Malgré la gifle reçue à l'Assemblée nationale, le projet de loi sur l'immigration poursuivra son parcours en commission mixte paritaire à la recherche d'un compromis, écartant toute dissolution ou utilisation du 49.3. Au lendemain du coup de tonnerre provoqué par le rejet du projet de loi par les députés avant même le début de son examen, le président de la République Emmanuel Macron a fustigé en Conseil des ministres le "cynisme" et "le jeu du pire" des oppositions qui veulent "bloquer le pays". Signe du séisme, le chef de l'Etat a convoqué dans la soirée un dîner de près de trois heures à l'Elysée avec une demi-douzaine de ministres parmi les plus politiques, sa cheffe du gouvernement, et des cadres de la majorité, dont les rapporteurs du texte sur l'immigration. Au menu: élaborer la riposte politique et trouver un chemin de crête pour accoucher d'un texte, malgré l'important revers essuyé lundi. Selon trois participants, Macron a écarté l'hypothèse d'une dissolution ou d'un 49.3 pour passer en force, donnant "mandat aux parlementaires de négocier, sans fixer lui-même le cap". Le sort de ce projet de loi est désormais exclusivement remis entre les mains d'une commission mixte paritaire, que le gouvernement convoquera "au plus vite", afin de "chercher un compromis entre la majorité et les oppositions", a déclaré le porte-parole Olivier Véran. En cas d'échec de la CMP, le texte serait donc abandonné, sans nouvelle lecture à l'Assemblée ni au Sénat, a-t-il été conclu mardi soir, après un an et demi de revirements, tractations et péripéties.
LFI dénonce une éventuelle «corruption» de députés
La cheffe des députés LFI Mathilde Panot a saisi mardi la justice "sur des faits pouvant s'apparenter à de la corruption d'élus par Gérald Darmanin" afin d'obtenir le vote de députés en faveur de son texte sur l'immigration, le ministre de l'Intérieur répliquant dans la soirée par l'annonce d'un dépôt de plainte en retour. La présidente des députés LFI avait annoncé quelques heures plus tôt saisir la procureure de la République "sur des faits pouvant s'apparenter à de la corruption d'élus par le ministre Gérald Darmanin". "Marchander des votes pour éviter le rejet de sa loi immigration, contre des gendarmeries, des brigades de gendarmes mobiles ? " a-t-elle affirmé dans un tweet. Et de poursuivre : "Ces faits, s'ils sont avérés, sont une atteinte grave à l'exercice démocratique !". Sur le document adressé à la Procureure de la République Laure Beccuau et posté sur X par Panot, le groupe rappelle l'adoption lundi par l'Assemblée nationale d'une motion de rejet préalable annulant de facto l'examen du projet de loi sur l'immigration. "Or selon les révélations du journal Libération, 'dans les jours précédant le vote de la motion, [Gérald Darmanin] n'avait pas ménagé ses efforts, enchaînant les tête-à-tête, laissant à son cabinet le soin d'appeler individuellement des députés LR (Les Républicains, NDLR), leur promettant ici ou là une brigade de gendarmerie'", poursuit-on. Compte tenu de ces éléments "pour le moins suspects" et "d'une particulière gravité", le groupe parlementaire appelle la Procureure de la République à mener "les investigations nécessaires pour déterminer s'il y a eu ou non corruption d'un certain nombre de députés par le ministre de l'Intérieur en personne ou par ses équipes".