La Russie s'est dite très préoccupée par la situation «explosive, à proximité de (ses) frontières en Extrême-Orient», tandis que la Chine, seul allié de poids de Pyongyang, a demandé à «toutes les parties concernées de garder leur calme et de faire preuve de retenue». Paris souhaite que Pékin intervienne pour éviter tout dérapage. La France souhaite que la Chine, qui a «du pouvoir sur la Corée du Nord», intervienne dans la crise, a déclaré mercredi le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, en disant ne pas exclure un recours à l'arme nucléaire par un dictateur «imprévisible». «Nous avons demandé une réunion du Conseil de sécurité et nous demandons en particulier aux Chinois qui ont du pouvoir sur la Corée du Nord d'intervenir», a déclaré Laurent Fabius sur BFM-TV/RMC, en annonçant qu'il se rendrait «en Chine à la fin de la semaine prochaine». Interrogé pour savoir s'il craignait un recours à l'arme nucléaire par la Corée du Nord, le ministre français a répondu: «Ce sont des gens tellement imprévisibles qu'on ne peut rien écarter». «En menant une provocation, il peut aussi y avoir des dérapages. Parce que le nouveau dictateur de Corée du Nord a vraisemblablement des armes nucléaires, il a aussi des missiles, donc redémarrer un réacteur nucléaire peut avoir des conséquences très lourdes à la fois pour la Corée du Sud, pour le Japon, pour la Chine», a-t-il ajouté. Le dirigeant de la Corée du Nord, Kim Jong-Un, a ordonné vendredi des préparatifs en vue de frappes de missiles visant le continent américain et les bases des Etats-Unis dans l'océan Pacifique, en réponse à des vols d'entraînement de bombardiers furtifs B-2 américains. La Corée du Nord a empêché mercredi les employés sud-coréens d'entrer dans le complexe industriel intercoréen de Kaesong, poussant Séoul à ne pas exclure une action militaire pour protéger ses ressortissants. La veille, Washington avait promis de se défendre et de protéger ses alliés sud-coréen et japonais face à Pyongyang. Le complexe de Kaesong, situé en territoire nord-coréen et symbole de la coopération entre les deux pays, est ainsi devenu le dernier foyer de crispation dans la péninsule coréenne qui connaît une très nette escalade des tensions. «Le Nord nous a indiqué ce matin qu'il n'autoriserait que les départs depuis Kaesong et interdirait les trajets vers» le complexe, a déclaré mercredi Kim Hyung-Suk, porte-parole du ministère sud-coréen de l'Unification, en charge des relations entre les deux pays. Séoul a prévenu qu'il disposait d'un plan d'urgence, qui prévoit un possible recours à la force, pour garantir la sécurité de ses citoyens travaillant à Kaesong. Les 484 Sud-Coréens qui devaient se rendre au sein du complexe n'ont pas été autorisés à le faire par la Corée du Nord, selon le ministère. Sur les 861 Sud-Coréens présents à Kaesong mercredi, 33 avaient quitté le site mercredi après-midi, des centaines ayant décidé de rester pour assurer le bon fonctionnememt des entreprises. «Nous avons préparé un plan d'urgence, y compris une possible action militaire, en cas de situation grave», a fait savoir le ministère de la Défense à propos de la protection des Sud-Coréens sur le site. «Ici, ça marche comme d'habitude. Il ne semble pas que le site sera fermé», a déclaré un cadre sud-coréen depuis l'intérieur du site, Kim Dong-Kyu, d'un ton calme. La zone industrielle implantée à 10 km à l'intérieur de la Corée du Nord a été inaugurée en 2004 dans une volonté symbolique d'établir une coopération entre les deux Corées. Précieuse source de devises étrangères dont la Corée du Nord a grand besoin, le complexe de Kaesong est toujours resté ouvert malgré les crises répétées sur la péninsule, à l'exception d'une seule journée, en 2009. Pyongyang en avait bloqué l'accès pour protester contre des manoeuvres militaires conjointes américano-sud-coréennes. Kaesong accueille environ 53.000 Nord-Coréens travaillant pour le compte de 120 entreprises sud-coréennes, dans le secteur manufacturier principalement. Malgré les mises en garde des Etats-Unis et de la Corée du Sud, le Nord a multiplié les annonces et les actes de défi depuis le lancement réussi en décembre d'une fusée, considéré par la communauté internationale comme un tir d'essai de missile balistique, puis un troisième essai nucléaire en février. Et dans son bras de fer avec le reste du monde, la Corée du Nord a été plus loin mardi en annonçant son intention de redémarrer un réacteur nucléaire arrêté en 2007 en dépit des résolutions de l'ONU lui interdisant tout programme atomique.