La polémique qui fait rage actuellement concernant les prix exorbitants de l'estivage au Nord comme au Sud du Maroc, passe sous silence l'un des facteurs les plus importants qui incite un grand nombre d'estivants marocains à privilégier les vacances à l'étranger, notamment dans des pays aussi proches que l'Espagne et le Portugal, plutôt que de rester chez eux. Tout aussi déterminant que le prix ou la qualité des prestations touristiques, ce facteur n'est autre que le civisme. Malgré les efforts inégaux des services de voirie des diverses communes, dans nos plages dépourvues de commodités et de poubelles où les estivants sont obligés de se soulager en pleine mer ou en plein air, abandonnant leurs déjections, déchets et détritus à même les vagues et à même le sable, l'estivage et le farniente basculent dans des ambiances franchement scatologiques. Mais ce n'est pas là le pire, puisque ce sont surtout les attitudes et les comportements qui rebutent le plus les estivants, même les plus braves et les plus patients. Avant même de fouler le sable de nos belles mais sales plages, la première dose de stress est injectée par ces hordes de gardiens improvisés de parking qui règnent en maîtres absolus sur l'ensemble de notre littoral. Violents et menaçants, les gilets jaunes des plages marocaines sont une espèce à part, beaucoup plus féroces que leurs congénères qui sévissent en ville. Ils vocifèrent à longueur de journées, imposant leurs directives et leurs tarifs prohibitifs à des estivants qui n'ont rien demandé, mais qui, en l'absence de services d'ordre dissuasifs, subissent leur loi sans broncher. Une fois sur le sable, d'autres prédateurs prennent le relais pour accentuer davantage cette sensation de mal-être qui règne dans nos plages. Il s'agit des loueurs de transats et de parasols, ainsi que des nuées de marchands ambulants qui s'introduisent jusqu'à sous les parasols pour vendre leurs beignets, leurs glaces ou leurs «Pipas», foulant au passage toutes les règles de la bienséance et du respect de l'intimité. En fin de boucle, ce sont les estivants eux-mêmes qui se pourrissent la vie mutuellement. Qui à coup de décibels de musique bruyante ou de vociférations, qui à coup de parties de football ou de volley improvisées entre les parasols, qui à coup de rodéo de quads et de buggys au plus près des transats, qui à coup enfin de drague lourde et de harcèlement de femmes et de jeunes filles qu'elles soient vêtues de bikinis ou de burkinis. Face à un tel enfer, le choix est vite fait. Soit on se barricade chez soi, soit on va ailleurs, vers les plages moins belles que les nôtres, mais plus avenantes, mieux organisées et surtout plus civilisées, d'Espagne et du Portugal. Et ce n'est pas qu'une question de moyens.