Le Maroc s'est engagé à relever, en 2020, la part de l'électricité produite à partir des énergies renouvelables (solaire, éolienne et hydraulique) à 42% du bouquet électrique totale. La part du solaire de cet ambitieux projet, à savoir 2000MW de puissance installée (14% de la production électrique globale), est pourvue d'un important budget de 9 milliard de dollars, sa mise en œuvre est attribué à une agence (MASEN) créée à cette fin. La 1ere station, NOOR1, dont les travaux ont commencé à Ouarzazate produira, en 2015, 160MW à partir de la technologie thermo-solaire concentré (CSP). Sachant que le prix de vente de l'électricité au Maroc est inférieur à celui d'achat, contractualisé par l'ONE (1,62Dh le Kwh) avec le consortium mené par ACWA (chargé de la gestion de cette centrale), on constate que le prix de revient de l'énergie ainsi produite est encore élevé, ce qui n'en fait pas le but de ce programme. Egalement, le choix de la technologie (CSP) retenue pose question vu que d'autres technologies plus mûres, performantes et fiables existent : 2011 a vu l'installation de 26 000 MW de photovoltaïque et seulement 400 MW de CSP. Egalement, on relève que la seconde tranche de la centrale d'Ouarzazate, dont les appels à présélection sont lancés, comporte la production de 100MW par CSP Tour qui est une technologie différente de celle retenue pour la 1ère tranche (CSP Parabolique). La question du choix de cette technologie est encore plus légitime vu que le CSP Tour présente peu d'expérience commerciale, des problèmes au niveau du stockage, des risques de durabilité des technologies des récepteurs... Pour accompagner ce projet de développement de l'énergie solaire, un Institut de Recherche en Energie Solaire et en Energies Nouvelles a vu le jour, institut sous la tutelle du Ministère de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement et qui, comme son intitulé l'indique, s'occupe de la promotion de la recherche développement dans le secteur des énergies nouvelles. La première remarque qui émerge est relative à l'absence des organismes étatiques chargés de la recherche scientifique, à savoir le Ministère de l'Enseignement Supérieur de la Recherche Scientifique et de la Formation des Cadres, le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique ou l'Académie Hassan II des Sciences et Techniques, dans le conseil d'administration de cet institut. Ceci nous amène à poser la question de la convergence des politiques gouvernementales et de la volonté de mettre en place une stratégie de recherche dans un domaine où le Maroc ambitionne devenir un acteur majeur. L'implication de ces organismes permettrait également l'optimisation des moyens humains et financiers. Aussi le comité scientifique de cet institut, chargé de choisir les projets de recherche à financer (30 millions de dirhams en 2012 et 35 millions de dirhams en 2013) est constitué, en majorité, d'expert étrangers ce qui peut induire un décalage avec la réalité de la recherche nationale en termes de thèmes de recherche, d'équipements des laboratoires et de moyens humains disponibles. Ce financement doit, à mon avis, ambitionner l'émergence d'une recherche scientifique pérenne dans ce domaine avec des objectifs clairs et partagés par tous les acteurs, et ne doit pas être un outil de financement de projets épars. Ce vaste programme de développement des énergies solaires a, surement, une portée de création de richesse à moyen terme : cette technologie est vouée à être généralisée dans le monde et surtout dans les pays africains qui sont dotées d'un énorme gisement solaire et dont les besoins en électricité croient d'année en année. Cette création de richesse passe obligatoirement par la maitrise du savoir-faire à travers une recherche scientifique performante, un système de veille permanent et aussi des programmes de formation adéquats. Ces derniers doivent non seulement permettre la bonne marche des différents projets initiés ou à venir au Maroc, mais doivent doter les sociétés de compétences capables de les rendre compétitives dans les pays qui seront amenés à opter pour cette technologie pour produire de l'électricité ; l'évolution de la technologie va surement la rendre aussi compétitive que celles existants actuellement. Sur ce volet, une étude ordonnée par le Ministère de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement a mis en relief les besoins en ingénieurs, en techniciens et en technico-commerciaux et autres compétences. Or là- aussi, on constate que la démarche suivie, création de nouveaux instituts de formation, n'a pas mis à contribution les universités marocaines et plus exactement les facultés des sciences qui peuvent, dans le cadre des licences professionnelles ou des masters spécialisés, contribuer à la formation des profils recherchés. Cette approche aurait permis, par la même occasion, la promotion de l'adéquation formation-emploi et la consolidation de l'engagement de l'université dans les projets importants retenus. Pour conclure, une politique concertée intégrant le Ministère de l'industrie, pour l'émergence de société privées de taille critique capables de réaliser les projets du plan solaire marocains et autres projets dans d'autres pays, à l'instar des sociétés marocaines qui agissent dans les pays africains, est essentiel pour la création de la richesse et le raffermissement de nos lien avec ces pays. Un programme d'encouragement des formations dans les universités, comme celui initiée lors du démarrage du programme «émergence», et de promotion de la recherche scientifique impliquant les organismes étatiques est aussi primordial pour suivre les évolutions rapides et permanentes dans ce domaine et former les compétences nécessaires. Enfin il faut éviter quelques écarts à la bonne gouvernance de ce projet comme l'organisation de formations pour les enseignants, financées par la GIZ l'année dernière, sans vision claire ni implication des institutions concernées. Ainsi un outil et des indicateurs et mécanismes d'évaluation de ce projet, dans ces diverses composantes, doivent être mis en place pour assurer une meilleure synergie entre les différents acteurs de ce projet.