Un pays qui respecte son Histoire met tout en oeuvre pour sauvegarder son patrimoine. C'est le devoir de tous envers les générations futures. Si cela est vrai pour le Maroc dans certains domaines, ce n'est nullement le cas en ce qui concerne le cinéma. Et pour preuve, les nombreux films perdus ou laissés pour compte depuis des décennies déjà. Perdus parce qu'on n'a pas pris les mesures nécessaires à temps pour les sauver ou les protéger. On sait que la nationalité d'un film est liée au pays producteur ou même coproducteur. Dans ce cas, que sont devenus les films produits par le Maroc réalisés par des cinéastes marocains ou étrangers au lendemain de l'indépendance ? La génération actuelle ne verra certainement pas les longs métrages «Les enfants du soleil» de Jacques Sévérac, ni «Quand mûrissent les dattes» de Bennani et Ramdani, datant respectivement de 1961 et 1968, deux productions marocaines censées nous renseigner sur les mentalités de l'époque. Si une copie du premier a circulé sous les manteaux à l'époque faste des ciné-clubs, il ne subsiste rien du deuxième. Après épuisement du positif, le négatif a tout simplement été abandonné à un laboratoire italien, l'Italie étant pays coproducteur du film. Depuis plus de 40 ans, il n'y a aucune trace du film. Même les plus illuminés des critiques ou historiens, n'ont jamais eu l'occasion de le voir. C'était le devoir de la cinémathèque de procéder à des prospections en vue de retrouver ses traces dans le but d'acquérir une copie. Pour cela, il faut la doter de moyens et surtout de personnel compétent et passionné par cette tâche. L'une des premières tâches «intelligentes» qui incombent à l'actuelle «Direction Générale» du C.C.M. est d'anéantir la cinémathèque marocaine huit ans seulement après son existence, réduisant à zéro toute chance de retrouver les copies des films marocains dans un but de protection du patrimoine filmique. Ailleurs, de tels responsables sont châtiés voire sont traduits en justice poursuivis pour incompétence ou négligence professionnelle. Et pourtant, pendant le peu de temps de son fonctionnement (1995-2003), la cinémathèque marocaine avait réalisé ce qui relevait de l'utopie: la sauvegarde des films du pionnier Mohamed Ousfour qui a réalisé des films sur supports amateurs tels que 8mm, super 8, 9mm et demi et meme 16 mm, supports qui ne permettent nullement de visionner ces films avec les techniques de projection actuelles. Avec l'aimable collaboration des cinémathèques et archives du film, aussi bien françaises qu'américaines, les films d'Ousfour, datant de plus de 50 ans, sont vus aujourd'hui par tous et en salles grâce aux efforts louables de la cinémathèque. Décidément, quand on aime la vie on va au cinéma. Mais aussi, quand on aime réellement le cinéma, on ne tue pas une cinémathèque.