Les Frères musulmans ont affirmé vendredi que leur candidat Mohamed Morsi arrivait en tête du premier tour de l'élection présidentielle en Egypte et qu'il serait opposé au second tour à Ahmed Chafik, favori de l'armée et de la minorité copte. «C'est sûr que l'on aura au second tour Mohamed Morsi et Ahmed Chafik», a dit un responsable de la confrérie musulmane à Reuters sous le sceau de l'anonymat, ajoutant que les responsables des Frères musulmans se réunissaient pour définir la stratégie du second tour, prévu le 16 et 17 juin. D'après lui, Morsi aurait obtenu 25% et Chafik 23%. Le dissident de la confrérie Abdel Moneim Aboul Fotouh obtiendrait 20% et le candidat de la gauche Hamdeen Sabahi aurait récolté 19%. Selon la même source, ces résultats provisoires seraient issus des décomptes réalisés dans 12.800 des 13.100 bureaux de vote du pays. Aucun résultat officiel ne devrait être connu avant mardi, mais les représentants des candidats sont autorisés à assister aux décomptes. Les douze candidats et les autorités égyptiennes n'étaient pas joignables dans l'immédiat pour commenter l'information. Selon les autorités électorales, le taux de participation au premier tour avoisinait les 50%. «Nous sommes confiants sur le fait que le prochain président égyptien sera Mohamed Morsi», a déclaré Essam el Erian, un haut responsable du parti Liberté et Justice des Frères musulmans qui a raflé la majorité des sièges du parlement lors des élections législatives. Une victoire des Frères musulmans placerait la confrérie islamiste en position de force dans le pays le plus peuplé du monde arabe et contribuerait à redessiner la carte de la région. Les islamistes ont été les grands vainqueurs du «printemps arabe», notamment au Maroc, en Tunisie et en Libye et jouent un rôle influent dans le mouvement de contestation du régime du président syrien Bachar al Assad. Un premier tour dans le calme Le premier jour de vote s'est globalement déroulé dans le calme et les observateurs indépendants n'ont recensé que des infractions mineures se limitant à des actes de campagne électorale à proximité de certains bureaux de vote. Les Egyptiens semblent partagés entre leur refus de voir les caciques de l'ancien régime revenir au pouvoir et leur inquiétude face à un potentiel monopole des islamistes. «La révolution nous a été volée par les caciques de l'ancien régime, les Frères musulmans et l'armée. Si Ahmed Chafik ou Amr Moussa gagne, le peuple fera une nouvelle révolution», prévient Mohamed Kamal, un décorateur de 32 ans, qui a voté tard jeudi pour le candidat de la gauche Hamdeen Sabahi. Certains redoutent de nouveaux affrontements dans les rues en cas de victoire de Chafik. Une page Facebook a été créée jeudi sous le titre «je suis le premier martyr de la révolution si Moussa ou Chafik l'emporte». A peine élu, le prochain chef de l'Etat devra trancher sur la rédaction de la constitution, qui fait l'objet de vifs débats entre les islamistes et les laïcs, et pourrait également voir sa marge de manoeuvre empiétée par le Conseil suprême des forces armées (CSFA), soupçonné de vouloir conserver une grande partie de ses prérogatives. Les généraux se sont toutefois engagés à remettre le pouvoir au nouveau président élu le 1er juillet prochain. Les Etats-Unis, par la voix de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, se sont engagés à «se tenir aux côtés du peuple égyptien». «Nous sommes impatients de travailler avec le gouvernement égyptien élu démocratiquement», écrit-elle dans un communiqué. «Nous allons continuer à nous tenir aux côtés du peuple égyptien alors qu'il travaille à respecter la promesse du soulèvement populaire de l'année dernière et à construire une démocratie qui reflète leurs valeurs et leurs traditions, qui respecte les droits de l'homme universels et rencontre leurs aspirations à la dignité et à une vie meilleure.»