A trois jours du premier débat télévisé entre Barack Obama et Mitt Romney, les deux camps rivaux dans la course à la Maison blanche s'efforcent publiquement de dédramatiser l'enjeu de cette confrontation et son influence sur le scrutin du 6 novembre. Une même ligne de conduite prévaut: minimiser les chances de son candidat et vanter les mérites de l'adversaire. «Le gouverneur Romney est un bon débatteur. Moi, je suis juste pas mal», a ainsi déclaré le président démocrate lors d'un meeting de campagne dimanche dans le Nevada devant quelque 11.000 partisans. Paul Ryan, colistier de Mitt Romney sur le ticket républicain, a affirmé lui sur Fox News: «Je ne crois pas qu'un seul événement soit de nature à faire la décision dans cette campagne.» A cinq semaines de l'élection, la stratégie est transparente: quoi qu'il arrive mercredi soir à Denver, il sera plus facile d'expliquer une mauvaise performance et, dans le cas contraire, on aura davantage matière à se féliciter d'une belle prestation. Mais, fidèle à son franc-parler, le gouverneur républicain du New Jersey, Chris Christie, a prédit lui que le débat de Denver allait modifier le cours de l'élection. «Toute la campagne va se retrouver sens dessus dessous jeudi matin», a-t-il dit dimanche sur CBS. Invité ensuite sur ABC, Chris Christie a insisté: «Je pense que ce dont nous avons besoin, c'est d'une grosse performance éclatante (de la part de Mitt Romney), et c'est qu'il va nous offrir.» Le candidat républicain aborde le premier des trois débats en retard dans les sondages nationaux et dans les intentions de vote dans les «Swing States», ces Etats-pivots qui décideront de l'issue de l'élection du 6 novembre. Il reste également affaibli par la «vidéo des 47%», un enregistrement clandestin d'un discours tenu devant des donateurs dans lequel il qualifie près de la moitié de la population américaine d'assistés dépendant des subventions fédérales, ne payant pas d'impôts et se considérant comme des victimes. «Nous avons commis quelques faux pas, mais au final, le choix est très clair», a reconnu son colistier, Paul Ryan, sur Fox News. Depuis le débat historique de 1960 entre John Kennedy et Richard Nixon, la confrontation entre les deux candidats à la Maison blanche sur petit écran est devenue un rituel observé de près par les stratèges des deux camps, les politologues et les sondeurs. Les républicains s'accrochent ainsi au souvenir de la présidentielle de 1980. En octobre, avant l'unique débat de la campagne, Jimmy Carter, président démocrate sortant, faisait la course en tête et Ronald Reagan était à moins de 40% des intentions de vote. Mais le candidat républicain, ancien acteur, avait remporté la mise devant les caméras de télévision pour être finalement élu avec neuf points d'avance. La campagne cette année présente une caractéristique différente de l'élection 2008, où Barack Obama et John McCain étaient tous deux des néo-postulants. Cette fois, il y a un sortant avec un bilan, et un challenger. Or, à l'exception de Bill Clinton en 1996, les premiers débats ont généralement profité au challenger, mieux préparé que le président sortant aux joutes des primaires - Romney a participé à plus de 20 débats depuis le début de l'année - et se retrouvant soudain sur un pied d'égalité avec le locataire de la Maison blanche. Les conseillers de Barack Obama précisent que le président sortant n'arrivera pas mercredi soir sur le plateau construit dans l'université du Colorado avec la volonté de «marquer des points» ou de lancer des piques à son adversaire. «Il veut parler directement aux familles, aux gens qui seront chez eux, sur leur canapé, mangeant un morceau, buvant une bière ou un soda et se branchant pour la première fois sur la campagne. C'est à eux qu'il parlera directement», a dit la porte-parole de son équipe de campagne, Jen Psaki, aux journalistes présents dimanche à bord d'Air Force One. Obama va néanmoins se préparer activement à ce débat avec ses plus proches conseillers: David Plouffe, conseiller à la Maison blanche, David Axelrod, son conseiller politique, Gene Sperling, son conseiller pour l'économie, Jack Lew, le secrétaire général de la Maison blanche, et Jon Favreau, qui lui écrit ses discours. Malgré les sondages favorables, il n'est pas question non plus de pécher par excès d'optimisme, insiste-t-on dans le camp Obama. «Nous n'allons pas l'emporter dans les Etats-pivots avec 10 ou 12 points d'avance. Cette élection va se resserrer. Nous avons bâti notre campagne sur la conviction que cela se jouerait à quelques voix dans quelques Etats», a dit David Plouffe sur NBC.