Pour la première fois depuis son élection en mai, François Hollande sera cette fin de semaine en Afrique, à Dakar puis au Sommet de la francophonie, à Kinshasa, avec la volonté d'affirmer sa politique africaine et de «tout dire, partout», au risque assumé de déplaire. Le président français, qui s'envole aujourd'hui vendredi pour Dakar avant de rejoindre demain Kinshasa, en a donné un avant-goût dès mardi quand, au grand dam de la République démocratique du Congo (RDC), il a estimé que la situation démocratique y était «tout à fait inacceptable». Dans ce contexte, le discours qu'il prononcera vendredi devant les parlementaires sénégalais, dans un pays dont la France ne cesse de louer les vertus démocratiques et leur exemplarité, sera scruté avec une attention toute particulière. Beaucoup y chercheront une «réparation» après les polémiques suscitées par son prédécesseur Nicolas Sarkozy qui, en juillet 2007, venu lui aussi faire ses premiers pas présidentiels sur le continent, avait vu dans «l'Homme africain (qui) n'est pas assez entré dans l'Histoire», le «drame de l'Afrique». «Je ne vais pas en Afrique pour me différencier, je vais en Afrique pour porter un message, celui de la France», a cependant prévenu François Hollande, qui sera accompagné de cinq ministres. Devant les parlementaires sénégalais il devrait ainsi décliner les grands principes de sa politique africaine, énoncés dès sa prise de fonctions : un partenariat «équilibré», tournant le dos à la «Françafrique», ces réseaux d'influence qui, depuis les années 1960, mêlaient politique, affaires et affairisme. François Hollande devrait affirmer le respect de la France pour ses partenaires africains, sa lucidité sur le passé colonial ou les espoirs qu'elle place dans la jeunesse africaine. Mais il devrait aussi prôner plus de démocratie et une meilleure gouvernance sur le continent. Dans le même temps, il réaffirmera la disponibilité de la France à participer au développement économique de l'Afrique, face aux appétits chinois, brésiliens ou indiens. Avec le président sénégalais Macky Sall qu'il retrouvera dès son arrivée à Dakar, il évoquera la situation au Mali voisin dont le nord est aux mains de groupes armés islamistes alliés d'Al-Qaïda. Le Sénégal est «extrêmement inquiet des risques de contagion régionale de la crise», explique-t-on à Paris. Un temps sera également consacré à une visite hautement symbolique de l'île de Gorée et de sa Maison des esclaves, restaurée avec le concours de la Fondation France Libertés de Danielle Mitterrand. François Hollande effectuera cette brève escale aux côtés de Valérie Trierweiler, sa compagne. L'étape congolaise s'annonce nettement moins consensuelle. Les critiques du président français sur les défaillance du pouvoir en matière de «droits», de «démocratie» ou de «reconnaissance de l'opposition» ne reflètent «aucune réalité», a réagi vivement le gouvernement mardi. M. Hollande rencontrera cependant le chef de l'Etat Joseph Kabila, réélu au terme d'un scrutin contesté en novembre 2011 et auquel il renouvellera sans nul doute ces messages. Mais il s'entretiendra également avec son principal opposant Etienne Tshisekedi, les dirigeants des sept partis d'opposition représentés au Parlement et les représentants de la société civile, ONG et défenseurs des droits de l'Homme. Devant le 14e Sommet de la Francophonie, François Hollande prendra la parole pour dire aux Africains, comme il l'a lui-même indiqué, que la langue française «leur appartient» mais qu'elle suppose aussi le partage de «valeurs» parmi lesquelles « il y a la démocratie, (...) la bonne gouvernance, la lutte contre toutes les corruptions».