquée à proximité de Ramallah dans la nuit de mardi à mercredi. Aucun blessé n'a été signalé. L'escalade se poursuit entre Israéliens et Palestiniens. Une mosquée en Cisjordanie occupée a en effet été la cible d'un incendie criminel imputé à des colons israéliens, dans la nuit du mardi 11 au mercredi 12 novembre, selon des responsables de la sécurité palestiniens. «Des colons ont incendié tout le premier étage de la mosquée dans le village d'Al-Mougheir situé à proximité de la colonie israélienne de Shilo et d'une route réservée à l'usage des colons», a indiqué l'un d'eux en rappelant qu'en 2012 une autre mosquée de ce village avait déjà été incendiée. De son côté, le maire d'Al-Mougheir, Faraj al-Naasan, a estimé que «seuls des colons juifs pouvaient faire une chose pareille». Un porte-parole de la police israélienne, Micky Rosenfeld, a déclaré que des forces de l'ordre sont déployées autour de la mosquée mais que l'»agitation» en cours empêchait la moindre investigation. Depuis des années, des colons extrémistes ainsi que des activistes d'extrême droite se livrent sous le label «le prix à payer» à des agressions et des actes de vandalisme contre des Palestiniens, des Arabes israéliens, des lieux de culte musulmans et chrétiens, ou même l'armée israélienne. Un climat de plus en plus tendu En général, ce slogan est retrouvé près des lieux des exactions commises, ce qui n'a pas été le cas à Al-Mougheir, ont ajouté les responsables de la sécurité palestiniens. Cet acte criminel intervient alors que de fortes tensions règnent à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, où ont eu lieu des affrontements entre manifestants palestiniens et forces israéliennes ainsi que des attentats palestiniens dont le dernier a tué lundi une jeune femme israélienne près du bloc de colonies de Goush Etzion. L'armée israélienne a déployé des renforts en Cisjordanie, tandis que la police faisait de même sur l'ensemble du territoire israélien après un attentat meurtrier à Tel-Aviv. Mardi soir, une bouteille incendiaire a été lancée vers une antique synagogue de la localité arabe de Shfaram dans le nord d'Israël, a indiqué une porte-parole de la police en faisant état de peu de dégâts. Elle n'a pas précisé si la synagogue était toujours en activité. Les tensions sont également vives dans les localités arabes israéliennes, après la mort d'un jeune homme tué samedi par la police israélienne Israël redoute une troisième intifada Les inquiétudes des Palestiniens et des musulmans pour le statut de l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est ont cristallisé les colères. Le meurtre de deux Israéliens, poignardés lundi à Tel-Aviv et en Cisjordanie, fait craindre un nouveau soulèvement général palestinien. Feu de paille ou nouvelle intifada? Après quatre mois de violences presque ininterrompues dans les quartiers palestiniens de Jérusalem-Est, le gouvernement de Benyamin Nétanyahou ne peut plus éluder la question. Le meurtre de deux Israéliens, poignardés à quelques heures d'intervalle à Tel Aviv et dans le bloc de colonies du Goush Etzion (Cisjordanie), a ravivé lundi de bien douloureux souvenirs. Le nombre de victimes tombées au cours des dernières semaines demeure certes limité. Mais la «bande-son» si particulière des soulèvements passés est désormais dans toutes les têtes, observe l'éditorialiste Alex Fishman. «Vous n'avez pas encore eu le temps de vous remettre de l'attentat du matin qu'il vous faut déjà affronter le suivant», écrit-il dans le quotidien Yedioth Ahronoth. «Le sentiment général est que le pays est en train de perdre le contrôle des événements.» Après plusieurs années d'un calme relatif, la situation sécuritaire n'a cessé de se dégrader depuis le début de l'été. Le meurtre de trois étudiants juifs, suivi par celui d'un adolescent palestinien, a enclenché une spirale d'affrontements dans les rues de Jérusalem-Est. Des émeutiers souvent très jeunes y défient presque chaque soir les forces de police, qui ont procédé à plus 1000 interpellations. Une répression qui, loin de ramener le calme, semble avoir alimenté l'escalade. La guerre meurtrière à Gaza et les revendications conflictuelles autour des lieux saints ont ajouté à la colère ambiante. À deux reprises au cours des trois dernières semaines, des Palestiniens ont lancé leur voiture contre de petites foules massées à des arrêts de tramway, tuant quatre personnes dont un bébé de 3 mois. Le 29 octobre dernier, par ailleurs, un tireur arabe a grièvement blessé le rabbin d'extrême droite Yehuda Glick, qui milite de longue date pour l'accès des juifs à l'Esplanade des mosquées. À chaque fois, l'assaillant a été tué par les forces de l'ordre. «Notre grande difficulté est que toutes ces attaques étaient impossibles à prévenir, observe Yaakov Amidror, ancien conseiller national à la sécurité auprès du premier ministre. Elles ont été perpétrées par des terroristes isolés qui semblent avoir agi sur un coup de tête. Tout au plus peut-on soupçonner qu'ils ont été conditionnés par la propagande incendiaire du Hamas. Ce qui rend le travail de détection extrêmement difficile...» Tout aussi inquiétant, les violences jusqu'à présent cantonnées à Jérusalem semblent désormais en passe de se propager non seulement en Cisjordanie, mais aussi au centre et au nord d'Israël. L'attaque perpétrée lundi contre un soldat de 20 ans, près d'une gare de Tel-Aviv, a tout particulièrement marqué les esprits. L'auteur présumé des coups de couteau est un Palestinien de 18 ans, originaire d'un camp de réfugiés proche de Naplouse, qui avait franchi illégalement la «ligne verte». La police a aussitôt annoncé une vaste opération visant à contrôler et renvoyer en Cisjordanie les Arabes en situation irrégulière, tandis que les appels à terminer la construction de la «barrière de sécurité» se sont multipliés. «On ne sait pas encore si la troisième intifada a débuté», observe l'éditorialiste Ben Caspit dans le quotidienMaariv, «mais il est évident qu'il est devenu moins sûr de marcher dans la rue.» Hamas et le Djihad islamique affaiblis Certains observateurs, tel Yaakov Amidror, mettent en garde contre les comparaisons hâtives avec les deux précédents soulèvements palestiniens. «Je rappelle que 122 Israéliens ont été tués durant le premier mois de la deuxième intifada, indique-t-il, si bien que nous sommes encore loin du compte...» D'autres observent que le Hamas et le Djihad islamique demeurent, malgré leurs harangues répétées, trop affaiblis pour organiser un soulèvement en Cisjordanie. Ils soulignent en outre que le président de l'Autorité palestinienne, malgré ses critiques sans relâche envers Israël, ne semble pas prêt à engager une nouvelle confrontation. «Une intifada ne se décrète pas», corrige Hanan Ashrawi, haute responsable de l'Organisation de libération de la Palestine, qui s'inquiète de la «colère» et de la «frustration» de la population palestinienne. «S'il est vrai que nous espérons encore aboutir à une solution négociée grâce à nos démarches aux Nations unies, ajoute-t-elle, il est évident que le temps nous est compté.» Une façon de rappeler à Israël que la coordination sécuritaire assurée en Cisjordanie n'est pas intangible. Marouan Barghouti, l'un des responsables les plus populaires du Fatah, emprisonné en Israël, a pour sa part appelé mardi les Palestiniens à «poursuivre le choix de la résistance globale et armée».