La Ligue arabe doit se réunir ce samedi pour examiner la situation en Syrie, où se poursuit la répression malgré l'acceptation par Damas d'un plan de l'organisation panarabe visant à mettre fin à la crise. Alors que la violence n'a pas baissé d'un iota. Au moins trente civils et 26 soldats ont péri ces dernières heures dans le pays où s'intensifie la répression des manifestants opposés au président Bachar al Assad et augmentent les attaques contre les forces de sécurité. La Ligue arabe a obtenu, le 2 novembre, l'accord de Damas à un plan de sortie de crise. Les militants pro-démocratie ont appelé à de nouvelles manifestations massives vendredi à travers la Syrie pour crier leur hostilité au régime de Bachar al-Assad, malgré de nouvelles violences qui ont fait des dizaines de morts jeudi, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Réunion de la Ligue arabe Sous le slogan «Nous demandons le gel de l'adhésion de la Syrie à la Ligue arabe», les manifestations coïncideront avec une réunion au Caire du Comité ministériel arabe chargé du dossier syrien, qui accuse le régime Assad de ne pas respecter le plan arabe appelant à cesser les violences. Cette réunion sera suivie samedi d'une autre élargie à l'ensemble des ministres arabes des Affaires étrangères. Constatant cet état de fait et «l'incapacité du gouvernement à respecter ses obligations», le Qatar a convoqué la réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères de l'organisation samedi au Caire. Le Qatar fait partie, avec l'Arabie saoudite, Oman et Bahreïn, des pays de la Ligue qui poussent en faveur de pressions accrues sur la Syrie, allié de leur rival iranien. Mais les diplomates soulignent que la perspective de voir la Ligue suspendre Damas de ses instances se heurte à l'opposition de plusieurs autres Etats membres comme le Yémen, confronté à son propre soulèvement, le Liban, où l'influence syrienne reste forte, et l'Algérie, qui surveille l'impact du «printemps arabe» sur sa propre population. Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid al Moualem, promet pour sa part dans une lettre au secrétaire général de la Ligue que les autorités appliqueront dans une semaine la plupart des clauses du plan, «contrairement à ce qui est répandu par des chaînes satellitaires injustes». Accentuation de la répression Le gouvernement syrien s'est engagé à évacuer ses forces des villes, à libérer les prisonniers politiques et à engager dans les quinze jours des pourparlers avec l'opposition. Mais les jours suivants, la répression à Homs, l'un des principaux foyers de la contestation, s'est encore accentuée. Le gouvernement syrien avait accepté le 2 novembre ce plan prévoyant aussi la libération des détenus, le retrait de l'armée des villes et la libre circulation des médias. Mais depuis cette date, les forces du régime chargées de réprimer la révolte ont renforcé leurs opérations, faisant des dizaines de morts en particulier à Homs (centre), un haut lieu de la contestation, assiégé et bombardé par l'armée, selon les organisations syriennes de défense des droits de l'Homme. Jeudi, 16 civils, dont une fillette, ont péri à Homs sous les balles des forces de sécurité, alors que cinq corps de personnes disparues ont été retrouvés dans cette région, selon un nouveau bilan de l'OSDH. «Les forces de sécurité ont arrêté trois blessés dans un hôpital privé» de Homs, a ajoute l'OSDH. Homs est surnommée par les militants la «capitale de la Révolution», en raison du grand nombre des «martyrs» qui y sont tombés depuis le début du mouvement de contestation le 15 mars. Dans le gouvernorat d'Idleb (nord-ouest), cinq civils ont été tués lors de perquisitions, selon l'OSDH, qui signale également un mort à Hama (nord), un autre à Daraa (sud) et trois morts dans la région de Damas. Grèves de soutien et arrestations à Damas Par ailleurs, l'OSDH évoque «plusieurs affrontements» entre soldats et hommes armés, vraisemblablement des déserteurs, qui auraient fait «des dizaines de morts et de blessés parmi les soldats», dans la région d'Idleb. Toujours, dans cette région d'Idleb, «au moins quatre soldats ont été tués» lors d'une attaque contre un barrage militaire près de la ville de Maaret al-Noomane», indique l'OSDH. Dans l'est du pays, deux militaires, dont un officier, ont été tués et cinq soldats blessés lorsque des déserteurs présumés ont attaqué un barrage militaire près de Deir Ezzor. Et à Harasta, près de Damas, des affrontements ont eu lieu entre l'armée et des déserteurs présumés, de même source. Dans le même temps, une grève générale a été observée dans plusieurs villes du pays à l'appel de la Commission générale de la révolution syrienne (CGRS), un des groupes qui chapeautent la contestation, «pour soutenir Homs», selon des vidéos diffusées sur YouTube. A Jabal al-Zaouiya, dans la région d'Idleb, les forces de l'ordre ont tenté d'ouvrir les magasins par la force, selon l'OSDH. A Damas, des agents de sécurité déployés en force dans le quartier de Barzé ont arrêté plusieurs personnes. «Des tireurs embusqués sont postés sur les hauts immeubles à Barzé, où une importante manifestation» a eu lieu, a ajouté l'organisation basée au Royaume-Uni. Inéfficacités des démarches diplomatiques ? La France et les Etats-Unis, qui réclament le départ de M. Assad, ont critiqué l'inaction du Conseil de sécurité de l'ONU face à la répression en Syrie, qui a fait selon les Nations Unies plus de 3.500 morts depuis le 15 mars. Mais les diplomates soulignent que la perspective de voir la Ligue suspendre Damas de ses instances se heurte à l'opposition de plusieurs autres Etats membres comme le Yémen, confronté à son propre soulèvement, le Liban, où l'influence syrienne reste forte, et l'Algérie, qui surveille l'impact du «printemps arabe» sur sa propre population. Mercredi, le secrétaire d'Etat adjoint pour le Moyen-Orient, Jeffrey Feltman, a affirmé que des dirigeants arabes avaient indiqué en privé aux Etats-Unis qu'ils proposaient l'asile à M. Assad pour le convaincre de partir. «Bachar al-Assad est fini», a-t-il dit. Le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe la majorité des courants de l'opposition, a lancé une campagne auprès des pays arabes pour réclamer des mesures sévères contre le régime qu'il a accusé de «massacres barbares». Le CNS réclame des poursuites devant la Cour pénale internationale contre le régime pour «génocide», une protection internationale pour la population civile. Il demande aussi à être reconnu comme «représentant légitime» du peuple syrien.