Le lancement des aides directes pour le logement est une initiative visant à soutenir le secteur immobilier, mais son impact sur les prix et son accessibilité pour la classe moyenne urbaine suscitent des interrogations. Ce mardi 2 janvier, la ministre de l'Aménagement du territoire national, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Politique de la ville, Fatima-Ezzahra El Mansouri, a annoncé par une vidéo sur les réseaux sociaux le lancement effectif des aides directes pour le logement.
Via le site web www.daamsakane.ma, les futurs acquéreurs pourront s'inscrire sur le portail afin de demander leurs aides, qui sont de 100.000 dirhams pour les logements dont le prix d'achat est inférieur ou égal à 300.000 dirhams, et de 70.000 dirhams pour les logements dont le prix d'achat est compris entre 300.000 dirhams et 700.000 dirhams.
Ces aides constituent une nouvelle approche gouvernementale pour redynamiser le secteur immobilier, en soutenant la demande plutôt que l'offre. Décidée lors d'une réunion présidée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI le 17 octobre 2023, le nouveau programme d'aide au logement est une bouffée d'oxygène pour les promoteurs immobiliers, qui réclament depuis des années l'intervention de l'Etat pour les remettre à flot.
Année de stagnation
Sans sombrer dans la crise, le secteur immobilier a connu en 2023 une quasi-stagnation, et même un recul des transactions dans certaines catégories. En attendant les chiffres du quatrième trimestre 2023, ceux du troisième trimestre renseignent déjà sur cette tendance baissière. Entre le T3-2022 et le T3-2023, les transactions ont ainsi chuté de 7,2%, une baisse principalement enregistrée pour les maisons (-14,8%) et les villas (-14%).
"Au cours de l'année 2023, le marché immobilier marocain a connu une période difficile, avec des signes évidents de déclin. Plusieurs facteurs ont contribué à cette situation préoccupante, tels que l'offre excédentaire, la limite inférieure et la baisse continue des prix", analyse Zakariae Beddag, expert en crédit immobilier.
Selon les professionnels consultés par « L'Opinion », plusieurs éléments expliquent ce recul. La perte du pouvoir d'achat due à l'inflation et au contexte global a dissuadé plusieurs acheteurs de passer à l'acte, et ce, même si la hausse du taux directeur n'a pas réellement impacté les taux de crédit immobilier. Le manque de visibilité a également freiné les mises en chantier pour les promoteurs immobiliers.
Exit la classe moyenne ?
En ce qui concerne l'année 2024, les prévisions indiquent une amélioration par rapport à l'année précédente. "Les perspectives pour l'année 2024 s'annoncent meilleures grâce principalement au programme d'aides directes lancé récemment par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui contribuera à une véritable relance du secteur", prédit Zakariae Beddag.
"Le début de l'année 2024 pourrait être un peu plus chanceux pour ceux qui cherchent à devenir propriétaires puisque les prix devraient chuter de 5% à 10%, selon la Banque centrale", poursuit l'expert en crédit immobilier. Cette baisse des prix, conjuguée à l'aide annoncée par le gouvernement, devrait enfin décider les acheteurs les plus hésitants à acquérir leurs premiers logements.
Cependant, ces transactions pourraient se concentrer sur les petites et moyennes villes, ou dans la périphérie des grandes villes, et s'orienter vers le logement économique et moyen standing. En effet, les aides proposées ne dépassent pas le plafond de 700.000 dirhams, ce qui reste en deçà des prix moyens dans les grandes agglomérations (autour de 1 million de dirhams).
Cela risque de fait d'exclure une partie de la classe moyenne urbaine, qui cherche avant tout des logements alliant confort, proximité et prix entrant dans les capacités d'endettement de ces personnes. L'autre risque est que par un effet d'opportunité, les promoteurs immobiliers augmentent leur prix de sorte à ce que les aides octroyées par l'Etat soient intégrées d'office dans le prix de vente du bien.
Le programme d'aides directes au logement est une étape positive pour stimuler le secteur immobilier marocain et soutenir la demande de logements. Cependant, sa mise en œuvre et son impact sur le marché devront être surveillés de près pour garantir que ces mesures bénéficient véritablement à ceux qui en ont le plus besoin.
3 questions à Zakariae Beddag « Il est essentiel de rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande » * Comment les changements de l'offre et de la demande ont-ils affecté le marché immobilier en 2023 ? - Avant d'examiner les évolutions des prix immobiliers en milieu urbain et faire de l'analyse, il est essentiel de prendre en compte les indicateurs de l'offre et de la demande pour une analyse plus approfondie. Au cours de l'année 2023, le marché immobilier marocain a connu une période difficile, avec des signes évidents de déclin. Plusieurs facteurs ont contribué à cette situation préoccupante, tels que l'offre excédentaire, la limite inférieure et la baisse continue des prix. Le potentiel de croissance dans les principales villes est un indicateur clé à suivre. Ce trimestre, il est encore présent car la demande est supérieure à l'offre, offrant de nouvelles opportunités de croissance. À titre d'exemple, à Casablanca, la demande est presque trois fois plus élevée que l'offre, ce qui ouvre la voie à de nouvelles perspectives de développement pour la prochaine année et pour que le marché immobilier marocain puisse se redresser, il est essentiel de rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande. Au fil du temps, l'offre excédentaire a créé une pression à la baisse sur les prix et a rendu difficile la vente des biens immobiliers. Pour stimuler la demande et soutenir les prix, des mesures doivent être prises pour ajuster l'offre aux besoins réels du marché.
* Quels ont été les facteurs clés influençant l'évolution des taux de crédit immobilier en 2023 ? - L'évolution des taux de crédit immobilier peut être influencée par plusieurs facteurs, notamment : 1) Les décisions de Bank Al-Maghrib concernant l'augmentation du taux directeur ont un impact direct sur les taux d'emprunt, 2) L'inflation élevée a poussé à la hausse du taux directeur ainsi que les taux d'intérêt appliqués aux clients, 3) Les mesures prises par le gouvernement pour stimuler ou freiner l'économie peuvent également jouer un rôle dans l'évolution des taux de crédit immobilier. Il est important de noter que ces facteurs interagissent de manière complexe, et l'évolution des taux de crédit immobilier est souvent le résultat d'une combinaison de plusieurs de ces influences.
* Quelles sont les perspectives du secteur pour 2024, et est-ce qu'il y aura une stabilisation des prix ? - Les perspectives pour l'année 2024 s'annoncent meilleures grâce principalement au programme d'aides directes lancé récemment par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui contribuera à une véritable relance du secteur. Le début de l'année 2024 pourrait être un peu plus chanceux pour ceux qui cherchent à devenir propriétaires puisque les prix devraient chuter de 5% à 10%, selon BAM. Rec
Offres de logements : Des besoins à combler Dans une perspective à moyen terme, le Maroc se trouve face à un défi majeur en matière de logement, avec un besoin cumulé évalué à 2,1 millions d'unités d'ici 2025 et à 2,9 millions d'ici 2030, selon le ministère de l'Habitat. L'horizon 2025 est particulièrement crucial, et pour répondre à cette demande estimée, le secteur immobilier devra maintenir la cadence actuelle de production, soit une moyenne annuelle de plus de 213.000 unités.
Ces projections s'alignent sur une tendance qui place les habitations sociales à 140.000 DH en tête des préférences, représentant 49% de la demande, suivies par les logements de la même catégorie mais coûtant 250.000 DH (15%). Les habitations économiques (16%), le moyen standing (13%) et le haut standing (7%) complètent le panorama, avec une prévision de demande plus forte en milieu urbain qu'en milieu rural.
Ces projections mettent en lumière l'importance cruciale de l'effort continu du secteur immobilier pour répondre aux exigences croissantes du marché et contribuer à la résolution des défis en matière de logement au Maroc. Aide directe au logement : Une approche novatrice Au cœur d'un virage majeur dans la politique immobilière, une révolution prend forme. L'aide financière directe au logement remplace les traditionnelles exonérations fiscales octroyées aux promoteurs immobiliers. Ce programme novateur, dévoilé devant Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Rabat le 17 octobre, est destiné aussi bien aux résidents qu'aux Marocains résidant à l'étranger (MRE), et s'étend sur la période de 2024 à 2028.
Les fondements de cette initiative reprennent forme à travers des subventions, adossées à la valeur des biens immobiliers, avec un montant d'aide fixé à 100.000 dirhams pour l'acquisition de logements dont le prix de vente n'excède pas les 300.000 dirhams TTC.
Une aide de 70.000 dirhams est destinée aux logements dont les prix oscillent entre 300.000 et 700.000 dirhams TTC.
Pour simplifier la gestion et l'approbation des demandes d'aide directe au logement, une nouvelle plateforme numérique, daamsakane.ma, a été officiellement lancée.
Le 2 novembre, le Conseil de gouvernement a donné son approbation au projet de décret n° 2.23.350 définissant les modalités de l'aide de l'Etat au logement.
Présenté par la ministre de l'Habitat, Fatima Ezzahra El Mansouri, ce texte a pour objectif de mettre en place les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 8 de la Loi de Finances n° 50.22 de l'année fiscale 2023.