Le conflit syrien est désormais «ouvertement intercommunautaire», ont indiqué jeudi les enquêteurs de l'ONU dans leur dernier rapport sur la Syrie, estimant que des «communautés entières» sont menacées et risquent de se trouver dans l'obligation de fuir le pays pour ne pas mourir au pays. Le risque de conflit intercommunautaire, impliquant une «confrontation entre groupes ethniques et religieux», «a toujours été présent», écrivent ainsi les quatre enquêteurs, parmi lesquels figure l'ancienne procureur général du TPIY Carla Del Ponte. Mais, poursuivent-ils, après près de 21 mois d'affrontements, «le conflit est devenu ouvertement intercommunautaire», citant les tensions entre les Chiites et les Sunnites. «Les autres minorités, comme les Arméniens, les Chrétiens, les Druzes, les Palestiniens, les Kurdes et les Turkmènes ont été emportés par le conflit. Cependant les divisions intercommunautaires sont les plus marquées entre la communauté Alaouite (...) et la communauté sunnite», expliquent les experts de l'ONU. La situation est telle que «des communautés entières risquent de devoir fuir le pays ou d'être tués dans le pays», s'alarment-ils. «Alors que les communautés croient -- non sans raison -- qu'elles font face à une menace existentielle, la nécessité d'un règlement négocié est plus urgent que jamais», affirment-ils. La Commission a été créée en août 2011 par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, mais elle n'a jamais reçu le feu vert de Damas pour se rendre sur place. Seul le président de la Commission, le Brésilien Paulo Pinheiro a pu s'y rendre à titre personnel. Dans son rapport, la Commission dénonce «l'escalade de la violence armée dans tout le pays». Elle souligne aussi l'apparition de nouveaux groupes armés d'opposition qui «sont moins susceptibles de se joindre à l'Armée syrienne libre (ASL)», expliquant que «beaucoup sont indépendants des groupes existants ou sont affiliés à d'autres groupes extrémistes ou islamistes comme Jabhat Al Nusra. La Commission a déjà recueilli plus d'un millier de témoignages dans les pays voisins de la Syrie, rassemblant ainsi des preuves sur des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité commis par les forces gouvernementales et les milices pro-régime. Elle a également relevé des crimes de guerre commis par l'opposition armée, mais à une échelle plus limitée. La Commission a établi deux listes de noms de responsables ou d'unités impliqués dans ces crimes et des éléments de preuve, remis au Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme. Ces documents confidentiels pourraient servir en cas de saisine de la Cour pénale internationale (CPI) par le Conseil de sécurité de l'ONU. Progression des rebelles à Hama Sur le terrain, les insurgés syriens ont étendu leurs positions vers le sud de la Syrie, prenant le contrôle d'au moins six localités dans la province centrale de Hama, a annoncé un commandant rebelle mercredi. «La bataille se poursuit. Nous avons libéré de nombreuses zones (de Hama) et nous étudions des plans visant à en libérer d'autres», a déclaré Qassem Saadeddine, joint par Skype. «Les trois-quarts de l'ouest rural de (la province d')Hama sont sous notre contrôle», a ajouté ce membre du commandement militaire rebelle, précisant que les villes de Latamna, Helfaya, Kfar Nabouda, Hasraya, Tibat al Imn et Kfar Zita avaient été prises. Un militant à Helfaya a confirmé que les rebelles avaient pris le contrôle de la ville et d'autres parties de la province. Les combats dans cette province qui s'étendent jusqu'au pied des montagnes abritant une communauté alaouite ont également éclaté dans la ville de Hama. Les opposants au président alaouite Bachar al Assad détiennent déjà la plupart des zones situées dans les provinces d'Alep et d'Idlib, plus au nord, et tentent de pénétrer dans Damas depuis leurs positions dans les faubourgs situés au sud de la capitale. Les avancées rebelles pourraient leur donner le contrôle effectif d'un territoire allant de la frontière turque à Hama, située à 180 km au sud. Plusieurs localités de la province de Hama ont été bombardées mercredi, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), organisation proche des rebelles et basée à Londres. Une centaine de personnes ont été tuées dans le pays dont au moins 21, comprenant 15 rebelles, dans l'explosion d'une voiture piégée qui semble s'être déclenchée accidentellement, à Aziziya, au sud d'Alep, selon l'OSDH. A Damas, les insurgés, qui sont entrés dans le camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, ont déclaré la zone «libérée» mercredi.