Un nouveau modèle de gestion est mis en œuvre pour faire des plages de la destination un espace ordonné et sécurisé, dans le cadre d'une gouvernance participative. Une démarche inédite à l'échelle nationale. Suivez La Vie éco sur Telegram Transats privatisant le sable, loueurs clandestins plaquant des serviettes à l'aube, scooters des mers fendant la zone de baignade... Chaque été, l'image carte postale de la baie gadirie se brouille. Pour l'édition 2025, la préfecture d'Agadir-Ida Outanane dégaine un modèle inédit : remplacer l'ancienne adjudication des lots de plage par un partenariat public-privé transparent, responsable et assorti d'un arsenal réglementaire censé mettre fin aux rentes sauvages. Le nouveau dispositif conserve l'appel d'offres, mais le transforme en séance publique où siègent administration, commune, forces de l'ordre, candidats et ONG. Les règles sont désormais gravées : 80% de l'estran demeurent libres d'accès, 20% seulement peuvent faire l'objet d'une exploitation commerciale dûment balisée. Chaque partenaire se voit confier un «périmètre-qualité» global, incluant sable, douches, sanitaires, passerelles PMR et parking, afin d'éviter la segmentation conflictuelle qui alimentait les dérives. Les redevances étaient autrefois symboliques, elles sont désormais indexées sur des investissements tangibles et contrôlées chaque trimestre. La réforme s'appuie sur cinq arrêtés préfectoraux : interdiction des quads, fin du camping sauvage, couloirs de navigation pour les jet-skis, encouragement des activités nautiques non motorisées, responsabilités de chaque acteur clairement définies. C'est sur le volet motorisé que la tension monte. Une poignée de sociétés de jet-ski, implantées, certaines depuis vingt ans, ont appris que leurs autorisations ne sont pas renouvelées. Elles dénoncent un «assassinat économique» et menacent de saisir le tribunal administratif. La wilaya rétorque PV à l'appui : «Tous les retraits répondent à des infractions avérées», tranche une source institutionnelle. Côté parasols, la philosophie change également : la location reste autorisée, mais strictement cantonnée à des rectangles signalés et numérotés. Hors zone ou hors tarif affiché, le matériel est confisqué et le contrat rompu. Un numéro vert (doublé d'une application mobile) permet au vacancier d'alerter en temps réel la brigade mixte Commune-Sûreté qui patrouille de 8h à 20h. Pour dissuader l'intimidation, les partenaires agréés doivent afficher un tarif-plage unique et tenir un registre des équipements. Tout manquement grave entraîne le retrait immédiat de l'agrément. Le Plan d'utilisation et de gestion des plages (PUGP) prévoit aussi des audits environnementaux, des indicateurs d'affluence et le suivi de la qualité de l'eau. Les partenaires doivent financer le nettoyage quotidien, trier les déchets et installer des cendriers de plage. Un reporting mensuel sera publié en open data. «Nous voulons que les opérateurs s'approprient la plage pour la défendre, pas pour la privatiser», souligne Saïd Amzazi. Pour les loueurs déchus, la porte n'est pas totalement fermée : la wilaya propose un accompagnement vers des niches moins bruyantes – kayak, paddle, sauvetage nautique. À long terme, la wilaya entend arrimer ce partenariat balnéaire à une stratégie plus large : mobilité douce vers la mer, signalétique trilingue, zones sans moteur, postes de secours modernisés, éclairage solaire, Wi-Fi public. Objectif : faire de la plage un équipement complet, exemplaire et partagé, où l'on peut louer un transat sans se faire racketter, bronzer et siroter un rafraîchissement dans un cadre soigné et sécurisé. Si le pari est gagné, Agadir confortera son rang de première destination balnéaire du Royaume, non plus malgré, mais grâce à ses règles de jeu et une haute saison régulée, animée et partagée. Il y va de son attractivité et du bien-être de ses habitants et de ses visiteurs.