La prochaine étape de la réforme carcérale au Maroc se focalisera sur le personnel du secteur (responsables et fonctionnaires) et la lutte contre les dépassements qu'ils pourraient commettre, a indiqué mardi le délégué général de l'Administration pénitentiaire et de la réinsertion, Hafid Benhachem. Si la majeure partie des fonctionnaires font montre de «compétence» et de «rectitude», quelques éléments «ont néanmoins besoin de redressement», soit par l'orientation, la sanction ou les poursuites judiciaires, le cas échéant, a dit M. Benhachem en s'adressant aux directeurs régionaux et locaux des établissements pénitentiaires lors d'une rencontre à Rabat. «Il ne faut plus que le monde des prisons soit montré du doigt comme un secteur corrompu», a-t-il insisté, appelant les éléments en question à assimiler les transformations qui s'opèrent dans le pays en respectant la loi et en obéissant aux exigences de l'éthique, avant de mettre en garde: «Nous combattrons les violations, tout ce qui est contraire à la loi et aux principes moraux». M. Benhachem a, d'autre part, affirmé que la réforme carcérale aura des retombées positives sur l'image du Maroc tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, mettant l'accent sur l'énorme responsabilité qui incombe aux responsables du secteur pénitentiaire, en tant que l'administration la plus soumise au regard critique de l'opinion publique, sans oublier qu'il demeure «sous la loupe de la Délégation générale, du Conseil national des droits de l'Homme, du Parlement, de la Délégation interministérielle aux droits de l'Homme, des médias et des ONGs». La peine de prison prive la personne de sa liberté et non de sa dignité et de ses droits, a rappelé M. Benhachem, incitant les responsables des établissements pénitentiaires «à se conformer à la loi, à la morale, à la probité et à bannir les pratiques de torture, même si le pensionnaire enfreint le règlement». A propos du dernier rapport de la Commission de justice, de législation et des droits de l'Homme à la Chambre des représentants sur la situation des prisons, M. Benhachem a affirmé qu'il est en accord avec ce rapport en dépit de réserves sur les sources et le degré de leur fiabilité, assurant que les observations formulées seront prises en considération. Le secteur pénitentiaire connaissait et est toujours confronté à des problèmes de gestion, de conformité aux lois, d'infrastructures, d'alimentation et de prestations de soins, ajoutant que des efforts importants ont été consentis, depuis 2008, pour améliorer ces conditions à travers le rétablissement de l'ordre, après le chaos qui régnait dans les prisons, notamment les évasions spectaculaires, le non respect de la loi et les collusions entre des détenus et certains membres du personnel. Il a été question, au cours des quatre dernières années, de remédier au problème des agressions entre les co-détenus et contre le personnel, la rénovation de certains pénitenciers délabrés et l'amélioration de la situation sociale et matérielle des fonctionnaires, a-t-il fait savoir. Le coordonnateur de la Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus, Azzedine Belmahi, a, pour sa part, salué «le travail dur et honorable» des fonctionnaires de l'Administration pénitentiaire à travers la contribution à la réintégration des détenus dans la société, indiquant que le rapport de la Commission parlementaire est «bénéfique pour prendre conscience et résoudre les dysfonctionnements» et «reflète une forte volonté de changer les conditions de gestion du secteur pénitentiaire». Le personnel n'est pas le seul responsable de la promotion de la situation des prisons, notant l'existence d'autre intervenants qui doivent contribuer à améliorer les conditions de vie au sein de ces établissements pour changer leur image, a-t-il estimé, notant qu'un programme intégré de formation et d'apprentissage portant sur l'accompagnement du détenu dans la prison et après la libération est en cours dans 44 établissements, dans la perspective de sa généralisation fin 2013. La rencontre, qui s'inscrit dans le cadre des réunions périodiques tenues par la Délégation générale avec les directeurs locaux et régionaux des prisons, vise à examiner le rapport de la Commission parlementaire de la justice, de la législation et des droits de l'Homme consacré à sa visite, le 24 mai, à la prison locale d'Oukacha de Casablanca et la manière de tirer profit de ce document pour faire face aux contraintes et consolider les acquis des réformes. Driss Yazami prône «l'ouverture et la transparence» lors de la prochaine visite du rapporteur spécial de l'ONU sur la torture De son côté, le président du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), Driss Yazami a appelé les responsables des établissements pénitentiaires à observer un comportement «ouvert et transparent» lors de la visite du rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, M. Juan Méndez, prévue en septembre prochain au Maroc. M. Yazami a souligné que «le message essentiel à transmettre lors de cette visite est le fait que nous avons réalisé beaucoup de progrès, de manière pacifique, dans le domaine des droits de l'Homme et de la démocratie, mais il faut déployer davantage d'efforts dans un cadre de coopération commune». M. Yazami a indiqué que M. Méndez devrait, lors de sa visite, s'enquerir en toute liberté de la situation dans certains établissements pénitentiaires, hôpitaux psychiatriques et centres de protection de l'enfance, et ce dans le cadre des conventions internationales signées par le Maroc dans ces domaines. D'autre part, M. Yazami a fait observer que le CNDH est conscient des difficultés que rencontrent les responsables sur ces établissements, ainsi que les contraintes quotidiennes auxquelles font face pour corriger les dysfonctionnements et les contradictions sociales au sein des prisons. Il a, à cet égard, estimé qu'une coopération entre ces responsables et les institutions nationales permettra de surmonter les obstacles dans ce secteur et réaliser des progrès dans le domaines des droits des détenus. Il a ajouté que les rapports du CNDH sur d'éventuels dysfonctionnements en matière des droits de l'Homme vise essentiellement l'amélioration de l'image du Maroc et sa position, en termes de respect des droits de l'Homme, à l'échelle internationale, rappelant, à cet égard, l'élaboration en cours d'un nouveau rapport sur la situation dans les prisons. Ce rapport, a-t-il fait remarquer, est le fruit de deux mois de visites dans plusieurs centres de détention.