La place qu'occupe l'opposition parlementaire dans la vie politique d'une nation constitue le principal élément révélateur de l'effectivité de la démocratie, dans le cadre d'un régime politique parlementaire. En effet, c'est à travers elle que peuvent s'exprimer des positions différentes de celles admises par la majorité, et que s'exerce un véritable contrôle sur le pouvoir exécutif, dans la mesure où les gouvernements des régimes parlementaires sont investis par une majorité parlementaire qui leur accorde sa confiance, et dont ils forment, en quelque sorte, un prolongement. Inscrites au centre de la théorie démocratique, les questions relevant du statut et du rôle que joue l'opposition parlementaire soulèvent ainsi, plus particulièrement au niveau constitutionnel, un grand nombre de préoccupations. A la tête desquelles on retrouve la charpente démocratique fondamentale de la Constitution, l'égalité et l'universalité du suffrage, la tenue d'élections libres et justes, la liberté de former des organisations à vocation politique et d'y adhérer, les libertés individuelles dont la liberté d'expression, le cadre électoral équitable permettant aux partis de concourir aux élections sur un pied d'égalité, ou encore l'accès aux médias. Notons que la plupart de ces éléments sont protégés par la Constitution marocaine du 29 juillet 2011, gage de la volonté des pouvoirs publics d'accélérer davantage le processus de démocratisation que vit le pays depuis quelques années. De cette manière, l'article 10 - dans son intégralité - du titre premier de la Loi fondamentale précitée, est consacré aux garanties accordées à l'opposition parlementaire, permettant à la fois de dresser une liste des droits lui étant expressément reconnus et d'établir le rôle qu'elle doit assurer au sein du parlement. Pour ce qui est de la question des droits de l'opposition parlementaire, qui est in concreto celle des minorités politiques, on y retrouve, principalement, la garantie de participer aux activités, législative, de contrôle et d'information du parlement ; les droits de représentation ; l'aide au financement ; et les droits procéduraux d'exercice du pouvoir. Notons que la nouvelle Constitution marocaine définit l'alternance comme le cadre d'exercice de ce pouvoir. Concernant le rôle de l'opposition parlementaire, tel que défini par la Constitution marocaine, il relève davantage de l'exercice d'un contre-pouvoir, dans la mesure où elle permet d'empêcher toute dérive de la majorité pouvant remettre en cause les droits et libertés fondamentaux des citoyens. Bien que la question de la consécration constitutionnelle de l'opposition parlementaire n'ait que récemment constitué une véritable préoccupation des régimes modernes, il n'en demeure pas moins qu'elle est grandement révélatrice de la stabilité politique, du degré de maturité démocratique, de l'équilibre dans le partage des moyens politiques et économiques, ainsi que de la reconnaissance du pluralisme politique et culturel du pays. Ainsi, le Maroc associe-t-il son choix d'opter pour un régime parlementaire, intrinsèquement lié à l'idéal démocratique, à celui d'institutionnaliser un espace d'échange réciproque entre la majorité gouvernementale et la minorité parlementaire, et ce, dans une logique de conciliation. De cette manière, le constituant marocain a fait passer le statut de l'opposition d'une simple formule théorique à un principe constitutionnel, dans la mesure où, d'un point de vue juridique, il existe désormais un corpus normatif, composé de l'article 10 de la Constitution marocaine, de lois organiques, de lois ordinaires, et des règlements intérieurs des deux Chambres, dans lequel est défini l'ensemble des compétences dévolues à la minorité parlementaire, chargée de remplir la fonction d'opposition à la majorité gouvernementale. *Créé en 2004 à Rabat, le Centre d'Etudes Internationales (CEI) est un groupe de réflexion indépendant, intervenant dans les thématiques nationales fondamentales, à l'instar de celle afférente au conflit du Sahara occidental marocain. La conflictualité structurant la zone sahélo-maghrébine constitue également l'une de ses préoccupations majeures. Outre ses revues libellées, « Etudes Stratégiques sur le Sahara » et « La Lettre du Sud Marocain », le CEI initie et coordonne régulièrement des ouvrages collectifs portant sur ses domaines de prédilection. Sous sa direction ont donc été publiés, auprès des éditions Karthala, « Une décennie de réformes au Maroc (1999-2009) » (décembre 2009), « Maroc-Algérie : Analyses croisées d'un voisinage hostile » (janvier 2011) et « Le différend saharien devant l'Organisation des Nations Unies » (septembre 2011). En avril 2012, le CEI a rendu public un nouveau collectif titré, « La Constitution marocaine de 2011 – Analyses et commentaires ». Edité chez la LGDJ, ce livre associe d'éminents juristes marocains et étrangers à l'examen de la nouvelle Charte fondamentale du royaume.